Sahara : comment Rabat transforme la stabilité en puissance régionale ?
Drapeau du Maroc © DR
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Depuis plus de trois décennies, le dossier du Sahara occupe une place centrale dans la diplomatie régionale et internationale. En octobre, le Conseil de sécurité des Nations unies devra se prononcer sur le renouvellement du mandat de la MINURSO, mission onusienne créée en 1991 pour surveiller le cessez-le-feu. Mais si la MINURSO joue un rôle d’observateur, c’est Rabat qui trace la voie de la stabilité et du développement dans ses provinces du Sud.
Selon Cherkaoui Roudani, spécialiste en géopolitique, le Maroc ne se contente pas de maintenir la paix : il façonne un nouvel ordre stratégique. Entre diplomatie discrète, investissements massifs et construction d’un projet d’autonomie, le Royaume cherche à transformer un conflit figé en une opportunité de leadership régional.
MINURSO : une stabilité observée, pas créée
Roudani souligne une réalité rarement explicitée : « la MINURSO n’a pas créé la stabilité, elle en bénéficie. Et cette stabilité, elle porte une signature, celle du Maroc ».
Depuis 1991, affirme-t-il, la discipline des Forces Armées Royales et la coopération des autorités locales ont assuré un environnement sûr, malgré l’absence d’une solution politique. La mission onusienne, poursuit-il, reste un instrument limité : « elle observe, elle ne règle rien ». En revanche, Rabat agit concrètement, investissant dans les infrastructures et intégrant le Sahara dans des projets d’envergure régionale.
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Cette dynamique s’inscrit dans une logique stratégique : pour le Maroc, la paix passe par le développement et la transformation du territoire, et non par une simple surveillance du cessez-le-feu. Ce positionnement marque une différence fondamentale avec d’autres approches : « Si la MINURSO maintient un cessez-le-feu, le Maroc, lui, maintient la paix et développe », résume Roudani.
Une diplomatie discrète mais déterminée
Sur le plan politique, Staffan de Mistura, envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU, multiplie les démarches diplomatiques. Alger, Rabat, Laâyoune et Tindouf figurent désormais au cœur de ses déplacements.
Selon Roudani, cette dynamique « avance à bas bruit, mais dans le sens du Maroc ». Les dernières résolutions du Conseil de sécurité, dit-il, font résonner le lexique du réalisme, du pragmatisme et de la durabilité, principes au cœur du plan d’autonomie marocain.
Le processus est lent, admet-il, « car les P5 ne sont pas encore alignés ». Mais, insiste-t-il, « le Maroc a déjà gagné la bataille des idées ». La diplomatie marocaine s’appuie sur une vision claire : transformer le conflit en un dialogue régional où le Maroc est un pilier incontournable, en lien direct avec les enjeux atlantiques, sahéliens et méditerranéens.
Le soutien international : un tournant géopolitique
Le plan d’autonomie marocain bénéficie aujourd’hui d’un appui croissant. Pour Roudani, il ne s’agit plus d’un simple choix diplomatique, mais d’une « recomposition doctrinale du système international ».
Depuis la résolution 1754 en 2007, explique-t-il, le Conseil de sécurité a ancré le dossier dans une approche fondée sur le réalisme. Les grandes puissances (États-Unis, France, Royaume-Uni) reconnaissent le plan marocain comme « la seule base sérieuse et crédible de règlement ».
Plus largement, ce soutien traduit une logique stratégique : le Maroc se positionne comme un État-pivot entre Atlantique, Sahel et Méditerranée. Ses projets portuaires, énergétiques et logistiques transforment les provinces du Sud en plateforme d’intégration régionale. Roudani conclut : « le plan d’autonomie devient un instrument de gouvernance régionale, un modèle de co-souveraineté et un cadre fonctionnel d’équilibre dans le système international contemporain ».
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Algérie : l’obstacle idéologique
La position algérienne reste, selon l’expert, un facteur central dans la dynamique du dossier. « L’Algérie n’est pas un observateur du conflit, elle en est un acteur direct », rappelle Roudani. Son refus de s’engager pleinement dans le processus bloque la possibilité d’avancer vers un accord.
Pendant que le Maroc construit, Alger, dit-il, « s’enferme dans la nostalgie des slogans ». Dans un contexte où la géopolitique évolue vers la fonctionnalité et l’interconnexion, cette position est, selon lui, un facteur d’isolement.
Pour Roudani, le Maroc a aujourd’hui une longueur d’avance : « il connecte, il intègre, il stabilise. L’Algérie, elle, reste figée dans une stratégie de blocage ». Le nouveau rapport de forces régional ne se joue plus uniquement sur le terrain diplomatique, mais sur celui de la construction stratégique.
Stabilité et sécurité : un équilibre dynamique
Sur le plan sécuritaire, le Sahara ne connaît pas de guerre, mais un ordre dissuasif maîtrisé. Roudani décrit une stratégie proactive : « le Maroc déploie une sécurité combinant dissuasion militaire et résilience territoriale ».
Au-delà du mur de défense, les tensions sont plus symboliques que stratégiques. Selon lui, « le Polisario agit dans le registre symbolique, sans profondeur stratégique ». L’Algérie, fragilisée sur ses marges sahéliennes, n’a ni la légitimité ni les capacités d’ouvrir un nouveau front.
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Dans ce cadre, le statu quo n’est pas un immobilisme, mais « un équilibre stratégique dynamique », où la sécurité devient un levier de développement. Les provinces du Sud sont ainsi transformées en interfaces de stabilité et de prospérité. Roudani conclut : « Rabat impose une vision avant-gardiste : sécuriser sans militariser, stabiliser en construisant ».
Alors que le Conseil de sécurité s’apprête à décider du futur de la MINURSO, la vision marocaine s’impose comme une alternative crédible à une impasse prolongée. Entre diplomatie, investissement et intégration régionale, le Royaume affirme sa capacité à transformer un conflit gelé en un levier stratégique pour la paix et la prospérité.
Selon Cherkaoui Roudani, ce n’est pas seulement une question de politique nationale : c’est une recomposition géopolitique majeure. Le Sahara, loin d’être une zone figée, devient aujourd’hui un espace central dans l’équilibre régional, un modèle d’ordre fonctionnel et un projet qui dépasse la simple résolution d’un conflit.
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