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Le rapport 2025 de l’UNFPA, intitulé La véritable crise de la fécondité, déconstruit les discours alarmistes sur la surpopulation ou la dépopulation. Ce ne sont ni l’explosion démographique ni le vieillissement des sociétés qui devraient être au cœur des débats, mais plutôt l’incapacité persistante des individus à réaliser leurs aspirations en matière de procréation. Dans un monde en mutation, le véritable enjeu réside dans le libre arbitre reproductif, encore trop souvent entravé par des obstacles économiques, sociaux, juridiques et culturels.
Dilemme entre économie et normes sociales au Maroc
Au Maroc, les aspirations procréatives sont fortement mises à l’épreuve par des contraintes structurelles. Selon les données du rapport, près de 47 % des répondants marocains citent les difficultés financières comme principale raison d’avoir eu moins d’enfants qu’ils ne le souhaitaient initialement. Ces résultats placent le Maroc parmi les pays où les considérations économiques influencent le plus fortement les décisions en matière de fécondité.
Le manque d’espace de logement, les loyers élevés, la précarité de l’emploi et la pénurie de services de garde d’enfants sont également cités comme des freins majeurs. Parallèlement, 20% des personnes interrogées évoquent l’incertitude liée à l’avenir comme facteur dissuasif. S’ajoute à cela un manque d’implication des partenaires dans la vie domestique, relevé par 13% des répondants.
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Autre élément marquant : 19% des Marocains évoquent un changement de souhaits en cours de vie, souvent influencé par le partenaire ou les conditions de vie. Cela traduit à la fois une certaine flexibilité des projets familiaux et une instabilité des contextes décisionnels.
L’enquête souligne que, bien que mieux doté que certains voisins en infrastructures, le Maroc reste en retard dans la reconnaissance effective du droit des individus à décider librement du moment, du nombre et des conditions dans lesquelles ils souhaitent – ou non – fonder une famille. La marginalisation économique et les normes de genre demeurent des obstacles majeurs à l’exercice du libre arbitre en matière de procréation.
La parentalité confrontée à la dure réalité en Afrique
L’Afrique présente un paradoxe : bien que la fécondité y soit généralement élevée, de nombreuses femmes et hommes ont en réalité plus ou moins d’enfants qu’ils ne le souhaitent. Au Nigeria, par exemple, 16% des personnes interrogées évoquent l’absence de soutien de leur partenaire comme facteur limitant leur désir d’enfants. En Afrique du Sud, 53% dénoncent les contraintes financières, tandis que 33% pointent le manque de solutions de garde.
L’infertilité demeure une problématique taboue et stigmatisante en Afrique subsaharienne. Le rapport insiste sur cette dimension, soulignant que l’infertilité, souvent vécue comme une source de honte, prive de nombreux couples de leur droit fondamental à la parentalité. Les traitements médicaux restent rares, coûteux ou inaccessibles, accentuant ainsi les inégalités entre milieux urbains et ruraux.
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Mais au-delà de l’accès aux soins, c’est toute la question de l’autonomie procréative qui est en jeu. Les grossesses non intentionnelles restent fréquentes : une femme sur quatre ne peut pas décider librement d’utiliser une méthode contraceptive, et une sur dix n’a aucun pouvoir de décision concernant sa propre santé.
Les politiques publiques, souvent fragmentées, peinent à répondre à ces défis structurels. Le rapport insiste sur la nécessité de dépasser les approches strictement sanitaires, en adoptant une stratégie intégrée incluant le soutien économique, l’éducation à l’égalité de genre, le développement de services de garde, ainsi qu’un meilleur accès à l’information sur les droits reproductifs.
Ailleurs dans le monde : entre transition démographique et crise de confiance
En Europe, où la fécondité est souvent inférieure au seuil de renouvellement — soit 2,1 enfants par femme —, la crise de la fécondité prend une autre forme. Le vieillissement de la population et la baisse du nombre de naissances ne résultent pas d’un rejet de la parentalité, mais d’obstacles systémiques, notamment le coût du logement, l’absence de services de garde abordables et l’insécurité de l’emploi.
En Italie et en Allemagne, plus de 25% des personnes interrogées déclarent avoir renoncé à avoir des enfants pour des raisons économiques. En Suède, pourtant modèle en matière de politique familiale, 10% des femmes estiment que le manque d’implication de leur partenaire dans les tâches domestiques a influencé leur décision de réduire leur nombre d’enfants.
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En Inde, le rapport illustre l’évolution des mentalités : la grand-mère, mariée à 16 ans, a eu cinq enfants, tandis que sa petite-fille ne prévoit d’en avoir que deux, voire aucun, en raison de son souhait de faire carrière et de maîtriser sa fécondité. En Corée du Sud, pays au taux de fécondité le plus bas au monde, 58% des répondants citent la contrainte financière comme principal obstacle à la parentalité.
L’urbanisation rapide, la pression sociale et le coût exorbitant de l’éducation creusent l’écart entre désir et réalité procréative. L’accès à la contraception s’est amélioré, mais le poids des normes reste important, et l’État tarde à mettre en place des politiques sociales inclusives.
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Aux États-Unis, malgré un accès relativement satisfaisant aux soins et à l’éducation, 38% des répondants déclarent que les contraintes économiques les ont poussés à revoir à la baisse leur projet parental. Les préoccupations liées à l’avenir politique et climatique (17%) sont également très présentes. Un clivage marqué existe entre populations rurales et urbaines, mais aussi selon les appartenances raciales et sociales.
Le droit à l’avortement et à la contraception fait encore l’objet de débats houleux, révélant combien les droits procréatifs peuvent être instrumentalisés politiquement.
Tandis qu’au Mexique et au Brésil, la situation se caractérise par une forte aspiration à la parentalité, contrecarrée par des contraintes économiques et sociales majeures. Près de 35% des répondants mexicains et 39% des Brésiliens citent les difficultés économiques comme principal frein. Les femmes expriment leur peur de faire naître un enfant dans un monde instable, marqué par les guerres, le changement climatique et la violence.
Les politiques publiques restent fragmentées, souvent sous-financées, et la santé reproductive demeure un luxe pour les populations les plus marginalisées. Le rapport 2025 de l’UNFPA rappelle que la véritable crise de la fécondité réside dans l’écart entre les souhaits des individus et leur capacité à les réaliser. Pour remédier à cette crise silencieuse, les États doivent passer d’une gestion quantitative à une approche fondée sur le respect des droits. Le libre arbitre en matière de procréation est la clé d’un avenir démographique juste, équitable et durable.
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