CIH Bank : la croissance est là, la vigilance aussi

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CIH Bank : la croissance est là, la vigilance aussiConférence de presse de CIH Bank, le 13 mars 2025 à Casablanca © LeBrief

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L’année 2024 n’a pas été de tout repos pour CIH Bank. De croissances en performances, la banque se targue d’être LA banque du virage digital. Et pourtant la concurrence fait rage, le contexte bancaire est plus féroce avec des taux volatils. CIH Bank cherche désormais à consolider son chemin, en capitalisant sur ses acquis, sans tomber dans les pièges de la surchauffe. Analyse.

Le Crédit immobilier et hôtelier, CIH Bank, a présenté ses résultats annuels lors d’une conférence, à Casablanca, le 13 mars. Et les premières tendances qui en ressortent : croissance maîtrisée, diversification sectorielle, digitalisation et rigueur prudentielle.

Longtemps perçue comme LE spécialiste du financement immobilier, CIH Bank continue de s’émanciper de cette étiquette. Certes, l’immobilier pèse encore très lourd dans son portefeuille avec 46,2% des crédits en cours, mais les lignes bougent. La part croissante des crédits à la consommation, le positionnement solide sur le financement automobile (où la banque revendique 28% de parts de marché tout de même), ainsi que l’accompagnement des PME prouvent que CIH fait avant tout dans la prudence. Car oui, en finances, s’il y a une règle qui prime, c’est bien celle de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Cette stratégie permet d’ailleurs de diluer le risque sectoriel et sécuriser des revenus plus réguliers, qui ne dépendraient pas tous en même temps des mêmes cycles et tendances économiques.

Les résultats consolidés vont dans ce sens. Le Produit net bancaire (PNB) progresse de 6,1%, soutenu par une hausse de 6,8% de la marge d’intérêt. Les encours de crédit franchissent la barre des 101,2 milliards de dirhams (11,5%), pendant que les dépôts grimpent de 13,9%.

Un rythme de croissance cohérent sur une bonne année. Mais il y a un sujet plus sensible : la rentabilité des ressources. La baisse progressive des taux d’intérêt, couplée à une concurrence sur l’épargne, pourrait rogner les marges. CIH Bank devra rester vigilante sur ce point pour préserver sa montée en puissance.

Autre signal positif, le ratio de solvabilité est en hausse en atteignant les 13,73%, contre 12,51% un an plus tôt. Les investisseurs voient dans cet indicateur une bonne capacité à absorber d’éventuels chocs. Cette solidité prudentielle s’appuie notamment sur un pilotage rigoureux du risque, un contrôle des créances douteuses et une politique de provisionnement renforcée.

Par ailleurs, l’un des faits marquants de l’année reste la baisse du coût du risque, tombé à 0,85%, contre 1,15% en 2023. Un autre bon indicateur qui révèle une meilleure qualité du portefeuille, grâce à une sélection plus fine des dossiers, mais aussi à un environnement économique plus favorable. CIH Bank capitalise ici sur un savoir-faire en gestion du risque, tout en conservant une dynamique de distribution de crédit soutenue. Le résultat net social, en hausse de 21%, vient conforter cette stratégie.

Un dividende généreux, mais un capital renforcé

Pour les actionnaires, l’année 2024 aura aussi une saveur particulière. La banque propose un dividende de 14 dirhams par action, signe d’une politique de distribution généreuse. Mais cette redistribution n’entame pas les capacités de renforcement du bilan. L’augmentation de capital de 350 millions de dirhams, couplée à des émissions obligataires de 1,25 milliard, montre que CIH Bank adopte une stratégie à double détente : fidéliser les investisseurs tout en consolidant ses fonds propres.

Mais tous les indicateurs ne sont pas au vert. L’environnement monétaire reste incertain. La politique des taux directeurs pèsera sans doute sur les marges d’intérêt à moyen terme. Par ailleurs, les exigences prudentielles croissantes imposent une vigilance sur la structure des bilans bancaires.

Abordons à présent le sujet de la digitalisation. Il s’agissait clairement du levier de différenciation de CIH Bank. Tout a commencé avec Code 30 (voir vidéo).

CIH Bank revendique aujourd’hui plus de 2 millions d’utilisateurs de ses services en ligne. Et cela ne se limite pas à l’expérience client : elle permet aussi de compresser les coûts d’exploitation, d’optimiser les processus et de renforcer la rentabilité des services. La banque mise clairement sur ce différenciateur pour consolider sa position face à une concurrence de plus en plus agile, notamment avec l’arrivée des néobanques.

C’est quoi une néobanque ?

Les néobanques se déclinent en deux catégories : certaines possèdent une licence bancaire, ce qui leur permet d’offrir l’ensemble des services d’une banque classique, mais sans agence physique. D’autres, en revanche, n’ont pas ce statut et sont considérées comme des intermédiaires financiers. Elles s’appuient alors sur des établissements partenaires pour gérer les opérations de dépôt et de paiement.

Il ne faut pas confondre néobanque et banque en ligne. La banque en ligne est une version digitalisée d’un établissement bancaire traditionnel, tandis qu’une néobanque est une structure entièrement conçue pour fonctionner exclusivement via internet et mobile, sans aucune infrastructure physique héritée du modèle bancaire classique.

Même en l’absence d’agence, les néo-banques permettent à leurs clients d’ouvrir un compte, d’obtenir une carte de paiement (souvent à débit immédiat), et de retirer de l’argent aux distributeurs automatiques. Toutes les opérations se font de manière 100% dématérialisée.

Et puisque nous parlons de réseau physique, CIH Bank a accueilli, en 2024, 19 nouvelles agences, portant le total à 427, tandis que le parc de guichets automatiques a augmenté de 228 unités. Ce développement du maillage territorial répond à un double objectif, étendre la couverture clientèle tout en valorisant la proximité, dans une logique omnicanale. La banque semble ainsi avoir compris que la digitalisation ne suffit pas à elle seule à capter toutes les clientèles, notamment les plus réfractaires aux services 100% dématérialisés.

Si CIH Bank a réussi à trouver un point d’équilibre entre ambition, rigueur et prudence, le contexte économique mondial pourrait rapidement rebattre les cartes. Le ralentissement de certaines économies partenaires, la volatilité des matières premières et la pression sur les liquidités ne sont pas à exclure.

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