Article 507 : polémique sur une loi ancienne devenue controversée

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Kénitra : 17 personnes déférées devant la justice après les violences à Sidi TaibiJustice © DR

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L’article 507 du Code pénal marocain suscite une vive polémique, beaucoup croyant à tort qu’il s’agit d’une nouvelle disposition. Éclaircissements avec Maître Kamri Ilias, avocat à Marrakech.

Depuis quelques semaines, l’article 507 du Code pénal est au cœur des discussions sur les réseaux sociaux. De nombreux internautes s’interrogent et débattent vivement autour de cette disposition légale, suite à plusieurs condamnations récentes pour vol avec arme. Ces affaires ont provoqué une onde de choc, notamment parce que certaines peines prononcées ont atteint jusqu’à 10 ans de prison.

Beaucoup de parents et de familles concernées estiment que ces peines sont excessivement lourdes, surtout lorsque les vols n’ont pas été accompagnés de violences physiques graves. Sur les plateformes sociales, des appels à la clémence et à la révision de certaines condamnations se multiplient, alimentant un débat plus large sur l’application de l’article 507 et sur l’équilibre à trouver entre la sévérité de la loi et la prise en compte des circonstances individuelles de chaque affaire.

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Que dit l’article 507 ?

L’article 507 du Code pénal prévoit des peines de réclusion perpétuelle pour les individus coupables de vol en présence d’une arme. Cet article n’est pas une nouveauté, il existe depuis longtemps et reflète l’engagement du législateur marocain à lutter contre la criminalité violente.

Dans cet article, il est précisé que toute personne impliquée dans un vol, et qui est en possession d’une arme, qu’elle soit visible ou dissimulée, sera condamnée à la réclusion perpétuelle. Il en va de même pour les auteurs de vols qui utilisent un véhicule motorisé pour se rendre sur les lieux du crime ou pour fuir après avoir commis l’infraction, tant que l’arme est présente dans le véhicule.

L’une des particularités de cet article est sa relation avec la réclusion perpétuelle, une peine lourde qui n’est généralement infligée qu’en cas de crimes particulièrement graves. Le Code pénal marocain distingue entre différents types d’infractions, allant des contraventions et délits de police aux crimes. Les infractions sont classées en fonction de leur gravité et de leurs conséquences.

Par ailleurs, le vol, en tant qu’infraction, est un acte criminel qui consiste à soustraire à autrui une chose de valeur sans son consentement, avec l’intention de la conserver. Cependant, lorsqu’il est commis avec une arme, le vol prend une tournure plus grave. En effet, l’ajout de l’élément d’une arme, qu’elle soit apparente ou cachée, change la nature du crime, en l’aggravant. Une arme peut être utilisée pour menacer la victime, pour commettre un acte violent ou pour assurer la fuite des auteurs du crime. Dans tous ces cas, le danger pour la société et la victime est multiplié.

L’article 507 traite de cette situation particulière, en élevant la sanction à la réclusion perpétuelle pour dissuader les auteurs potentiels de tels actes et protéger les citoyens contre ce type de criminalité violente.

Une disposition qui existe depuis toujours

L’article 507, loin d’être une nouveauté, a été introduit pour répondre à une réalité sociale et criminelle en constante évolution. La présence d’armes dans les crimes de vol est un phénomène bien établi et l’arsenal juridique marocain a dû s’adapter pour punir sévèrement ces actes.

Comme le souligne Maître Kamri Ilias, avocat à Marrakech, il existe une hiérarchie dans le système judiciaire marocain pour classer les infractions. Le Code pénal distingue les délits de police, qui sont punis de peines d’emprisonnement allant de 1 mois à 2 ans, et les délits correctionnels, qui sont passibles de peines de prison de 1 à 5 ans. Ces délits sont généralement moins graves et sont liés à des comportements antisociaux moins violents.

Cependant, lorsqu’un vol est commis avec une arme, comme précisé dans l’article 507, la nature de l’infraction change. Ce n’est plus un simple délit, mais un véritable crime. La peine encourue pour un tel acte peut aller jusqu’à la réclusion perpétuelle, c’est-à-dire une peine de prison à vie. Cette mesure vise à protéger les citoyens contre ceux qui, armés, commettent des actes de violence pour s’emparer de biens d’autrui.

L’élément déclencheur pour que l’article 507 du Code pénal s’applique est la présence d’une arme. Le Code pénal marocain, dans son article 303, précise les objets considérés comme des armes, qu’elles soient visibles ou cachées. Ainsi, un individu qui commet un vol en portant une arme, ou en ayant une arme dans un véhicule utilisé pour se rendre sur le lieu de l’infraction ou pour fuir après l’acte, sera considéré comme ayant commis un crime particulièrement grave, passible de réclusion perpétuelle.

Cette mesure vise à rendre plus sévères les peines pour les auteurs de vols violents, car la possession d’une arme dans le cadre d’un vol aggrave indéniablement la situation. L’arme introduit un facteur de danger supplémentaire, et les autorités judiciaires considèrent qu’elle justifie une sanction maximale.

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Quand l’article 507 frappe les tribunes de football

Ces derniers mois, l’application de l’article 507 a également touché le monde du football. Des affrontements violents ont éclaté entre groupes de supporters, dégénérant parfois en scènes de grande violence.

Dans ce contexte, certains individus ont profité de la confusion pour commettre des actes de vol, souvent en possession d’armes blanches ou d’objets pouvant être considérés comme des armes au regard de la loi.

C’est précisément dans ces situations que l’article 507 est invoqué par les autorités judiciaires. Lorsque des supporters sont interpellés pour vol avec port d’arme, même si l’arme n’a pas été utilisée de manière manifeste, la loi prévoit des peines très lourdes.

Face à cette sévérité, les groupes ultras des deux grands clubs casablancais, le Raja et le Wydad, ont réagi à travers un communiqué conjoint. Ils dénoncent ce qu’ils considèrent comme des condamnations disproportionnées et appellent à une application plus équilibrée de la loi. Selon eux, s’il est nécessaire de sanctionner les actes délictueux, il est tout aussi important de ne pas assimiler tous les supporters à des criminels violents, et d’individualiser les peines en tenant compte du contexte et des faits réels reprochés à chacun.

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