Photo prise lors du concert d’ouverture du festival gnaoua 2025 © LeBrief / Ayoub Jouadi
La Cité des alizés a renoué hier soir avec ses pulsations les plus profondes. Le Festival Gnaoua et Musiques du Monde a donné le coup d’envoi de sa 26e édition par une parade d’ouverture haute en couleur, symbole d’un vivre-ensemble assumé. Des milliers de festivaliers se sont massés dans les ruelles de la médina pour suivre le cortège mené par les Maâlems Gnaoua, accompagné d’artistes venus des quatre coins du monde.
« Ce festival, ce n’est pas qu’une série de concerts, c’est un moment où les cultures se retrouvent, se parlent, s’écoutent », rappelle Neila Tazi, productrice de l’événement. Dans une ambiance festive et fraternelle, les rythmes ancestraux ont redonné vie à une tradition vivace, inscrite dans le patrimoine vivant de l’UNESCO, et qui continue de se renouveler année après année.
Présent lors de l’inauguration, André Azoulay, conseiller du Roi et président fondateur de l’Association Essaouira-Mogador, a salué « la puissance de la musique comme vecteur d’unité et de dialogue ». Une ouverture à la hauteur des ambitions du festival, placé sous le haut patronage du roi Mohammed VI.
Une fusion magistrale pour ouvrir le bal
À 20h30 sur la scène Moulay Hassan, le premier concert a donné le ton d’une édition marquée par l’audace artistique. Mâalem Hamid El Kasri, maître incontesté du répertoire gnaoui, a inauguré cette nouvelle saison musicale avec une prestation empreinte de spiritualité et d’énergie.
« Tagnaouit, c’est toute ma vie », confie El Kasri. « Ce soir, c’était comme un retour à l’essence, même dans la fusion. Tout est resté traditionnel, il n’y avait que des percussions. Et pourtant, j’ai pu m’exprimer librement, chanter, me reposer, laisser les autres instruments dialoguer avec le guembri. »
Le festival Gnaoua 2025 s’ouvre avec une fusion maroco-sénégalaise
À ses côtés, la compagnie Bakalama du Sénégal a propulsé le public dans une transe rythmique saisissante. Percussions sabars, danses tribales, énergie brute : tout dans leur prestation évoquait une Afrique vivante, tournée vers le monde. Le directeur artistique de la troupe confie :
« On a ressenti une vraie connexion avec le Maroc, avec les musiciens, avec le public. Le concert, c’était une conversation. Une fusion réussie. »
Les voix de la Marocaine Abir El Abed et de la Sénégalaise Kya Loum ont complété ce pont musical entre les rives de l’Atlantique, entre tradition et modernité, entre enracinement et ouverture.
Un laboratoire vivant de la culture africaine
Cette fusion musicale n’est pas un hasard. Elle est le fruit d’un travail en amont, dans les ateliers et résidences organisés chaque année autour du festival. Parmi les nouveautés de cette édition, Neila Tazi souligne l’importance du partenariat lancé avec la prestigieuse Berklee College of Music.
« Depuis l’an dernier, cinq jours avant le festival, des professeurs de Berklee viennent enseigner ici. Ils découvrent la musique gnaoua, la transmettent à des artistes venus de 23 pays. Et nos musiciens marocains en ressortent enrichis des meilleures techniques pédagogiques du monde. »
La transmission, pilier du festival depuis sa création, prend ici une dimension académique. À la croisée des savoirs populaires et des pratiques institutionnelles, Essaouira devient un laboratoire vivant de l’enseignement musical.
Du côté des artistes africains, ce dialogue passe aussi par une volonté d’inscrire leurs œuvres dans une dynamique continentale.
« Ce spectacle doit voyager », insiste le membre de la compagnie Bakalama.
« Il faut que nos dirigeants comprennent l’impact culturel et économique de ce genre d’initiatives. Ce qu’on vit ici doit circuler en Afrique. »
La culture comme levier d’avenir
Au-delà des concerts, c’est une vision que défend le festival : celle d’une culture ouverte, partagée, levier de paix et de développement. « La culture, c’est ce qu’il y a de meilleur en nous », insiste Neila Tazi.
« Elle rapproche les peuples, elle garde les dialogues ouverts, elle maintient l’espoir. »
Plus de 350 artistes sont attendus pour cette édition 2025, dont 40 Maâlems Gnaoua, avec des fusions transatlantiques qui vont marquer les esprits : la rencontre entre Houssam Gania et le batteur new-yorkais Marcus Gilmore, les échanges entre Dhafer Youssef et Morad El Marjan, ou encore le concert de clôture de Maâlem Mohamed Boumezzough aux côtés de musiciens maliens, marocains et français.
Et au cœur du programme, un rendez-vous de plus en plus attendu : le Forum des droits humains, qui tiendra sa 12e édition autour du thème « Mobilités humaines et dynamiques culturelles ». Porté par le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), cet espace de réflexion prolonge les engagements du festival hors des scènes, pour ancrer la culture dans les débats d’aujourd’hui.
Du guembri au balafon, du soufisme marocain aux tambours sénégalais, cette première journée du Festival Gnaoua 2025 aura rappelé une évidence : à Essaouira, la musique est plus qu’un art. Elle est un langage, une mémoire, une vision du monde. Et tant que les sons circuleront librement entre les peuples, le dialogue ne sera jamais rompu.
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