Les fameux couscoussiers des vilains

Akram Louiz, chercheur et auteur du roman « L’affranchissement » et du recueil poétique « Trente fleurs », se penche dans cette tribune sur le processus toxique de transformation du cannabis et de sa vente illégale.

Temps de lecture
Publié le 22/07/2022 à 11:19

Tribune

Akram Louiz

Lieutenant mécanicien de première classe de la marine marchande, chercheur et auteur du roman "L’affranchissement" et du recueil poétique "Trente fleurs"

Ils errent dans nos villes, cherchant l’introuvable. Ils sont tous jeunes et les saletés de la folie cachent la beauté de leurs visages. Leur histoire est la même, mais pour la comprendre, il faut connaître l’histoire du « dernier joint ».

Les statistiques montrent qu’au moins 800.000 Marocains ont consommé de la drogue en 2014, soit 4 à 5% de la population adulte du Royaume. Ce ne sont que des statistiques approximatives puisqu’une grande partie des consommateurs de cannabis choisissent de cacher leur dépendance à la société et à leurs familles.

Le « dernier joint » est le produit d’une industrie artisanale similaire à celle du couscous marocain. En effet, le cannabis récolté et traité par les experts de ce domaine, arrive secrètement chez des vilains pas loin des foyers de nos jeunes. Cette matière première est ensuite mise dans un couscoussier pour subir un processus de transformation, qui diffère d’un vilain à un autre. Ce poison est ensuite revendu à plusieurs victimes.

Chacun de ces vilains veut assurer et augmenter le nombre de ses clients fidèles. Pour ce faire, il ajoute d’autres produits au cannabis pour faire durer son effet et le rendre plus intense. Malheureusement, les jeunes ne savent pas que ce processus s’effectue en ajoutant « n’importe quoi » à l’eau du couscoussier.

Cette eau peut contenir des médicaments ou d’autres substances qui affectent le cerveau. Sa vapeur est absorbée par le cannabis, qui devient ainsi extrêmement dangereux et toxique. C’est ce produit final, notamment le « dernier joint », qui menace les consommateurs, toutes catégories confondues, et leur santé.

Par ailleurs, la consommation du cannabis a été vulgarisée et banalisée par les médias internationaux. Certaines chansons occidentales montrent en plus les stars et les influenceurs vanter les mérites de cette drogue et louer ses effets. Croyant dur comme fer que consommer du cannabis, c’est être plus libre et plus mûr et prenant exemple sur leurs idoles, les jeunes tombent ainsi dans le piège de cette addiction.

Ils se méprennent et rêvent de vivre à l’américaine, ou plus spécifiquement comme les citoyens des 19 États américains, où l’usage récréatif du cannabis est légal (Alaska, Arizona, Californie, Colorado, Connecticut, Illinois, Maine, Massachusetts, Michigan, Montana, New Jersey, Nouveau-Mexique, New York, Nevada, Oregon, Rhode Island, Vermont, Virginie et Washington). Mais ce que les jeunes Marocains ignorent, c’est que les distributeurs de drogue ne leur vendent pas du cannabis, mais un produit qui contient plusieurs poisons très nocifs pour le cerveau et la santé en général.

Le cannabis a longtemps été considéré aussi dangereux que l’héroïne. Il était classé parmi les substances mortelles et addictives. Cependant, sur la base des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la Commission des stupéfiants des Nations Unies (CND) a retiré le cannabis du tableau IV de la Convention unique sur les stupéfiants de 1961.

Au Maroc, et depuis le début du débat sur la légalisation de l’usage thérapeutique de cette plante, le peuple marocain s’intéresse de plus en plus à ce sujet. Cela risque d’induire en erreur bon nombre de personnes sur l’utilisation du cannabis et de rendre sa consommation plus attractive. Aussi, cela élargirait malheureusement davantage la clientèle « des couscoussiers toxiques ».

L’addiction au cannabis est une maladie qui détruit la société marocaine. Quand les parents découvrent la dépendance de leur enfant, ils sont perdus et commencent à redouter qu’il consomme d’autres substances illicites. Pire encore, ils craignent pour la vie de leur enfant. De plus, cette maladie impacte aussi le parcours scolaire de cette victime, qui est souvent infructueux. L’histoire du « dernier joint » ruine ainsi les relations et le bonheur familial.

Enfin, le Maroc doit multiplier les efforts et mobiliser ces experts et laboratoires pharmaceutiques afin de trouver des solutions et des traitements pour sauver notre jeunesse de ces drogues. Le Royaume pourrait même profiter de la légalisation de la culture du cannabis pour développer des traitements qui limiteraient ou annuleraient même la dépendance des consommateurs. Cette solution permettra à ces derniers de s’éloigner de ces distributeurs criminels, vendeurs de produits psychotropes toxiques.

Dernier articles
Les articles les plus lu
Publié le 06/12

Aux frontières du réel et de la fiction dans le roman social : le cas « Houris »

Cependant, cette pratique pose une question délicate : où s’arrête l’inspiration et où commence l’appropriation illégitime d’une histoire personnelle ? L’affaire entourant Kamel Daoud et son roman Houris illustre les tensions qui surgissent lorsque fiction et réalité s’entrelacent. Lauréat du prix Goncourt 2024, Daoud se voit reproché d’avoir utilisé, sans consentement, le récit d’une survivante de la guerre civile algérienne, ancienne patiente de son épouse psychiatre. Si l’écrivain réfute ces accusations en invoquant la fiction comme territoire libre, cette controverse…

Par, Intissar Haddiya , Médecin et auteure marocaine
Publié le 22/11

Asynchroni-Cités : quand les rythmes urbains se désaccordent

Dans ces environnements urbains, les rythmes de vie, les infrastructures et les dynamiques sociales ne sont plus en phase, créant une fragmentation de l’expérience urbaine. L’urbanisation rapide, souvent motivée par des impératifs économiques plutôt que par une vision cohérente de la ville, conduit à un désaccord entre les différents éléments qui composent la cité. Les transports fonctionnent à une cadence différente de celle des besoins résidentiels, les espaces de travail ne s’intègrent pas harmonieusement aux zones de loisirs, et les…

Par, Mohammed Hakim Belkadi , Consultant architecte des écosystèmes urbains prédictifs et des milieux interconnectés expert judiciaire
Publié le 08/11

Le Maroc exige de l’ONU une action décisive pour contrer les manœuvres déstabilisatrices dans la région

Ce régime, dont les pratiques empiètent systématiquement sur la souveraineté des nations voisines, s’appuie en interne sur une propagande mensongère visant à alimenter la haine, à détourner ses citoyens de leurs véritables aspirations, et à les priver de leur droit légitime au développement, à la justice sociale, et à la prospérité. Son objectif est évident : manipuler l’opinion publique pour la maintenir captive de projets idéologiques en décalage complet avec les besoins et les droits réels de ses citoyens. Après…

Par, Faiçal Marjani , Acteur associatif
Publié le 29/10

Qu’est-ce qui agace les passagers lorsqu’ils utilisent un petit taxi ?

Les couleurs fournissent un repère visuel, elles aident les passagers à identifier facilement les taxis de la ville, mais elles ne sont pas le gage de l’expérience réussie en taxi. Dans plusieurs situations, les passagers ne sont pas comblés. Qu’est-ce qui agace les passagers lorsqu’ils utilisent un petit taxi ? Dans le but de répondre à cette question, nous avons mené une petite investigation qui a consisté à questionner quelques clients de taxi, ils étaient tous des usagers réguliers dudit…

Par, Ghizlane ERRABI. Phd , Professeur Chercheur - ISGA Marrakech
Publié le 18/10

Ce que pourrait être le stade Mohammed V

Le stade se distingue par son enveloppe architecturale ornée de motifs complexes, rappelant l’artisanat traditionnel, et par l’intégration innovante du végétal artificialisé. Ce dernier permet de créer un environnement qui évoque la nature en utilisant des matériaux modernes, symbolisant une harmonie entre urbanisme, culture et durabilité. Parti architectural et intégration du végétal artificialisé 1. Façade organique et motifs végétaux stylisés  L’enveloppe extérieure du stade est conçue pour rappeler des formes organiques, telles que des feuilles et des pétales géants qui…

Par, Mohammed Hakim Belkadi , Consultant architecte des écosystèmes urbains prédictifs et des milieux interconnectés expert judiciaire
Publié le 15/10

L’enseignant qui faisait d’un tableau noir une œuvre d’art

Le cours commençait par un trait de craie blanche, et se terminait, dans une allure aussi rapide que précise, en une planche anatomique haute en couleurs. On dirait que la vie s’imprègne dans ce tableau usé par tant d’années d’usage. Les plus doués en dessin arrivaient à suivre le rythme frénétique du cours. Et le soir venu, ils retouchaient leurs dessins, les peaufinaient, si bien que les cahiers d’anatomie deviennent des œuvres d’art. C’était une manière très originale d’apprentissage, simple…

Par, Dr Mustapha Merouane , Médecin-chirurgien et journaliste
Publié le 11/10

Analyse des réformes du statut général de la fonction publique au Maroc

I. Extension du champ d’application du statut général aux intérêts décentralisés L’une des modifications les plus importantes apportées au statut est l’ajout des fonctionnaires travaillant dans les services déconcentrés des administrations publiques aux catégories de personnel concernées par ce statut. Cette modification (article 4) répond aux nouvelles orientations de l’administration publique, qui visent à renforcer la politique de décentralisation et à étendre les compétences des services déconcentrés. Après l’amendement, l’article 4 stipule que le statut général s’applique à «l’ensemble des…

Par, Yassine Kahli , Conseiller juridique et chercheur en sciences juridiques
Publié le 10/10

La coopération au service de l’éducation

« Les racines de l’éducation sont amères, mais ses fruits sont doux » ARISTOTE   Conscients que l’éducation joue un grand rôle dans le développement de notre pays, l’Association « AGHBALOU » (1) Ait Ouabidallah, Ait Oum Lbakht, grâce à un programme d’aide aux projets à caractère social initié au Maroc par la République Tchèque, a contribué à la réhabilitation de l’école rurale du Douar Ait Ouabidallah. Cette réhabilitation rentre également dans le cadre du protocole de partenariat signé entre…

Par, Mustapha Merouane , Président de l'Association Aghbalou Ait Ouabidallah
Voir plus
Publié le 22/11

Asynchroni-Cités : quand les rythmes urbains se désaccordent

Dans ces environnements urbains, les rythmes de vie, les infrastructures et les dynamiques sociales ne sont plus en phase, créant une fragmentation de l’expérience urbaine. L’urbanisation rapide, souvent motivée par des impératifs économiques plutôt que par une vision cohérente de la ville, conduit à un désaccord entre les différents éléments qui composent la cité. Les transports fonctionnent à une cadence différente de celle des besoins résidentiels, les espaces de travail ne s’intègrent pas harmonieusement aux zones de loisirs, et les…

Par, Mohammed Hakim Belkadi , Consultant architecte des écosystèmes urbains prédictifs et des milieux interconnectés expert judiciaire
Publié le 06/12

Aux frontières du réel et de la fiction dans le roman social : le cas « Houris »

Cependant, cette pratique pose une question délicate : où s’arrête l’inspiration et où commence l’appropriation illégitime d’une histoire personnelle ? L’affaire entourant Kamel Daoud et son roman Houris illustre les tensions qui surgissent lorsque fiction et réalité s’entrelacent. Lauréat du prix Goncourt 2024, Daoud se voit reproché d’avoir utilisé, sans consentement, le récit d’une survivante de la guerre civile algérienne, ancienne patiente de son épouse psychiatre. Si l’écrivain réfute ces accusations en invoquant la fiction comme territoire libre, cette controverse…

Par, Intissar Haddiya , Médecin et auteure marocaine
Publié le 08/11

Le Maroc exige de l’ONU une action décisive pour contrer les manœuvres déstabilisatrices dans la région

Ce régime, dont les pratiques empiètent systématiquement sur la souveraineté des nations voisines, s’appuie en interne sur une propagande mensongère visant à alimenter la haine, à détourner ses citoyens de leurs véritables aspirations, et à les priver de leur droit légitime au développement, à la justice sociale, et à la prospérité. Son objectif est évident : manipuler l’opinion publique pour la maintenir captive de projets idéologiques en décalage complet avec les besoins et les droits réels de ses citoyens. Après…

Par, Faiçal Marjani , Acteur associatif
Publié le 29/10

Qu’est-ce qui agace les passagers lorsqu’ils utilisent un petit taxi ?

Les couleurs fournissent un repère visuel, elles aident les passagers à identifier facilement les taxis de la ville, mais elles ne sont pas le gage de l’expérience réussie en taxi. Dans plusieurs situations, les passagers ne sont pas comblés. Qu’est-ce qui agace les passagers lorsqu’ils utilisent un petit taxi ? Dans le but de répondre à cette question, nous avons mené une petite investigation qui a consisté à questionner quelques clients de taxi, ils étaient tous des usagers réguliers dudit…

Par, Ghizlane ERRABI. Phd , Professeur Chercheur - ISGA Marrakech
Publié le 11/10

Analyse des réformes du statut général de la fonction publique au Maroc

I. Extension du champ d’application du statut général aux intérêts décentralisés L’une des modifications les plus importantes apportées au statut est l’ajout des fonctionnaires travaillant dans les services déconcentrés des administrations publiques aux catégories de personnel concernées par ce statut. Cette modification (article 4) répond aux nouvelles orientations de l’administration publique, qui visent à renforcer la politique de décentralisation et à étendre les compétences des services déconcentrés. Après l’amendement, l’article 4 stipule que le statut général s’applique à «l’ensemble des…

Par, Yassine Kahli , Conseiller juridique et chercheur en sciences juridiques
Publié le 18/10

Ce que pourrait être le stade Mohammed V

Le stade se distingue par son enveloppe architecturale ornée de motifs complexes, rappelant l’artisanat traditionnel, et par l’intégration innovante du végétal artificialisé. Ce dernier permet de créer un environnement qui évoque la nature en utilisant des matériaux modernes, symbolisant une harmonie entre urbanisme, culture et durabilité. Parti architectural et intégration du végétal artificialisé 1. Façade organique et motifs végétaux stylisés  L’enveloppe extérieure du stade est conçue pour rappeler des formes organiques, telles que des feuilles et des pétales géants qui…

Par, Mohammed Hakim Belkadi , Consultant architecte des écosystèmes urbains prédictifs et des milieux interconnectés expert judiciaire
Publié le 15/10

L’enseignant qui faisait d’un tableau noir une œuvre d’art

Le cours commençait par un trait de craie blanche, et se terminait, dans une allure aussi rapide que précise, en une planche anatomique haute en couleurs. On dirait que la vie s’imprègne dans ce tableau usé par tant d’années d’usage. Les plus doués en dessin arrivaient à suivre le rythme frénétique du cours. Et le soir venu, ils retouchaient leurs dessins, les peaufinaient, si bien que les cahiers d’anatomie deviennent des œuvres d’art. C’était une manière très originale d’apprentissage, simple…

Par, Dr Mustapha Merouane , Médecin-chirurgien et journaliste
Publié le 10/10

La coopération au service de l’éducation

« Les racines de l’éducation sont amères, mais ses fruits sont doux » ARISTOTE   Conscients que l’éducation joue un grand rôle dans le développement de notre pays, l’Association « AGHBALOU » (1) Ait Ouabidallah, Ait Oum Lbakht, grâce à un programme d’aide aux projets à caractère social initié au Maroc par la République Tchèque, a contribué à la réhabilitation de l’école rurale du Douar Ait Ouabidallah. Cette réhabilitation rentre également dans le cadre du protocole de partenariat signé entre…

Par, Mustapha Merouane , Président de l'Association Aghbalou Ait Ouabidallah

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire