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Travail en crise : l’alerte mondiale de Gallup

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Travail en crise : l’alerte mondiale de GallupImage d'illustration © DR

Le « State of the Global Workplace : 2025 Report » de Gallup révèle une baisse alarmante de l’engagement des employés, notamment des managers, dans un contexte transformé par l’IA. Avec une perte de 438 milliards de dollars US en productivité en 2024 et un potentiel de gain de 9,6 trillions si l’engagement atteint 100%, il appelle les leaders à agir via la formation, le coaching et le bien-être des managers.

Dans un monde où l’intelligence artificielle redéfinit les paradigmes du travail, le rapport State of the Global Workplace : 2025 Report de Gallup dresse un bilan critique de l’engagement des employés et de leur bien-être à travers plus de 160 pays. S’appuyant sur des données collectées entre avril et décembre 2024 auprès de 227.347 employés, ce rapport met en évidence une baisse significative de l’engagement mondial, passant de 23% en 2023 à 21% en 2024, une chute comparable à celle de 2020 pendant les confinements.

Cette tendance, principalement due à une désaffection des managers (engagement tombé de 30% à 27%), menace la productivité globale et le PIB mondial. Cependant, au-delà des constats alarmants, le rapport propose des solutions concrètes : former les managers, améliorer leurs compétences en coaching et renforcer leur bien-être.

La crise de l’engagement des employés : un phénomène global

L’une des conclusions les plus frappantes du rapport est la diminution de l’engagement des employés à l’échelle mondiale. En 2024, seulement 21% des employés se déclarent engagés, contre 23% l’année précédente, marquant la deuxième baisse significative en douze ans après 2020. Cette tendance est particulièrement prononcée chez les managers, dont l’engagement a chuté de 30% à 27%, tandis que celui des employés individuels reste stable à 18%.

Cette désaffection est encore plus marquée chez les jeunes managers (moins de 35 ans), avec une baisse de cinq points, et les femmes managers, qui enregistrent une chute de sept points. Ces chiffres soulignent un épuisement lié à une décennie de disruptions : retraites post-pandémiques, cycles d’embauche instables, restructurations rapides, contraintes budgétaires et émergence de l’IA.

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Les témoignages des managers illustrent cette pression croissante. Abu M., un manager marketing en Arabie Saoudite, décrit les difficultés psychologiques liées aux décisions d’embauche et au manque de ressources, tandis qu’Andile V., un manager opérationnel en Afrique du Sud, déplore une sous-dotation en personnel.

Ces récits reflètent un fossé croissant entre les attentes des dirigeants et les réalités opérationnelles, un fossé qui risque de se propager aux équipes si des mesures ne sont pas prises. Le rapport souligne que 70% de l’engagement d’une équipe dépend directement de son manager, faisant de cette crise une priorité urgente.

Le bien-être en déclin : une menace pour la résilience

Parallèlement à la baisse de l’engagement, le rapport note une détérioration du bien-être global des employés. L’évaluation de la vie, mesurée sur une échelle de 0 à 10, montre que seulement 33% des travailleurs se considèrent comme « prospères » en 2024, contre une amélioration constante ces dernières années.

Cette régression touche particulièrement les managers plus âgés (baisse de cinq points) et les femmes managers (baisse de sept points), tandis que le bien-être des employés individuels s’améliore légèrement. Ces disparités suggèrent que les managers, en première ligne des bouleversements, subissent un stress disproportionné.

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Les émotions quotidiennes renforcent ce constat : 40% des employés rapportent un stress intense, 21% de la colère, 23% de la tristesse et 22% de la solitude. Ces chiffres indiquent un climat émotionnel tendu, exacerbé par des environnements hybrides ou à distance (stress à 45% et 46%).

Les employés valorisent les managers soutenant, comme Lethiwe D. en Afrique du Sud, qui évoque un manager motivant. À l’inverse, l’absence de soutien peut pousser à la démotivation, comme le déplore Elke H. en Allemagne. Cette dégradation menace la résilience organisationnelle, rendant impératif un investissement dans la santé mentale.

Trois leviers pour relancer la motivation

Face à cette situation, le rapport propose trois actions pour débloquer un potentiel de productivité de 9,6 trillions de dollars, soit 9% du PIB mondial. La première consiste à former tous les managers pour réduire de moitié leur désengagement actif, alors que seulement 44% en reçoivent. Abu Abdullah A., un superviseur saoudien, témoigne des bénéfices d’une formation qui l’a aidé à gérer ses équipes.

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La deuxième action recommande d’enseigner des techniques de coaching, améliorant la performance des managers de 20 à 28% et l’engagement des équipes de 18%. Ces effets persistent jusqu’à 18 mois, comme l’illustre Bryan V., un ingénieur britannique, qui souligne l’importance d’une équipe unie. Enfin, la troisième action vise à augmenter le bien-être des managers de 32% via un développement continu, portant leur taux de « prospérité » de 28% à 50% avec un encadrement, selon Ewa, une cheffe d’équipe polonaise.

Cartographie mondiale de l’engagement au travail

Le rapport offre une vue régionale nuancée. Les États-Unis et le Canada, ainsi que l’Amérique latine, mènent avec 31% d’employés engagés, suivis de l’Asie du Sud (26%) et de l’Asie du Sud-Est (26%). L’Europe (13%) et le Moyen-Orient et Afrique du Nord (14%) affichent les taux les plus bas. En Afrique subsaharienne, 19% sont engagés, avec une forte intention de départ au Liberia (47%) et en Eswatini (86%). En Asie de l’Est, la Mongolie atteint 41%, contre 7% au Japon.

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Ces disparités reflètent des contextes locaux variés. L’Asie du Sud-Est bénéficie d’un climat d’emploi favorable (78% au Vietnam), contrastant avec l’Europe, marquée par le stress. Ces données incitent à adapter les stratégies aux spécificités régionales.

Un défi global, une responsabilité des leaders

Le rapport State of the Global Workplace : 2025 Report dresse un tableau préoccupant, mais prometteur. La baisse de l’engagement et du bien-être, amplifiée par l’IA et les pressions post-pandémiques, place les managers au cœur d’une crise. Cependant, les solutions proposées offrent une voie pour transformer cette crise en opportunité, libérant un potentiel économique colossal. Les leaders doivent agir maintenant pour harmoniser humain et technologie.

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