Ministre et maire : un cumul qui divise

Avatar de J.R.Y
Temps de lecture :

Aziz Akhannouch, Abdellatif Ouahbi, Fatima-Zahra Mansouri, Nadia Rmili

A
A
A
A
A

C’est une situation qui n’a en soi rien d’illégal. Le Chef du gouvernement et trois des membres du nouveau cabinet ont été élus présidents de Conseils communaux bien avant la formation du gouvernement. Si la loi ne considère pas les deux fonctions comme incompatibles, certaines voix s’élèvent pour demander aux membres de l’exécutif de démissionner des mairies parce qu’ils ne pourront pas consacrer le temps nécessaire à la gestion des affaires locales.

Avant sa désignation par le roi Mohammed VI en tant que Chef du gouvernement le 10 septembre dernier, Aziz Akhannouch avait décroché son siège d’élu au Conseil communal d’Agadir. Après sa nomination, il franchira un pas de plus pour asseoir sa légitimité populaire au niveau de la capitale du Souss en présentant sa candidature pour présider la mairie d’Agadir. Il sera élu président du Conseil communal d’Agadir le 24 septembre.

Trois autres membres de son gouvernement sont également maires de trois villes. Dans le Souss toujours, Abdellatif Ouahbi, ministre de la Justice, a été élu président du Conseil communal de Taroudant. Première femme maire élue à Marrakech en 2009, Fatima-Zahra Mansouri, ministre de l’Aménagement du territoire national, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la ville, a décroché une nouvelle fois la présidence du Conseil de la ville ocre. Et enfin, NabilaRmili, ministre de la Santé et de la Protection sociale, a été portée à la présidence du Conseil de la ville de Casablanca, une première pour la métropole qui n’a jamais connu de femme maire.

Lire aussi :Gouvernement : l’identité des ministres dévoilée

Les cas d’incompatibilité

Le non-cumul des mandats avait suscité de vifs débats au sein de l’Hémicycle lors de l’examen des lois électorales au mois au mois de mars dernier. Mais rien n’a été prévu pour le cas des ministres. En effet, la loi organique n° 04-21 modifiant et complétant la loi organique n°27-11, relative à la Chambre des représentants, a apporté d’importants amendements portant principalement sur la délimitation des cas d’incompatibilités du mandat de député. Tout membre de la Chambre des représentants ne peut présider en même temps un Conseil de région, un Conseil préfectoral ou de commune dont la population dépasse les 300.000 habitants.

Le législateur a estimé qu’il existe des contraintes liées à l’exercice de plusieurs mandats à la fois, notamment pour les députés qui présidaient les Conseils des grandes villes. Une décision saluée par les principaux partis politiques et les décideurs locaux. Le cas de l’ex-maire de Casablanca, Abdelaziz El Omari, avait suscité bien des critiques quand il faisait des allers-retours en train pour prendre part aux activités de la 1re Chambre aux dépens de la gestion de dossiers urgents au niveau de la métropole.

Lire aussi :La RNIiste Nabila Rmili élue maire de Casablanca

Pour ce qui est des ministres, il faut se référer à la loi organique 65-13 relative à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et au statut de ses membres. Cette loi précise que le choix de faire partie du gouvernement suppose l’abandon de plusieurs fonctions légalement incompatibles avec le statut de membre de l’exécutif. Il s’agit de la qualité de membre de l’une des deux Chambres du Parlement, la fonction de responsable d’établissement public ou d’entreprise publique, la présidence d’un Conseil de région, la présidence de plus d’une chambre professionnelle, ou la présidence de plus d’un conseil communal, préfectoral, provincial ou d’arrondissement. Partant de là, ni le Chef du gouvernement ni les trois ministres ne sont dans un cas d’incompatibilité.

Lire aussi :Gouvernement : quelles sont ses attributions ?

Non-cumul des mandats pour plus d’efficacité

Depuis la nomination du gouvernement Akhannouch, l’opinion publique locale à Taroudant, Agadir, Marrakech et surtout Casablanca est très préoccupée par la question du cumul de mandats. Plusieurs acteurs associatifs ont adressé des courriers aux ministres concernés, les appelant à démissionner des présidences des Conseils communaux pour se consacrer aux affaires gouvernementales, en raison de la difficulté de les concilier avec la gestion des villes et surtout des grandes villes comme Casablanca qui nécessite un engagement à temps plein. À cet égard, une campagne a été lancée sur les réseaux sociaux, intitulée « Casablanca que nous voulons ».

Plusieurs élus locaux, qu’ils soient de gauche ou de droite, ont assuré qu’il n’est pas possible de diriger une commune « à distance » en parallèle avec la fonction de ministre, qualifiant cela d’absurde. Ils ont également appelé les ministres concernés à présenter leurs démissions de la présidence des Conseils communaux. Quelques rares voix ont défendu ce cumul de fonctions par le fait que ces maires, qui sont membres du gouvernement, porteront les dossiers de leurs villes en haut lieu et pourront débloquer certaines situations.

Enfin, une remarque intéressante qui mérite d’être soulignée, celle du journalisteMohamed Ouamoussi. Ce dernier a écrit dans un post sur Facebook: «la combinaison de deux postes signifie que Aziz Akhannouch, Chef du gouvernement, en sa qualité de maire d’Agadir, est pratiquement sous la tutelle de son ministre de l’Intérieur». À méditer.

Dernier articles
Les articles les plus lu
Dialogue social : le ministère de l’Éducation et les syndicats font le point

Politique - Le ministère de l’Éducation nationale et les syndicats ont examiné l’avancement des réformes, annonçant de nouvelles mesures pour la rentrée 2025 et réaffirmant leur engagement au dialogue social.

Hajar Toufik - 9 août 2025
Le Maroc réaffirme son soutien aux pays en développement sans littoral

Politique - Lors de la conférence d’Awaza, Omar Hilale a réaffirmé l’engagement du Maroc envers les pays en développement sans littoral.

Mbaye Gueye - 7 août 2025
Code de procédure civile : la Cour constitutionnelle invalide plusieurs articles

Politique - Coup d’arrêt pour la réforme de la procédure civile : la Cour constitutionnelle rejette quelques articles, invoquant des atteintes aux principes fondamentaux du droit.

Hajar Toufik - 6 août 2025
Le Maroc élu vice-président de la conférence de l’ONU sur les pays sans littoral

Politique - Le Maroc a été élu vice-président de la conférence onusienne sur les pays sans littoral, renforçant son engagement en faveur de la coopération Sud-Sud.

Hajar Toufik - 5 août 2025
Éducation : Berrada reçoit les syndicats ce mercredi

Politique - Face à la grogne persistante dans l’éducation, le ministère réunit les syndicats ce mercredi pour tenter d’éviter une rentrée scolaire marquée par de nouvelles tensions.

Hajar Toufik - 5 août 2025
Algérie : un pays trop grand pour s’effondrer, trop fragile pour durer

L’effondrement de l’Algérie, s’il devait survenir, ne s’arrêterait pas à ses frontières. C’est une onde de choc géopolitique, sécuritaire et migratoire qui menacerait toute la région.

Rédaction LeBrief - 5 août 2025
Voir plus
Sahara : 4 ans pour tout régler ?

Dossier - Le Maroc peut maintenant demander plus : sortir le dossier du Sahara de la quatrième commission de l'ONU, inscrire le Polisario comme organisation terroriste…

Sabrina El Faiz - 25 janvier 2025
Fête du Trône : le Roi adresse un discours à la Nation

Le roi Mohammed VI a adressé, mardi, un discours au peuple marocain à l’occasion du 26e anniversaire de son accession au Trône. Voici le texte…

Rédaction LeBrief - 29 juillet 2025
Parlement : la diplomatie de l’ombre

Dossier - À l’instar d’un pur-sang arabe, le Parlement avance toujours, rectifiant ses virages au besoin. Immersion dans un univers parallèle.

Sabrina El Faiz - 28 décembre 2024
Le Roi préside à Rabat un Conseil des ministres

Politique - Le roi Mohammed VI a présidé un Conseil des ministres à Rabat, validant des réformes importantes, des nominations stratégiques et des conventions renforçant la coopération internationale.

Hajar Toufik - 12 mai 2025
Sahara : pourquoi le Maroc doit agir avant la fin du mandat de Trump ?

Politique - Pour le Sahara, l'heure n'est plus à la négociation, le contexte international offre une fenêtre d'opportunité inédite. Interview avec Pr. Nabil Adel.

Sabrina El Faiz - 24 avril 2025
Pas de place pour un Maroc à deux vitesses : décryptage du discours royal

Politique : A l’occasion de la Fête du Trône, le discours royal s’est concentré sur les priorités du Maroc. Driss Aissaoui en analyse les messages phares.

Sabrina El Faiz - 30 juillet 2025

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire