14-24 janvier 1943 : la Conférence d’Anfa
Conférence d’Anfa à Casablanca. Aucun de ces mots n’est anodin. Et les nouvelles générations de Casablancais pourraient l’oublier, mais leur ville a été, de nombreuses fois, scène du théâtre international. Particulièrement à date du 14 au 24 janvier 1943, à l’hôtel Anfa.
Autour de la table se retrouvaient Franklin Delano Roosevelt, président des États-Unis, Winston Churchill, Premier ministre britannique et le général Charles de Gaulle, chef de la France libre, ainsi que des responsables militaires et diplomatiques. Bien que le conflit mondial pèse sur eux, l’ambiance est pleine d’espoir. Ces leaders se sont réunis pour établir les fondations d’un nouvel ordre mondial.
Casablanca, point central de l’Histoire
Pourquoi Casablanca ? C’est une question que l’on se pose encore. Éloignée des zones de conflit et des capitales en crise, cette ville marocaine, alors sous contrôle français, offrait un lieu sûr pour se rassembler. Sa localisation, à la croisée de l’Europe, de l’Afrique et de l’Atlantique, en faisait un endroit parfait pour des réunions discrètes, mais de grande importance.
L’hôtel Anfa, établissement luxueux en hauteur, fut le cadre de ces discussions. Même s’il n’existe plus aujourd’hui, il reste ancré dans la mémoire comme un témoin de ce moment unique. Pendant dix jours, cet endroit fut le centre des décisions qui allaient influencer l’Histoire.
La Conférence d’Anfa, bien qu’organisée discrètement, avait des objectifs clairs. La priorité était de coordonner les efforts militaires des Alliés. À ce moment de la guerre, l’Allemagne nazie contrôlait une grande partie de l’Europe et les Alliés planifiaient une invasion pour inverser cette tendance.
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Roosevelt et Churchill, principaux instigateurs de la rencontre, décidèrent de lancer l’opération Husky, qui visait l’invasion de la Sicile, puis de l’Italie. Ce fut également l’occasion d’affirmer la nécessité d’une capitulation inconditionnelle des puissances de l’Axe pour empêcher un retour de l’Allemagne après la guerre.
Mais la Conférence d’Anfa ne se concentra pas seulement sur les questions militaires. Le futur des colonies et des relations internationales fut discuté, notamment l’indépendance des nations sous domination européenne.
L’ombre de la souveraineté marocaine
Au milieu de ces discussions stratégiques, le Maroc, hôte involontaire, attirerait les regards. Le sultan Mohammed V, figure de la résistance culturelle, rencontra Roosevelt et Churchill durant cette conférence. Cet échange, bien que bref, était très symbolique.
Roosevelt, défenseur des droits des peuples, aurait exprimé son soutien à l’indépendance du Maroc. Bien que cette promesse ne se réalisât que plus tard, en 1956, elle représenta un espoir pour un peuple sous contrôle français. Pour le sultan Mohammed V, ce moment marqua le début d’une alliance implicite avec les États-Unis, renforçant sa position face à l’autorité coloniale.
Un autre moment mémorable de la Conférence d’Anfa fut la confrontation entre le général de Gaulle et le général Giraud. Ces deux figures de la résistance française, avec des visions opposées, symbolisaient les tensions au sein de la France pendant la guerre.
De Gaulle, représentant la France libre, voyait en Giraud, soutenu par les Américains, un concurrent illégitime. Giraud, quant à lui, était perçu comme trop proche du régime de Vichy. Les échanges furent marqués par des conflits personnels et des différences d’opinion, mais Churchill et Roosevelt essayèrent de rassembler les deux hommes. Finalement, cette réunion a aidé à établir De Gaulle comme le chef reconnu de la France libre, même si les tensions demeuraient.
Casablanca, lieu d’un nouvel ordre mondial
Un des points les plus importants de cette réunion fut la vision du monde d’après-guerre que les participants ont esquissée. Roosevelt et Churchill s’accordèrent sur les principes de la Charte de l’Atlantique, un document essentiel qui annonçait la création des Nations Unies.
Dans cette charte, les droits des nations à choisir leur propre destin furent confirmés, tout comme l’importance de travailler ensemble pour maintenir la paix. C’était un message fort pour le monde, rappelant que la victoire ne devait pas seulement se gagner sur les champs de bataille, mais aussi dans les esprits des gens.
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Aujourd’hui, quatre-vingt-deux ans après cette réunion, Casablanca est toujours influencée par cet événement. La Conférence d’Anfa symbolise l’essor du Maroc sur le plan international.
Pour le Maroc, cette réunion a été le début de revendications plus fortes pour l’indépendance. Elle a également renforcé les liens avec les États-Unis, qui deviendront un allié de taille dans les années suivantes.
Je pense que la villa d’Anfa et non l’hôtel existe toujours : c’est celle dont le terrain est attenant à la résidence du wali de casa actuellement sur le boulevard Francolin Roosevelt .