Accueil / Société

Peines alternatives : à quoi ressemblera la justice dès le 22 août 2025 ?

Temps de lecture :

Peines alternatives : à quoi ressemblera la justice dès le 22 août 2025 ?Image d'illustration © DR

A
A
A
A
A

À compter du 22 août 2025, le Maroc mettra en œuvre la loi 43.22 instaurant les peines alternatives à l’incarcération. Cette réforme, attendue de longue date, vise à désengorger les établissements pénitentiaires et à favoriser la réinsertion des condamnés par des sanctions adaptées, telles que le travail d’intérêt général ou le port du bracelet électronique.

La surpopulation carcérale est l’un des défis les plus pressants de la justice marocaine. Face à l’engorgement des prisons et à l’usage excessif de la détention préventive, le Royaume franchit une étape décisive avec l’entrée en vigueur, dès le 22 août 2025, de la loi 43.22 sur les peines alternatives.

Cette réforme structurelle, portée par la volonté royale de rendre la justice plus humaine, introduit une panoplie de mesures permettant d’éviter l’emprisonnement pour certaines infractions, notamment celles punies de peines n’excédant pas cinq ans. À travers cette démarche, le Maroc entend non seulement moderniser son système judiciaire, mais aussi préserver la dignité des condamnés, réduire les coûts sociaux de l’enfermement et favoriser leur réinsertion dans la société.

Une réforme pour désengorger les prisons

Dans un contexte marqué par une recrudescence des délits durant la saison estivale, le lancement officiel de la loi sur les peines alternatives apparaît comme une réponse pragmatique à la saturation du système carcéral. Les condamnés non récidivistes, jugés pour des infractions mineures, pourront désormais purger leur peine en dehors des murs de la prison, sous la forme de travaux d’intérêt général, de jours-amende ou de surveillance électronique.

Cette évolution juridique s’inscrit dans un effort global de rationalisation des moyens pénitentiaires. En réduisant le recours systématique à la détention, l’État vise à limiter l’impact social, psychologique et économique de l’incarcération, notamment pour les familles des condamnés. Elle permettra également de concentrer les ressources sur la gestion des cas les plus graves.

Lire aussi : Peines alternatives : une justice qui rééduque plutôt qu’elle punit

Le rôle central du ministère public

Pour garantir l’application effective de cette réforme, une mobilisation spéciale du ministère public est prévue durant tout le mois d’août. Hicham Balaoui, procureur général du Roi près la Cour de cassation, a ainsi appelé, lors d’une réunion à Rabat avec les représentants du Parquet, à l’intégration immédiate des peines alternatives dans les pratiques judiciaires. Il a également rappelé que cette réforme s’inscrivait dans le cadre des grandes orientations royales visant à humaniser la justice.

Une circulaire a d’ailleurs été adressée à l’ensemble des parquets, les incitant à éviter, autant que possible, le recours à la détention préventive. Le ministère public est ainsi invité à privilégier les mesures non privatives de liberté, dès lors que les conditions juridiques et humaines le permettent. Le message est clair : il faut rompre avec la logique d’incarcération systématique, et faire place à une justice plus préventive, réparatrice et adaptée.

Des peines diversifiées, aux objectifs ciblés

La loi 43.22 offre un éventail de peines alternatives conçues pour répondre aux réalités sociales des condamnés et aux exigences de la société. Parmi les sanctions désormais prévues figurent :

• Les travaux d’intérêt général (TIG) : le condamné réalise une activité non rémunérée au profit d’une collectivité ou d’un organisme public, ce qui permet une contribution utile à la société.

• La surveillance électronique : le port d’un bracelet permet de contrôler les déplacements du condamné, souvent limité à des horaires et zones géographiques précises.

Lancement des peines alternatives en août 2025

• Les jours-amende : cette peine consiste à payer un montant quotidien déterminé selon les revenus du condamné, pendant un certain nombre de jours.

• Les mesures thérapeutiques ou curatives : elles visent à traiter les causes profondes du passage à l’acte, comme les addictions ou troubles psychiques.

• Les restrictions de droits : telles que l’interdiction d’exercer certains métiers ou de fréquenter certains lieux.

Chacune de ces mesures poursuit un double objectif : limiter les effets destructeurs de la prison tout en assurant une forme de réparation sociale. Surtout, elles permettent au condamné de rester inséré dans son environnement professionnel et familial, ce qui réduit considérablement les risques de récidive.

Un chantier structurant pour la justice marocaine

L’entrée en vigueur de cette loi marque une nouvelle étape dans le vaste chantier de réforme de la justice. Outre les peines alternatives, le Royaume révise actuellement plusieurs textes fondamentaux, comme le Code de la famille, le Code de procédure pénale ou encore le Code de procédure civile.

Le procureur général Hicham Balaoui s’est félicité de cette dynamique, soulignant que « le Maroc est en chantier permanent, que ce soit dans les infrastructures, les routes, les ports, ou encore dans le domaine juridique ». Pour lui, cette évolution traduit la volonté de garantir une justice plus équitable, plus efficace et plus proche des citoyens.

Peines alternatives : allègement des prisons et place à la réinsertion

La Délégation générale à l’administration pénitentiaire aura pour mission de piloter cette réforme sur le terrain, en s’appuyant sur des programmes annuels, des partenariats interinstitutionnels et des bases de données unifiées.

L’objectif est de créer un cadre cohérent et opérationnel qui permette l’évaluation, le suivi et l’adaptation des peines en fonction des profils.

Avec l’adoption des peines alternatives, le Maroc amorce une transformation profonde de son système pénal. En privilégiant des sanctions intelligentes, proportionnées et réparatrices, la justice marocaine s’éloigne de la logique punitive au profit d’une approche plus humaine, pragmatique et tournée vers la réinsertion.

Reste à assurer une mise en œuvre rigoureuse, soutenue par l’engagement du ministère public, des magistrats et de l’ensemble des acteurs judiciaires. Le mois d’août sera décisif pour ancrer cette réforme dans la pratique quotidienne, et faire des peines alternatives un levier central d’une justice plus moderne et plus juste.

Dernier articles
Les articles les plus lu

Glovo : les livreurs dénoncent des conditions de travail indignes

Société - Devant le siège régional de l’UMT à Casablanca, des dizaines de livreurs de Glovo ont manifesté contre leurs conditions de travail.

Ilyasse Rhamir - 21 juillet 2025

Le Maroc vote une nouvelle loi pour protéger les animaux errants

Société - Le Maroc adopte une loi protégeant les animaux errants, interdisant la maltraitance et les abattages injustifiés.

Mouna Aghlal - 21 juillet 2025

Chira : près de 600 kg saisis dans la province de Tata

Société - Une opération menée à l’aube du lundi 21 juillet a permis de faire avorter une importante tentative de contrebande de drogue dans la province de Tata.

Ilyasse Rhamir - 21 juillet 2025

Olympiades de mathématiques : le Maroc signe sa meilleure performance en 30 ans

Société - Exploit historique pour l’équipe marocaine aux Olympiades de mathématiques en Australie : deux médailles, quatre mentions honorables et un record vieux de trois décennies.

Hajar Toufik - 21 juillet 2025

Scandale : que cachent vraiment nos prothèses dentaires ?

Société - Que valent réellement ces prothèses dentaires au prix défiant toute concurrence ?

Sabrina El Faiz - 21 juillet 2025

Baisse des prix des médicaments : les pharmaciens menacent de faire grève

Société - La baisse des prix des médicaments, proposée par le gouvernement marocain, divise le secteur, tandis que la FNAC soutient la réforme.

Mouna Aghlal - 21 juillet 2025
Voir plus

Travaux : les Casablancais n’en peuvent plus !

Dossier - Des piétons qui traversent d’un trottoir à l’autre, des voitures qui zigzaguent… À croire que les Casablancais vivent dans un jeu vidéo, sans bouton pause.

Sabrina El Faiz - 12 avril 2025

Faux et usage de faux, la dangereuse fabrique de l’illusion

Dossier - Un faux témoignage peut envoyer un innocent en prison ou blanchir un coupable. Un faux diplôme casse la méritocratie. Un faux certificat peut éviter une sentence.

Sabrina El Faiz - 24 mai 2025

La classe moyenne marocaine existe-t-elle encore ?

Dossier - Au Maroc, pour définir le terme classe moyenne, nous parlons de revenus. Cela ne veut pourtant plus rien dire.

Sabrina El Faiz - 5 juillet 2025

Le Maroc des voisins qu’on n’a pas choisis

Dossier - Les voisins ont bien changé. Les balcons étaient les réseaux sociaux d’antan. On y partageait les breaking news du quartier et les hommes étaient aussi bien surveillés que les enfants !

Sabrina El Faiz - 12 juillet 2025

Aïd Al-Adha : amende pour le sacrifice du mouton ? Le vrai du faux

Société - À quelques semaines de Aïd Al-Adha, une rumeur sur une prétendue amende pour le sacrifice du mouton sème le doute chez les Marocains.

Hajar Toufik - 16 mai 2025

IA : avons-nous encore un libre arbitre ?

Dossier - Confiance dans les GPS, les avis en ligne ou des suggestions d'algorithme, nous déléguons notre libre-arbitre à des logiques invisibles.

Sabrina El Faiz - 3 mai 2025
pub

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire