Sahara : Guterres appelle à un changement de cap

Avatar de Hajar Toufik
Temps de lecture :

Sahara : Guterres appelle à un changement de capAntonio Guterres, secrétaire général de l'ONU © MAXIM SHEMETOV / POOL / AFP

A
A
A
A
A

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, tire la sonnette d’alarme sur la situation au Sahara, jugée « alarmante et intenable ». Face aux tensions persistantes, il appelle les parties à un changement de cap immédiat pour éviter toute escalade.

Le rapport présenté récemment par le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, sur le Sahara, couvrant la période du 1er juillet 2024 au 30 juin 2025 vient d’être publié. Le document met en lumière une situation dégradée, marquée par des tensions persistantes entre le Maroc et le Polisario et un contexte humanitaire de plus en plus préoccupant. Guterres avertit que les risques d’escalade sont réels et que la situation est devenue alarmante et intenable, appelant toutes les parties à renverser la tendance sans délai.

Pour l’analyste politique et économique Driss Aissaoui, ce rapport traduit avant tout un devoir d’inquiétude. « Le conflit a été créé de manière artificielle par l’Algérie et la Libye, en soutenant le Polisario et en lui attribuant une entité, la prétendue République sahraouie, au niveau africain », souligne-t-il. Selon lui, Guterres veut frapper les esprits en décrivant une situation qui nécessite une action immédiate pour éviter une escalade. L’ONU exhorte ainsi le Maroc, le Polisario, l’Algérie et la Mauritanie à changer de cap et à relancer un processus politique sérieux, constructif et négocié.

Lire aussi : Fête du Trône: Donald Trump réaffirme la reconnaissance des États-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara 

Des tensions persistantes et un contexte humanitaire préoccupant

Sur le terrain, la situation reste fragile. Les incidents signalés par la MINURSO sont concentrés dans le nord du territoire, près de Mahbas, et à l’est du mur de sable, avec des tirs de roquettes et d’artillerie ayant rarement provoqué de victimes. La mission onusienne a poursuivi ses opérations de déminage, sécurisant plus d’un million de mètres carrés et neutralisant 335 engins explosifs.

Mais la mission de paix fait face à des contraintes logistiques et à des restrictions imposées par le Polisario pour le déploiement de convois, ce qui complique la sécurité et la mobilité des observateurs. Sur le plan humanitaire, la situation est critique : la réduction du financement des séquestrés sahraouis dans les camps de Tindouf a entraîné une détérioration de l’accès à l’alimentation, à l’eau, aux soins et à l’éducation. La malnutrition aiguë touche près de 13% des enfants et le retard de croissance dépasse les 30%. Les ONG et agences de l’ONU peinent à maintenir un niveau d’aide suffisant, malgré les efforts du gouvernement algérien pour compenser les coupes budgétaires.

Le rapport note également un recul de l’espace civique. Les Sahraouis voient leur droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique restreint dans les camps de Tindouf. Des manifestations pacifiques sont régulièrement réprimées, et des défenseuses des droits humains subissent une pression particulière. Pour Driss Aissaoui, cette situation souligne l’importance d’un dialogue constant et transparent entre les Nations Unies, le Maroc et les autres parties. « Le rapport confirme le rôle central et impartial de l’envoyé spécial, Staffan de Mistura, et du chef de la MINURSO, Alexandre Ivanko, malgré les critiques adressées à leur impartialité », explique-t-il.

Lire aussi : Il y a 50 ans, Houari Boumédiène reconnaissait la marocanité du Sahara

Guterres plaide pour une solution politique urgente

Le rapport réaffirme d’ailleurs que seule une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable peut mettre fin à ce conflit qui dure depuis plus de cinquante ans. Les efforts diplomatiques se poursuivent : l’envoyé spécial a engagé des consultations régulières avec le Maroc, le Polisario, l’Algérie et la Mauritanie, ainsi qu’avec des acteurs internationaux tels que le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne et les États-Unis.

Pour Driss Aissaoui, l’importance de ces consultations ne doit pas être sous-estimée : « L’ONU reste le médiateur central. Il est crucial que toutes les parties s’engagent dans un dialogue direct et sincère pour restaurer la confiance et avancer vers une solution durable ». Il rappelle également que le Maroc continue de faire fonctionner tous les mécanismes démocratiques locaux, impliquant pleinement les populations sahraouies, ce qui constitue un élément clé de stabilité dans le processus politique.

Le rapport dresse aussi une vérité que beaucoup tentent d’ignorer : malgré cinquante années de conflit, une sortie négociée est encore possible, mais elle dépendra de la capacité des parties à dialoguer, à faire preuve de flexibilité et à respecter les droits fondamentaux. Et pour Driss Aissaoui, cette question n’est pas seulement politique : « La communauté internationale doit comprendre que chaque jour de retard, chaque tension supplémentaire sur le terrain, alimente une situation qui pourrait devenir incontrôlable. Le Sahara est un thermomètre pour la stabilité de toute la région », conclut l’expert.

Dans ce contexte, le rapport de l’ONU agit moins comme un simple constat que comme un signal d’alarme adressé à la communauté internationale, rappelant que le conflit n’est pas figé et que la paix demeure possible… à condition que toutes les parties acceptent enfin de changer de cap et de s’engager dans un dialogue concret.

Dernier articles
Les articles les plus lu
Conseil de gouvernement : l’agenda de la réunion de jeudi dévoilé

Politique - Jeudi, le Conseil de gouvernement présidé par Aziz Akhannouch examinera plusieurs dossiers majeurs, dont la réforme de l’enseignement supérieur et des décrets fiscaux.

Ilyasse Rhamir - 25 août 2025
Le roi Mohammed VI adresse un message à l’Institut de Droit International

Politique - À Rabat, la 82ᵉ session de l’Institut de Droit International s’ouvre avec un message du roi Mohammed VI appelant à renforcer la résilience du droit face aux crises mondiales.

Ilyasse Rhamir - 24 août 2025
Grâce Royale au profit de 591 personnes à l’occasion de la Fête de la Jeunesse

Politique - À l’occasion de la Fête de la Jeunesse, le roi Mohammed VI a accordé sa Grâce Royale à 591 personnes condamnées.

Ilyasse Rhamir - 20 août 2025
Grâce Royale : 881 bénéficiaires à l’occasion de l’Anniversaire la Révolution du Roi et du Peuple

Politique - À l’occasion de la Révolution du Roi et du Peuple, le Souverain a accordé sa grâce à 881 personnes, détenues ou en liberté.

Ilyasse Rhamir - 19 août 2025
Santé : le ministère fixe un ultimatum aux médecins absents

Le ministère de la Santé fixe au 15 septembre la date limite pour les médecins spécialistes 2023-2024 n’ayant pas rejoint leurs postes.

Mouna Aghlal - 19 août 2025
Le roi Mohammed VI ordonne l’envoi d’une aide humanitaire à Gaza

Politique - En signe de solidarité, le roi Mohammed VI a ordonné l’envoi de 100 tonnes de denrées et de médicaments vers Gaza.

Ilyasse Rhamir - 18 août 2025
Voir plus
Sahara : 4 ans pour tout régler ?

Dossier - Le Maroc peut maintenant demander plus : sortir le dossier du Sahara de la quatrième commission de l'ONU, inscrire le Polisario comme organisation terroriste…

Sabrina El Faiz - 25 janvier 2025
Fête du Trône : le Roi adresse un discours à la Nation

Le roi Mohammed VI a adressé, mardi, un discours au peuple marocain à l’occasion du 26e anniversaire de son accession au Trône. Voici le texte…

Rédaction LeBrief - 29 juillet 2025
Parlement : la diplomatie de l’ombre

Dossier - À l’instar d’un pur-sang arabe, le Parlement avance toujours, rectifiant ses virages au besoin. Immersion dans un univers parallèle.

Sabrina El Faiz - 28 décembre 2024
Le Roi préside à Rabat un Conseil des ministres

Politique - Le roi Mohammed VI a présidé un Conseil des ministres à Rabat, validant des réformes importantes, des nominations stratégiques et des conventions renforçant la coopération internationale.

Hajar Toufik - 12 mai 2025
Sahara : pourquoi le Maroc doit agir avant la fin du mandat de Trump ?

Politique - Pour le Sahara, l'heure n'est plus à la négociation, le contexte international offre une fenêtre d'opportunité inédite. Interview avec Pr. Nabil Adel.

Sabrina El Faiz - 24 avril 2025
Pas de place pour un Maroc à deux vitesses : décryptage du discours royal

Politique : A l’occasion de la Fête du Trône, le discours royal s’est concentré sur les priorités du Maroc. Driss Aissaoui en analyse les messages phares.

Sabrina El Faiz - 30 juillet 2025

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire