ChatGPT : radiographie mondiale des usages d’un outil devenu incontournable

Lorsqu’OpenAI a ouvert ChatGPT au public en novembre 2022, peu auraient parié sur une telle déferlante. En l’espace de quelques jours, le chatbot atteignait déjà un million d’inscrits. Moins d’un an plus tard, la barre des 100 millions d’utilisateurs actifs hebdomadaires était franchie, pulvérisant les records établis par l’adoption d’Internet ou des smartphones. Et l’ascension ne s’est pas arrêtée : à l’été 2025, près de 700 millions de personnes dans le monde utilisaient régulièrement le service, soit environ 10% de la population adulte.

Ce succès planétaire intrigue les chercheurs, qui cherchent à comprendre non seulement l’ampleur de la diffusion, mais aussi la manière dont les individus se servent concrètement de ce nouvel outil.

Un rapport publié par le National Bureau of Economic Research (NBER) en septembre 2025 s’appuie sur des milliards de messages échangés entre utilisateurs et chatbot pour dresser un panorama complet des usages, tout en préservant la confidentialité des données. L’étude met en lumière un double mouvement : d’un côté, l’intégration de ChatGPT dans les tâches professionnelles et académiques, de l’autre, une explosion des usages personnels, ludiques ou liés à l’apprentissage.

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Une adoption planétaire sans précédent

Jamais une technologie n’avait connu une telle vitesse de diffusion. Dès le 5 décembre 2022, cinq jours après son lancement, ChatGPT comptait déjà plus d’un million d’inscrits. À titre de comparaison, Facebook avait mis dix mois pour franchir ce seuil, et Netflix plus de trois ans. En juillet 2025, la plateforme revendiquait plus de 700 millions d’utilisateurs actifs hebdomadaires, soit près de 10% des adultes dans le monde.

Ce raz-de-marée ne se limite pas à l’inscription passive. L’activité des utilisateurs est elle-même impressionnante : plus de 2,5 milliards de messages sont échangés chaque jour, soit environ 29.000 par seconde. Cette intensité place ChatGPT dans une catégorie à part, non pas comme une simple application de niche, mais comme un outil intégré au quotidien.

L’évolution des cohortes d’utilisateurs confirme cette tendance. Les pionniers de 2022 et 2023, qui avaient vu leur activité légèrement décliner au bout d’un an, se sont remis à utiliser intensément le service à partir de fin 2024, parallèlement aux progrès des modèles mis en ligne (notamment GPT-4o et GPT-5). Les nouveaux inscrits, de leur côté, découvrent progressivement des usages inédits, ce qui augmente leur fréquence d’interaction.

En somme, loin d’un effet de mode passager, ChatGPT semble s’inscrire dans la durée, avec une progression continue de l’usage au sein de chaque génération d’utilisateurs.

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Usages dominés par l’écriture, l’information et le conseil

Que font concrètement les centaines de millions d’utilisateurs ? L’analyse des conversations permet de distinguer trois catégories principales, qui concentrent près de 80% des requêtes : l’écriture, la recherche d’informations et l’accompagnement pratique.

L’écriture domine largement les usages professionnels. En juillet 2025, environ 40% des messages liés au travail concernaient la rédaction, la correction ou la traduction de textes. Emails, rapports, présentations ou encore discours : la polyvalence de l’IA en matière de production écrite explique son adoption massive dans le monde du travail. Plus des deux tiers de ces demandes ne consistent pas à créer un texte original, mais à transformer ou améliorer un texte déjà rédigé par l’utilisateur. L’outil joue ainsi un rôle de correcteur, d’éditeur et de traducteur, augmentant la productivité des travailleurs.

La recherche d’informations est un autre pilier. Qu’il s’agisse d’obtenir des données factuelles, des chiffres économiques, des conseils sur un produit ou des informations d’actualité, ChatGPT sert de substitut, voire d’alternative, aux moteurs de recherche classiques. Avec la différence notable que les réponses sont contextualisées, personnalisées et suivies de relances interactives.

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L’accompagnement pratique regroupe quant à lui des usages aussi variés que le tutorat scolaire, la préparation d’un entretien d’embauche, la conception d’un programme d’entraînement sportif ou la recherche d’idées créatives. Plus de 10% des messages concernent directement le soutien éducatif, confirmant la place centrale de l’IA dans l’apprentissage individuel.

En revanche, certains usages que l’on croyait centraux restent minoritaires. La programmation informatique, par exemple, ne représente que 4,2% des conversations. De même, les requêtes à caractère personnel ou émotionnel (compagnonnage, discussions intimes) demeurent marginales, représentant moins de 2% des messages.

Ces chiffres suggèrent que ChatGPT n’est pas d’abord perçu comme un confident ou un ami virtuel, mais bien comme un outil de production et de décision, proche d’un assistant professionnel et personnel multitâches.

Portrait des utilisateurs : jeunes, diversifiés et désormais paritaires

L’essor de ChatGPT ne concerne pas un profil unique d’utilisateur. Néanmoins, certaines tendances se dégagent. Près de la moitié des messages envoyés par des adultes proviennent d’utilisateurs âgés de moins de 26 ans. Cette tranche d’âge, née avec Internet et les réseaux sociaux, est naturellement plus encline à expérimenter de nouveaux outils numériques.

Au lancement, le service était massivement adopté par des hommes : environ 80% des utilisateurs actifs en 2022-2023 avaient des prénoms masculins. Mais cette disparité a fondu au fil du temps. En juin 2025, la parité était atteinte, et les femmes étaient même légèrement plus nombreuses parmi les utilisateurs hebdomadaires. Cette évolution témoigne de la généralisation de l’outil, qui n’est plus perçu comme une curiosité réservée aux technophiles masculins.

L’usage varie également avec l’âge. Chez les moins de 26 ans, seules 23% des interactions concernent le travail, l’essentiel étant consacré à des activités de loisir, d’apprentissage ou de recherche personnelle. À l’inverse, plus les utilisateurs vieillissent, plus la part des conversations liées à l’emploi augmente.

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Enfin, la croissance est particulièrement marquée dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Alors qu’en 2023 l’adoption était plus forte dans les pays développés, l’année 2024-2025 a vu un rattrapage spectaculaire dans des régions comme l’Afrique, l’Amérique latine ou l’Asie du Sud. ChatGPT y représente parfois une alternative accessible à des services éducatifs ou professionnels coûteux.

Entre outil de travail et loisir : un équilibre mouvant

L’étude met en évidence un basculement notable : la part des usages liés au travail a diminué au profit des usages personnels. En juin 2024, les interactions non professionnelles représentaient 53% du total. Un an plus tard, elles atteignaient 73%. Autrement dit, ChatGPT est désormais utilisé majoritairement hors du cadre professionnel.

Ce glissement ne signifie pas que l’usage professionnel décline. Au contraire, le volume des requêtes liées au travail continue d’augmenter, mais il croît moins vite que celui des usages personnels. La nouveauté réside donc dans l’explosion des conversations centrées sur l’éducation, le divertissement, la créativité ou les conseils pratiques.

Dans le domaine professionnel, l’IA joue un rôle précis : près de 81 % des messages liés au travail concernent deux fonctions essentielles : l’obtention, la documentation et l’interprétation d’informations, ainsi que la prise de décision, le conseil et la résolution de problèmes. Autrement dit, ChatGPT agit comme un co-pilote cognitif, capable d’épauler les travailleurs dans leurs choix et leurs tâches intellectuelles.

Cette valeur ajoutée se traduit aussi en termes économiques. Aux États-Unis, le surplus de bien-être généré par les usages de ChatGPT a été estimé à 97 milliards de dollars en 2024. Une somme qui illustre l’impact massif de l’IA sur la productivité et la satisfaction des utilisateurs.

En dehors du travail, ChatGPT est devenu un compagnon polyvalent. Les usages éducatifs, créatifs et personnels se multiplient, redéfinissant la frontière entre outil de production et source de loisir. Cette hybridation explique sans doute l’adhésion durable des utilisateurs : l’IA n’est pas seulement un assistant professionnel, mais aussi un outil de vie quotidienne.

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En trois ans, ChatGPT est passé du statut d’expérimentation technologique à celui d’outil universel. L’étude du NBER montre que son adoption planétaire repose sur deux dynamiques complémentaires : une intégration croissante dans le monde du travail, où il sert de bras droit pour écrire, analyser et décider, et un développement explosif dans la sphère personnelle, où il devient tuteur, conseiller et générateur d’idées.

La diversité des utilisateurs (en âge, en genre, en origine géographique) témoigne de la démocratisation rapide de l’outil. S’il reste encore des inégalités d’accès, liées notamment à la connectivité et à l’éducation, la trajectoire est claire : ChatGPT s’impose comme une interface incontournable entre l’humain et l’information.

Au-delà des chiffres vertigineux, une question demeure : comment cette nouvelle dépendance à l’IA reconfigurera-t-elle nos manières de travailler, d’apprendre et de penser ? Si ChatGPT est déjà un acteur central du présent, il est aussi le laboratoire d’un futur où l’intelligence artificielle deviendra une composante ordinaire de la vie humaine.