Exportations (image d'illustration) © depositphotos
Le Maroc veut faire de son commerce extérieur un véritable levier de croissance et d’emploi pour les années à venir. Objectifs affichés à l’horizon 2027 : créer 76.000 emplois, générer 84 milliards de DH (MMDH) supplémentaires à l’export et faire émerger 400 nouvelles entreprises exportatrices chaque année. Pour Ahmed El Maghribi, ces ambitions sont réalisables, mais impliquent des choix stratégiques forts et une mise en œuvre cohérente de plusieurs leviers.
Des leviers à activer pour transformer l’ambition en réalité
Alors que l’environnement international demeure instable (entre tensions géopolitiques, inflation persistante et chaînes d’approvisionnement encore fragilisées), le Maroc parvient néanmoins à se démarquer. En 2024, le Royaume a enregistré un record de 47 milliards de dollars d’exportations, contre 42 milliards en 2023. Cette progression remarquable lui permet de conforter sa position de 3ᵉ puissance exportatrice africaine, derrière l’Afrique du Sud et le Nigeria, et de 7ᵉ rang au sein du monde arabe, en dépit de l’absence de ressources pétrolières. Sur le plan mondial, le Maroc grimpe à la 56ᵉ place des pays exportateurs, un classement qui reflète à la fois la diversification croissante de son tissu productif et les effets positifs des politiques industrielles et commerciales engagées ces dernières années.
Fort de cette dynamique, le Maroc entend désormais accélérer la cadence. Mardi 6 mai à Rabat, le chef du gouvernement Aziz Akhannouch a présidé une réunion consacrée à la feuille de route du commerce extérieur pour la période 2025-2027. Cette stratégie fixe des objectifs ambitieux : la création de 76.000 emplois, l’ajout de 84 MMDH aux recettes d’exportation et la naissance de 400 nouvelles entreprises exportatrices chaque année.
Pour relever ce défi, plusieurs leviers structurants doivent être mobilisés, selon l’expert en commerce international Ahmed El maghribi. Le premier consiste à faciliter l’accès des PME marocaines aux marchés internationaux, en leur offrant des dispositifs d’accompagnement ciblés, notamment des formations, un appui logistique adapté, et leur intégration dans les chaînes de valeur mondiales. Le deuxième levier vise à consolider l’existant en renforçant l’appui aux exportateurs déjà actifs, par exemple via un soutien accru à leur participation à des salons internationaux ou à des missions B2B.
En complément, un troisième levier consiste à attirer des investissements étrangers dans des filières industrielles à forte valeur ajoutée, encore peu développées au Maroc, comme l’industrie navale, la fabrication d’équipements lourds ou de trains. Enfin, le quatrième levier repose sur une stratégie de substitution aux importations par la relance d’une production locale compétitive, surtout dans les secteurs du textile, de l’agriculture ou de la pêche. Cette approche permettrait à la fois de réduire le déficit commercial et d’ouvrir de nouvelles perspectives à l’export, notamment sur les marchés africains et régionaux.
Objectifs 2025–2027 : ambitieux, mais pas irréalistes
Ces objectifs peuvent sembler ambitieux. Toutefois, selon l’expert, ils sont «réalisables à condition de mobiliser efficacement les atouts structurels du Royaume et de s’adapter aux mutations actuelles du commerce international».
En effet, le Maroc dispose d’un positionnement géographique stratégique et d’un réseau dense d’accords de libre-échange avec l’Union européenne, les États-Unis, plusieurs pays africains et du monde arabe. Ces accords offrent aux entreprises marocaines un accès préférentiel à des marchés importants.
Sur le plan sectoriel, la campagne agricole demeure un facteur déterminant. Si elle est favorable, elle contribuera fortement à la création d’emplois et aux recettes à l’export. En parallèle, le développement de filières industrielles et l’essor de la formation professionnelle, notamment à travers les «Cités des métiers et des compétences», alimentent un vivier de talents qualifiés pour accompagner les ambitions industrielles à l’export.
«Le chiffre de 84 MMDH d’exportations supplémentaires semble atteignable, d’autant que le Maroc a su réaliser une croissance de 5 milliards de dollars en une seule année. Quant aux 400 nouvelles entreprises exportatrices, leur émergence devra s’accompagner d’une logique de qualité et de durabilité. Leur capacité à s’adapter aux exigences des marchés étrangers, à intégrer les normes internationales et à innover sera déterminante», précise El maghribi.
Freins persistants et opportunités à saisir
Malgré ces avancées, le commerce extérieur souffre encore de plusieurs freins. Le premier est sa forte concentration géographique : la majorité des exportations est destinée à l’Union européenne, principalement l’Espagne, la France et l’Italie. Cette orientation historique, bien que logique, limite la diversification des débouchés.
L’ouverture vers d’autres régions se heurte à plusieurs obstacles : coûts logistiques élevés, forte concurrence internationale, complexité réglementaire… À cela s’ajoute un déficit d’intelligence économique : beaucoup d’entreprises marocaines manquent d’informations fiables sur les marchés de l’Asie, de l’Amérique latine ou de certaines régions africaines. Ce manque d’anticipation freine leur capacité à s’implanter sur ces marchés.
Pour y remédier, Ahmed El maghribi plaide pour le renforcement des dispositifs d’accompagnement, une meilleure circulation de l’information stratégique, et une diplomatie économique plus active, orientée vers la diversification géographique des exportations marocaines.
Une dynamique collective pour une offre exportatrice solide
Concernant l’objectif de création annuelle de 400 entreprises exportatrices, l’expert reconnaît que celui-ci est faisable, mais que «le véritable enjeu réside dans la qualité, la compétitivité et la durabilité de ces structures». Il recommande de favoriser la création de groupes sectoriels ou de fédérations exportatrices capables de mutualiser les ressources, de structurer l’offre et de cibler efficacement les marchés.
Des exemples existent déjà, notamment dans les filières agricoles et textiles. Ces groupements peuvent négocier en bloc, offrir des prix compétitifs, bénéficier d’économies d’échelle, et améliorer les conditions logistiques. Ce modèle renforce non seulement l’attractivité de l’offre marocaine, mais permet aussi une meilleure pénétration des marchés étrangers.
Enfin, pour valoriser le produit marocain à l’international, il est impératif de soutenir la marque «Made in Morocco» par des campagnes ciblées vers de nouvelles régions comme le Moyen-Orient, l’Afrique de l’Est, l’Amérique du Nord ou encore l’Asie. Ces campagnes doivent être appuyées par des incitations concrètes (financement, logistique, promotion) et par la participation renforcée aux salons internationaux.
La qualité des produits marocains, qu’il s’agisse de fruits et légumes, de textile ou de produits artisanaux, est aujourd’hui reconnue. Le défi est donc moins lié à la perception qu’à la compétitivité et à la capacité de se maintenir durablement sur les nouveaux marchés. La construction de réseaux de partenariats solides, l’innovation logistique et l’intelligence économique seront les clés de cette réussite.
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