Mariage des mineurs : les chiffres sont alarmants

Avatar de Khadija Shaqi

Temps de lecture :

Un registre national des mariés bientôt lancéImage d'illustration © DR

A
A
A
A
A

Le mariage des mineurs au Maroc provoque encore l’indignation des militants des droits humains. Le Conseil national des droits de l’Homme a révélé les résultats de son étude sur les justifications judiciaires approuvées pour le mariage des mineurs. Le taux des autorisations accordées par les tribunaux reste élevé. Le point.

Le mariage des mineurs est un fléau à la peau dure. L’article 20 de la Moudawana, permettant aux juges d’autoriser le mariage des moins de 18 ans, continue de susciter des débats nationaux. Les associations et les organisations de défense des droits de l’Homme, particulièrement ceux de l’enfant, appellent à abolir ces textes.

En partenariat avec le Fonds des Nations unies pour la population au Maroc (UNFPA), le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a réalisé une étude sur les justifications judiciaires approuvées pour le mariage des mineurs. Les objectifs de cette étude reposent sur l’analyse des motifs présentés par les juges afin de justifier les autorisations accordées. Elle vise aussi à comprendre le parcours judiciaire des demandes de mariage des enfants et à connaitre les moyens dont disposent les magistrats dans le traitement des dossiers déposés.

Lire aussi : Réforme de la Moudawana : à quoi faut-il s’attendre ?

Les profils des juges

Le mariage précoce continue de sévir dans la société marocaine en raison de l’article 20 du Code de la famille. «Le mariage des filles mineures est passé d’une exception à une règle en raison du taux élevé des autorisations accordées par les tribunaux pour ce type de mariage», indique l’étude. Les motifs présentés pour justifier ces autorisations sont :

  • La prise en considération des mœurs et traditions ;
  • Les liens familiaux avec le mari ;
  • La protection de la fille orpheline ;
  • La déscolarisation des filles ;
  • L’atteinte de l’âge réel du mariage estimé à 16 ans ;
  • La volonté d’éviter le mariage illégal et les relations sexuelles hors mariage ;
  • Les conditions économiques et l’amélioration du niveau de vie ;
  • La maturité des filles et leur capacité à assumer les responsabilités du mariage ;
  • Le mariage de l’enfant violée à son violeur.

D’abord, l’étude s’attarde sur le profil des intervenants, notamment les juges, les magistrats du parquet et les assistants sociaux. Selon les données collectées par le CNDH, les juges chargés de statuer sur les demandes de mariage d’enfants sont majoritairement des hommes (88%). En outre, près de 45% d’entre eux sont âgés de 30 à 45 ans, tandis qu’environ 30% ont entre 45 et 60 ans.

Les données indiquent aussi que 77% de ces magistrats disposent d’un diplôme en droit privé, alors que 24% d’entre eux ont des diplômes en charia (loi islamique).

Lire aussi : Au Maroc, l’écart d’âge entre maris et femmes ne cesse de se creuser

Les indicateurs sur le mariage précoce

S’agissant des audiences du mariage des mineurs dans les tribunaux de première instance, l’étude révèle que 59% des membres de l’échantillon affirment qu’elles se tiennent quotidiennement. En outre, près de 30% évoquent la tenue de deux audiences par semaine, alors que 12% disent qu’il s’agit une audience par semaine. Il convient de souligner que le ministère Public est présent durant les audiences de mariage des moins de 18 ans, selon 59% des membres de l’échantillon.

Aussi, 76% assurent que l’enquête sociale se tient au sein du tribunal, alors que 23% disent qu’elle est réalisée en dehors de ce dernier. Une autre révélation alarmante. D’après 76% de l’échantillon questionné, la présentation d’un certificat médical suffit pour déterminer si l’enfant est apte au mariage. 24% seulement assurent exiger un rapport détaillé.

Enfin, au Maroc, l’âge légal du mariage est fixé à 18 ans. Cependant, le Code de la famille prévoit une dérogation dans son article 20. Le juge peut ainsi autoriser le mariage du garçon et de la fille, avant l’âge de la capacité, «par décision motivée précisant l’intérêt et les motifs justifiant ce mariage, après avoir entendu les parents du mineur ou son représentant légal, et après avoir eu recours à une expertise médicale ou procédé à une enquête sociale».

Dernier articles
Les articles les plus lu
Safi : près de 2,5 tonnes de résine de cannabis saisie

Société : Lors d'une saisie de 60 ballots de Cannabis, la police de Safi a interpellé deux personnes soupçonnées de trafic de stupéfiants.

Mouna Aghlal - 30 juillet 2025
Bab Sebta : la douane a récupéré 4.770 kg de cocaïne

Société : Société - Une femme a été interpellée mardi soir à Bab Sebta. Lors d'une fouille approfondie, 4,770 kg de cocaïne ont été saisis.

Mouna Aghlal - 30 juillet 2025
Corruption : fin de partie pour Mohamed Karimine et Aziz El Badraoui

Société : Mohamed Karimine et Aziz El Badraoui ont été condamnés à 7 et 6 ans de prison pour détournement de fonds publics.

Mouna Aghlal - 29 juillet 2025
Télécoms : forte progression des abonnements au 1er trimestre 2025

Société - Le Maroc franchit un nouveau cap avec près de 57,4 millions d’abonnés à la téléphonie mobile et un taux de pénétration record.

Ilyasse Rhamir - 29 juillet 2025
Nador : alerte après une intoxication collective, les autorités rassurent

Société - À Zaïo, seize personnes ont été hospitalisées après avoir consommé un gâteau contenant des éclats de verre lors d’une fête. Les analyses médicales ont écarté tout risque grave.

Mouna Aghlal - 29 juillet 2025
Ethiopie : le Maroc appelle à la création d’un fonds dédié à la sécurité alimentaire en Afrique

Société - Le ministre Ahmed El Bouari a plaidé pour une transformation durable des systèmes alimentaires, fondée sur l’innovation, la gouvernance inclusive et la coopération Sud-Sud.

Mbaye Gueye - 28 juillet 2025
Voir plus
Travaux : les Casablancais n’en peuvent plus !

Dossier - Des piétons qui traversent d’un trottoir à l’autre, des voitures qui zigzaguent… À croire que les Casablancais vivent dans un jeu vidéo, sans bouton pause.

Sabrina El Faiz - 12 avril 2025
La classe moyenne marocaine existe-t-elle encore ?

Dossier - Au Maroc, pour définir le terme classe moyenne, nous parlons de revenus. Cela ne veut pourtant plus rien dire.

Sabrina El Faiz - 5 juillet 2025
Faux et usage de faux, la dangereuse fabrique de l’illusion

Dossier - Un faux témoignage peut envoyer un innocent en prison ou blanchir un coupable. Un faux diplôme casse la méritocratie. Un faux certificat peut éviter une sentence.

Sabrina El Faiz - 24 mai 2025
Le Maroc des voisins qu’on n’a pas choisis

Dossier - Les voisins ont bien changé. Les balcons étaient les réseaux sociaux d’antan. On y partageait les breaking news du quartier et les hommes étaient aussi bien surveillés que les enfants !

Sabrina El Faiz - 12 juillet 2025
Aïd Al-Adha : amende pour le sacrifice du mouton ? Le vrai du faux

Société - À quelques semaines de Aïd Al-Adha, une rumeur sur une prétendue amende pour le sacrifice du mouton sème le doute chez les Marocains.

Hajar Toufik - 16 mai 2025
IA : avons-nous encore un libre arbitre ?

Dossier - Confiance dans les GPS, les avis en ligne ou des suggestions d'algorithme, nous déléguons notre libre-arbitre à des logiques invisibles.

Sabrina El Faiz - 3 mai 2025

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire