L’épidémie de Covid-19 et la maladie rénale

Le Sars-Cov-2, virus responsable de la Covid-19 s’attaque à des organes vitaux. Si tous les spécialistes évoquent avant tout les poumons, il n’en demeure pas moins que d’autres organes peuvent également subir ses assauts notamment les reins. Dans cette tribune, le Pr Amal Bourquia, grand nom de la médecine et figure emblématique du don d’organes au Maroc, nous explique comment la Covid-19 peut gravement endommager les reins.

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Tribune

Amal Bourquia

Professeur de néphrologie et néphrologie pédiatrique, experte en éthique, en droit à la santé et en communication médicale, écrivaine et présidente de l’association "REINS"

Temps de lecture : Publié le 10/12/2020 à 14:18
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Le nombre de malades en Insuffisance rénale chronique (IRC) terminale ne cesse d’augmenter et la maladie rénale chronique pose de nombreux problèmes de prises en charge pour les gouvernements en particulier dans les pays à revenus faibles ou moyens. Au Maroc, nous pensons atteindre 50.000 patients qui vont nécessiter une dialyse en 2030, c’est une charge énorme pour les couvertures sociales. Désormais, l’IRC au Maroc est devenu un véritable fléau qui ronge la santé des Marocains avec une avancée galopante. Le pourcentage de patients infectés qui développent une insuffisance rénale aiguë serait de l’ordre de 9%, avec un mauvais pronostic et un risque indépendant de mortalité.



Avec l’avènement de la pandémie de Covid-19, il s’est avéré que les complications les plus courantes associées à la Covid-19 étaient l’atteinte respiratoire, mais aussi l’insuffisance rénale et l’inflammation systémique. Cette atteinte rénale semble être fréquente chez les patients atteints de Covid-19 qui sont symptomatiques et est associée à la mortalité hospitalière et les cliniciens devraient être plus vigilants à l’atteinte rénale chez les patients atteints de Covid-19 sévère. Le pourcentage de patients infectés qui développent une insuffisance rénale aiguë serait de l’ordre de 9%, avec un mauvais pronostic et un risque indépendant de mortalité.



Une vaste étude épidémiologique, menée auprès de plus 70.000 Américains atteints par la Covid-19, conclut que les complications les plus récurrentes à la maladie sont la pneumonie, mais que les patients peuvent aussi développer une insuffisance rénale, une septicémie ou une inflammation systémique. La Covid-19 a donc non seulement des répercussions sur la santé pulmonaire, mais peut aussi gravement endommager les reins et met à mal le système immunitaire. Le mécanisme exact de l’atteinte rénale n’est pas clair, on suggère la septicémie conduisant à un syndrome de tempête de cytokines ou des lésions cellulaires directes dues au virus. Une invasion directe du virus des cellules tubulaires rénales et de l’interstitiel ou des glomérules reste possible. La protéinurie et/ou l’hématurie survient souvent au début ou pendant l’infection, certains patients développent une altération de la fonction rénale.



Une surveillance fréquente et attentive de la fonction rénale chez les patients atteints de Covid-19 peut conduire à un diagnostic précoce des troubles rénaux pour les prendre en charge



À distance, les patients atteints d’insuffisance rénale aiguë doivent avoir un suivi néphrologique, car le risque que ces patients développent une maladie rénale chronique est élevé. Mais étant donné l’implication des reins lors d’une infection à coronavirus, nous devons également surveiller les patients qui n’ont pas développé d’atteinte aiguë de la fonction rénale, mais ont une de protéinurie et/ou d’hématurie. Une surveillance fréquente et attentive de la fonction rénale chez les patients atteints de Covid-19 peut conduire à un diagnostic précoce des troubles rénaux pour les prendre en charge et essayer d’éviter l’évolution vers une maladie rénale chronique. La hantise est que certaines personnes atteintes de maladies rénales chroniques puissent connaître une aggravation et que certaines personnes qui n’avaient pas auparavant d’atteinte rénale chronique puissent en développer une.



Sur le plan mondial, les spécialistes en néphrologie craignent une flambée de la pathologie rénale chronique en post-Covid-19 même si les effets à long terme de la Covid-19 sur les reins sont encore inconnus. La hantise est que certaines personnes atteintes de maladies rénales chroniques puissent connaître une aggravation et que certaines personnes qui n’avaient pas auparavant d’atteinte rénale chronique puissent en développer une. Cependant, il ne s’est pas écoulé suffisamment de temps pour étudier ces effets et des recherches supplémentaires sont nécessaires.



Mieux comprendre l’ensemble des affections associées au nouveau coronavirus peut aider à établir un pronostic, guider les décisions de traitement et mieux informer les patients quant à leurs risques réels pour les diverses complications.


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