Sommet de l’UA : ce qu’il faut retenir de la 35e session ordinaire

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Sommet de l’UA : ce qu’il faut retenir de la 35e session ordinaire

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L’Assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine (UA) a conclu ce dimanche sa 35e session ordinaire en Éthiopie. Plusieurs sujets ont été évoqués, notamment l’impact de la Covid-19 et la récente vague de changements anticonstitutionnels de gouvernements sur le continent ainsi que l’accréditation controversée d’Israël à l’organisation en tant qu’observateur. Le chef de la diplomatie marocaine a pour sa part présenté le rapport du Roi Mohammed VI sur l’opérationnalisation de l’Observatoire africain des migrations.

Autour duthème « Renforcer la résilience en matière de nutrition sur le continent africain : Accélérer le développement du capital humain, social et économique », l’Assemblée des chefs d’État et de gouvernementde l’Union africaine (UA) a conclu ce dimanche sa 35e session ordinaire. Ce sommet de deux jours a fait suite à une interruption en 2021 en raison de la pandémie de la Covid-19. Il a été marqué par des appels à la poursuite de la solidarité africaine pour faire face à l’impact de la crise sanitaire sur le continent et à la lutte contreles fléaux du terrorisme et des changements anticonstitutionnels de gouvernements.

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Le président sénégalais Macky Sall, qui a succédé au président de la République démocratique du Congo (RDC), Felix Tshisekedi, à la tête de l’UA, a souligné la nécessité de mener des efforts concertés pour répondre aux menaces continentales telles que l’instabilité, le changement climatique et les effets dévastateurs de la pandémie actuelle. «Nous devons concentrer notre attention sur la construction de nos pays et également assurer l’intégration continentale. Et il ne peut y avoir de développement et d’intégration, là où il n’y a pas de paix, pas de sécurité et pas de stabilité», a-t-il déclaré. Pour Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’UA,cette 35e session ordinaire était une réunion «fructueuse», qui s’est tenue alors que le continent est confronté à «de nombreux défis».Il a donné un large aperçu de l’état de l’Union, abordant les questions liées à la santé, à la gouvernance, à la paix et à la sécurité, entre autres, ainsi que les mesures prises par l’UA et ses États membres pour traiter les questions d’importance régionale.

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S’adressant au sommet par un appel vidéo, Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies (ONU), a indiqué que la mise en œuvre des objectifs de développement durable des Nations unies et de l’Agenda 2063 de l’UA est la pierre angulaire des relations entre les deux organisations. Ensuite, il s’en est pris au système financier mondial qui a «abandonné les pays africains», le qualifiant de «moralement décadent». Guterres a en outre assuré auxdirigeants africains que l’ONU soutiendra l’Afrique dans son redressement face à la pandémie de la Covid-19.

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La funeste vague de coups d’État

Les dirigeants africains ont pour leur part condamné «sans équivoque» la récente «vague de changements anticonstitutionnels de gouvernement» sur le continent, notamment au Mali, au Burkina Faso, au Soudan en Guinée Conakry ainsi que la récente tentative de putsch en Guinée-Bissau. «Chaque dirigeant africain de l’assemblée a condamné sans équivoque le modèle, la résurgence, le cycle etla vague de changements anticonstitutionnels de gouvernements», a lancé Bankole Adeoye, commissaire en charge des Affaires politiques, de la paix et de la sécurité de l’organisation panafricaine. Selon lui, l’UA «ne tolérera aucun coup d’État militaire sous quelque forme que ce soit».

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Rappelant que tous les pays ayant connu des putschs ont été suspendus, Adeoye s’est indigné : «à aucun moment dans l’histoire de l’Union africaine nous n’avons eu quatre pays suspendus en douze mois : le Mali, la Guinée, le Soudan et le Burkina Faso». Moussa Faki Mahamat a en ce sensparlé d’une«funeste vague» de coups d’État, soulignant des «liens de causalité connus» avec le terrorisme.

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Suspension du débat sur l’accréditation d’Israël à l’organisation

Cette 35e session ordinaire, qui s’est tenue à Addis-Abeba ce week-end a également été marquée par le débat sur l’accréditation accordée à Israël en juillet dernier afin que l’État hébreu prenne part aux discussions panafricaines. Une accréditation qui a été vivement contestée par le premier ministre palestinien, Mohammed Shtayyeh. Ce dernier a lancé qu’«Israël ne devrait jamais être récompensé pour ses violations et pour le régime d’apartheid qu’il impose au peuple palestinien».

Depuis l’annonce decette décision en juillet dernier par Moussa Faki Mahamat, plusieurs voix au sein même de l’UA se sont levées pour la rejeter.Ainsi, le débat sur ce sujet a été reporté afin d’éviter une scission sans précédent dans l’histoire de l’UA, qui fête ses 20 ans d’existence.

Le président de la Commission de l’UA a assuré que l’engagement de l’organisation panafricaine dans la «quête d’indépendance» des Palestiniens était «immuable et ne peut que continuer à se renforcer». Cependant, pour lui, l’accréditation d’Israël pourrait également constituer «un instrument au service de la paix». Et pour prévenir tout risque de tensions, Mahamat a indiqué qu’un comité va être crééparmi les 55 États membres pour examiner ce sujet controversé.

Opérationnalisation de l’Observatoire africain des migrations au Maroc

Intervenant également lors de ce sommet, le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, a présenté, ce dimanche, le rapport du Roi Mohammed VI sur le suivi de l’opérationnalisation de l’Observatoire africain des migrations au Maroc. Il a expliqué que ce document concerne trois axes principaux. Le premier porte sur le «lourd tribut» que l’Afrique continue à payer, tant en raison de la pandémie que de la migration. Le ministre a ainsi précisé que la crise sanitaire a grandement affecté la migration et n’a pas réduit les flux, mais «les a altérés». Selon lui, la pandémie a aggravé la vulnérabilité des migrants à la traite des personnes, et accentué la précarité des travailleurs migrants. Cependant, poursuitle ministre, cette crise a révélé l’importance des migrants, «autant pour les pays d’accueil que pour les pays d’origine, notamment grâce aux transferts de fonds».

Bourita est également revenu sur les fake news qui circulent sur le phénomène de la migration, notant que les chiffres sur la migration africaine «sont toujours aussi limpides et éloquents». Il a avancé que ce fléau, qui a augmenté de 13% entre 2015 et 2019,touche au premier chef l’Afrique. «La migration africaine ne représente que 14% de la population totale des migrants internationaux, et la plupart des migrants se déplacent à l’intérieur du continent africain et au sein de leur région d’appartenance», a précisé le ministre.

Par ailleurs, le deuxième axe du rapport royal souligne que l’opérationnalisation de l’Observatoire africain revêt une triple dimension, à savoirpour le Maroc, pour l’Afrique et pour la coopération entre le Maroc et l’Afrique. Rappelant que cet observatoire est né de la vision du roi Mohammed VI, le chef de la diplomatie marocaine a souligné que le rapport met en lumièrele rôle de l’Afrique dans la nouvelle gouvernance migratoire voulue par le Pacte de Marrakech. Il a expliqué que l’Observatoire est une déclinaison directe de cepacte, tout en dénonçant le fait que la migration africaine soit «stigmatisée et associée à des conceptions binaires». Et d’ajouter : «nous devons faire en sorte que les migrants ne soient pas les oubliés du développement et des pandémies, mais au contraire le centre de gravité de politiques migratoires responsables, solidaires et conformes aux 23 objectifs du Pacte de Marrakech».

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Quid de la question du Sahara

S’agissant de la question du Sahara, Nasser Bouritas’est dit satisfait de voir que dans les trois rapports dans lesquelsce dossierétait souvent évoqué, «il n’y a eu aucune indication sur la cause nationale». Il a expliqué que cette année aucun des rapports de la Commission africaine sur les droits de l’Homme, du Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de l’UA et sur la situation humanitaire n’a évoqué ce sujet. D’après le ministre, cela indique que la résolution de ce conflit régionalrelève du ressort exclusif de l’ONU. «Quiconque a voulu pousser l’Union africaine vers cette question avait un agenda spécial et voulait réaliser à Addis-Abeba ce qu’il ne pouvait pas faire à New York», a fait remarquer le ministre. Il a ainsi fait référence à la tentative du président du Kenya, Uhura Kenyatta, dont le pays assure actuellement la présidence tournante du CPS,de plaiderles positions du Polisario lors de ce 35e sommet.

En effet, Kenyatta a demandé, le samedi, que le CSP s’acquitte«de son mandat sur le conflit au Sahara occidental, conformément aux dispositions pertinentes de son Protocole et aux décisions pertinentes de la Conférence, en examinant la situation au Sahara occidental, notamment en recevant des informations de la Troïka de l’UA (…) en vue de préparer les conditions d’un nouveau cessez-le-feu et parvenir ensuite à une solution juste et durable au conflit».De plus, le Kenya a même programmé une réunion pour le 16 février avec des ministres des Affaires étrangères sur le Sahara.

En réponse, Nasser Bourita a précisé : «aujourd’hui, une harmonie sera créée entre New York et Addis-Abeba. La même perspective, la même logique. La référence, ce sont les résolutions du Conseil de sécurité. La référence, c’est la voie onusienne. L’Union africaine, comme toute organisation régionale, apporte son soutien et accompagne les efforts déployés par les Nations Unies». Notons qu’en évoquant New York, le ministre fait allusion à l’échec de l’Algérie, de l’Afrique du Sud et du Kenya à imposer leurs positions lors de l’adoption de la résolution 2602.

Lire aussi :« Le Sahara marocain n’est pas à négocier »

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