Ah ce sacro-saint visa ! Entre les délais interminables, les coûts exorbitants et les parcours semés d’embûches, obtenir un visa Schengen c’est devenu… comment dire ? Un véritable parcours du combattant, tout simplement. De nombreux Marocains, rêvant de l’Europe sont excédés par les lenteurs des centres de visas BLS (Espagne) VFS (Italie) et TLS (France). Mais pourquoi diable s’imposer un tel enfer ?

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Les bagages sont prêts, les économies aussi, il ne manque qu’un élément : le visa Schengen. Et ce n’est pas rien. Pour de nombreux Marocains, ce précieux sésame est devenu un véritable graal, un document difficile à obtenir et souvent synonyme de stress, de dépenses importantes et de frustration.

Depuis plusieurs années, malgré un bon positionnement du passeport marocain, selon le cabinet Henley & Partners pour l’année 2025, les témoignages de candidats au visa pullulent sur la toile. Les plaintes se répètent et se ressemblent, les délais démesurés, les frais additionnels injustifiés et l’absence de communication. « Nous avons déposé nos demandes depuis avril et toujours aucune réponse, raconte un voyageur, ce qui chamboule complètement notre programme. Nous avons déjà fixé nos dates de congé. Si ça continue, nous allons tout annuler et choisir une autre destination ».

Visa Schengen : le cauchemar européen à prix d’or

Commentaire Facebook © Groupe SVM : Tls Contact / Vfs / Bls Maroc Visa

Un problème qui ne touche pas seulement les vacanciers, mais aussi les familles qui souhaitent visiter leurs proches, ou les étudiants qui attendent leur visa pour la rentrée. Les centres de traitement des visas comme BLS Espagne ou encore TLS France sont dans la ligne de mire, accusés d’inefficacité et d’opacité.

Pour Bouazza Kherrati, président de la Fédération marocaine des droits du consommateur, le problème est systémique. « Nous dénonçons depuis longtemps le comportement des sociétés intermédiaires. Les Marocains paient un service qui n’est pas rendu. Il nous faudrait une restitution des frais pour les visas refusés. Nous payons pour un service, et s’il n’est pas respecté, le consommateur a droit au remboursement ».

L’attente qui gâche les vacances

Le premier obstacle naturel auquel se heurtent les demandeurs de visa est celui des délais. En théorie, la procédure d’instruction d’un visa Schengen ne devrait pas dépasser 15 jours ouvrables. En pratique… mais évidemment la réalité est tout autre. Des centaines de Marocains se plaignent d’attendre des mois avant d’obtenir une réponse, sans aucune garantie de résultat.

Le centre BLS Espagne est particulièrement pointé du doigt sur les réseaux sociaux. Les délais d’obtention de rendez-vous sont déjà longs (parfois plusieurs semaines), mais s’ajoutent ensuite les retards dans le traitement des dossiers. TLS France n’est pas en reste, avec des témoignages de vacanciers frustrés, forcés de revoir leurs projets.

« Ces délais ne sont pas justifiables. C’est une forme de mépris envers les consommateurs. Nous avons même saisi l’ambassadrice de France à ce sujet », souligne Bouazza Kherrati.

Le souci, c’est qu’obtenir un visa Schengen n’est plus seulement une formalité, c’est un investissement financier. Le prix officiel du visa court séjour est de 80 euros (environ 900 dirhams), mais à ce montant s’ajoutent les frais de service des sociétés intermédiaires (TLS, BLS), souvent 400 à 600 dirhams supplémentaires et des agences fourbes qui raflent tous les rendez-vous. « Malheureusement le secteur est sali par de nombreuses agences qui s’amusent à prendre tous les rendez-vous de visas en ligne afin de les revendre », explique Hicham Azeroual, directeur d’agence de voyage, à LeBrief.

Hajj 1445 : les pièges à éviter

Ayant des employés déjà à disposition, il est facile pour ces agences de tout prendre d’un coup et de se faire un bon bénéfice au passage, au détriment du consommateur final. Un marché parallèle florissant, puisque ces rendez-vous peuvent aller jusqu’à 3.000 à 6.000 dirhams, selon les témoignages recueillis par la Fédération marocaine des droits du consommateur.

« C’est un business honteux. Ces sociétés ont laissé proliférer un marché noir autour de leurs services. Les Marocains paient cher un service médiocre, parfois pour un visa refusé. Nous demandons la fin de cette escroquerie », martèle Kherrati.

À ces coûts s’ajoutent les frais annexes, comme les assurances voyage obligatoires, les traductions de documents, les réservations d’hôtel (souvent fictives) exigées pour constituer le dossier… Le budget d’un simple visa peut ainsi dépasser 3.000 dirhams, sans garantie d’acceptation.

Les sociétés intermédiaires en ligne de mire

TLS Contact et BLS International, deux noms qui font grincer des dents. Les Italiens, c’est une autre histoire. Les Marocains veulent y déménager… mais ça, c’est le sujet d’un autre dossier !

Ces sociétés, mandatées par les consulats français et espagnols pour gérer la collecte des demandes de visa, se retrouvent au cœur des critiques. Elles sont accusées de monopoliser un service public et de transformer une procédure administrative en un véritable business.

« Ces entreprises sont devenues des machines à cash, sans réelle obligation de résultat », dénonce Bouazza Kherrati. « Elles perçoivent des frais supplémentaires pour des services de base, alors même que le consommateur n’a aucune garantie de voir son dossier accepté ».

Les Marocains doivent, en effet, s’acquitter d’un « service fee » pour déposer leur demande, en plus du coût officiel du visa. Ces frais, censés couvrir des prestations comme la prise d’empreintes ou le transfert des dossiers, peuvent rapidement faire grimper la facture.

Kherrati fustige cette dérive : « Le problème vient de la délégation de ce service à des opérateurs privés. Le Maroc doit exiger de ses partenaires européens que ce processus soit digitalisé, transparent et accessible. D’autres pays, comme le Kenya, ont instauré des e-visas rapides et efficaces. Pourquoi pas nous ? »
À l’heure du tout-numérique, la lenteur et l’opacité de TLS et BLS semblent d’autant plus incompréhensibles. De nombreuses voix appellent à une modernisation radicale, à savoir une plateforme unique, des délais garantis, la suppression des frais abusifs… De la transparence quoi !

« On paie pour être maltraité ». Réalité douloureuse partagée par un voyageur… fictif, puisqu’il ne voyagera plus cette année.

Une humiliation diplomatique ?

Au-delà de la dimension administrative, la question des visas Schengen, c’est aussi une histoire politique et symbolique. Comment expliquer que des pays qui se réclament des droits de l’Homme imposent autant d’obstacles à des voyageurs en règle ?

Bouazza Kherrati ne mâche pas ses mots : « Le visa Schengen viole l’esprit même de l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, qui garantit la liberté de circulation. La France, pays des droits de l’Homme, est paradoxalement l’une des premières à avoir instauré ce mur invisible ».
Pour beaucoup de Marocains, cette situation est ressentie comme une forme d’humiliation. Les longues files d’attente, les demandes de documents parfois absurdes (justificatifs bancaires, attestations d’emploi, preuves d’hébergement) et surtout le rejet sans explication d’une demande, alimentent un sentiment de « 7ogra ».

À cela s’ajoute la politique restrictive de l’Union européenne. La pression migratoire, les tensions diplomatiques et les discours sécuritaires en Europe durcissent les conditions d’entrée. Pour les Marocains, obtenir un visa ressemble de plus en plus à un examen humiliant où chaque erreur se paie cash.

Kherrati appelle à un électrochoc diplomatique : « Le Maroc doit faire valoir ses droits. Nous avons des accords de partenariat avec l’UE, nous ne sommes pas des clandestins. Il est temps de négocier une simplification des procédures ou d’instaurer une réciprocité : comme ils nous traitent, nous les traitons ».

Lire aussi : Henley Passport Index : le passeport marocain grimpe à la 67ᵉ place

Face à cette situation, certains choisissent tout simplement de boycotter l’Europe. « Pourquoi s’acharner pour un visa qui coûte une fortune et qui arrive en retard ? Nous préférons investir cet argent ailleurs, dans des voyages où nous sommes bien accueillis », explique un couple qui a troqué Toulouse pour Istanbul cet été.

C’est sûr, avec la flambée des prix des visas et les retards à répétition, les destinations sans visa gagnent du terrain. La Turquie, la Tunisie, l’Égypte ou encore les Émirats arabes unis accueillent de plus en plus de touristes marocains.

La fédération conseille d’ailleurs aux consommateurs de se tourner vers des destinations sans visa. « Quand les recettes touristiques européennes chuteront, peut-être qu’ils comprendront l’importance de nos voyageurs ».

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon les agences de voyages, les réservations vers la Turquie ont explosé de 30% en 2024, tandis que les demandes de visas Schengen stagnent. Ce basculement pourrait s’accentuer à mesure que les Marocains découvrent de nouvelles destinations plus accueillantes et moins chères.

Et il y a la comparaison budgétaire, pardi ! Un séjour en Europe implique non seulement des dépenses importantes sur place, mais aussi un budget préliminaire (visa, assurance, rendez-vous) qui peut dépasser 6.000 dirhams avant même de partir.

Des agences de voyage locales surfent sur cette vague en proposant des packages vers des destinations visa-free : Antalya, Hammamet, Dubaï… avec des prix compétitifs et zéro paperasse. Car oui, l’Europe n’est pas la seule option !

Où voyager sans visa ?

a map of the world

Liste des pays accessibles aux citoyens marocains sans visa en 2019 © Voiture location Maroc

(Mise à jour au 24 juillet 2025, d’après VisaIndex. Un conseil, vérifiez toujours avant de réserver : les règles bougent incroyablement vite !)

Envie d’esquiver la galère Schengen, les rendez-vous introuvables et les frais qui s’additionnent ? Bonne nouvelle, le passeport marocain ouvre, sans visa préalable, les portes de 39 pays. Et si vous élargissez le prisme aux visas à l’arrivée (28 pays) et aux autorisations électroniques (2 pays), le champ des possibles devient nettement plus large, n’est-ce pas ? Ci-dessous, la liste complète des destinations sans visa, regroupées par zones, avec quelques idées d’usages (balnéaire, city-break, nature, hub shopping…).

Afrique (15 pays)

Soleil, nature et city-breaks abordables

Angola, Bénin, Burkina Faso, Cap-Vert, Côte d’Ivoire, Gabon, Gambie, Guinée, Mali, Niger, Rwanda, Sao Tomé-et-Principe, Sénégal, Togo, Zambie.
Pourquoi y aller ? Plages (Cap-Vert, Gambie), éco-tourisme (Rwanda, Zambie), city-breaks dynamiques (Abidjan, Dakar), archipels encore confidentiels (Sao Tomé-et-Principe). Attention toutefois : durées de séjour et conditions d’entrée varient d’un pays à l’autre, passeport, preuve de ressources, billet retour peuvent être exigés.

Amériques et Caraïbes (10 pays)

Tropiques faciles d’accès

Barbade, Belize, Brésil, Colombie, Dominique, Equateur, Grenade, Haïti, République dominicaine, Saint‑Vincent‑et‑les‑Grenadines.
Entre forêts amazoniennes (Brésil, Équateur), plages carte postale (Barbade, Grenade, République dominicaine) et villes vibrantes (Bogotá, Rio, São Paulo), le continent offre un large spectre de voyages… sans passer par un consulat ! Là encore, pensez assurances, justificatifs d’hébergement et billets retour, sans visa ne signifie pas sans conditions.

Asie et Moyen-Orient élargi (8 pays)

De l’Asie du Sud-Est aux hubs eurasiatiques

Azerbaïdjan, Hong Kong, Kazakhstan, Macao, Malaisie, Philippines, Syrie, Thaïlande.
Surprise pour beaucoup : Thaïlande et Malaisie sont accessibles sans visa pour les Marocains (dans les limites de séjour autorisées). Hong Kong et Macao offrent des escales urbaines ultra-denses et branchées. Kazakhstan et Azerbaïdjan séduisent par leurs vastes paysages, une culture post-soviétique singulière et des tarifs encore doux. La Syrie figure formellement sur la liste sans visa, mais le contexte sécuritaire la rend de facto impraticable pour le tourisme.

Océanie et Pacifique (6 pays)

Paradis lointains, formalités légères

Îles Cook, Kiribati, Micronésie, Niue, Vanuatu, Zambie (Zambie est en Afrique, mais listée sans visa, on la garde dans son bloc continental ci-dessus, pour l’Océanie, retenez surtout Cook, Kiribati, Micronésie, Niue, Vanuatu).
Ce sont des destinations onéreuses à atteindre, mais au séjour ultra-simple une fois sur place. Idéal pour les voyageurs aguerris qui veulent cocher le bout du monde sans paperasse.

Bonus : les échappatoires stratégiques

Turquie, Tunisie
Deux portes d’entrée populaires et balnéaires pour l’été : Istanbul/Bodrum/Antalya d’un côté, Hammamet/Djerba de l’autre. Zéro visa, vols nombreux, budgets maîtrisés : c’est la combinaison gagnante pour ceux que les files d’attente chez TLS/BLS ont définitivement vaccinés.

Et au-delà ? (Visa à l’arrivée et autres : 30 destinations « quasi sans friction »)

Afrique (12 pays)

Burundi : jusqu’à 30 jours
Comores : 45 jours
Congo (République du Congo), durée variable
Djibouti : 90 jours
Ethiopie : jusqu’à 90 jours
Guinée‑Bissau : 90 jours
Madagascar : 90 jours
Maurice (Mauritius) : 60 jours
Mozambique : 30 jours
Sierra Leone : 30 jours
Somalie : 30 jours
Tanzanie : 90 jours
(Attention : certains sites mentionnent aussi le Togo ou Guinée, mais selon les listes les plus fiables, ce sont ces douze-là qui demeurent confirmés).

Asie (10 pays)

Cambodge : 30 jours
Indonésie : 30 jours
Iran : 30 jours
Jordanie : 30 à 90 jours
Laos : 30 jours
Liban : 30 jours
Maldives : 30 jours
Népal : 150 jours
Sri Lanka : 30 jours
Tadjikistan : 45 jours

Amériques (1 pays)

Nicaragua : 30 jours

Océanie (5 pays)

Îles Marshall : 90 jours
Palaos (Palau) : 30 jours
Samoa : 90 jours
Timor‑Leste : 30 jours
Tuvalu : 30 jours

Attention toutefois aux durées de séjour. Elles varient largement selon le pays (allant de 30 à 150 jours). Le visa est délivré à l’arrivée, mais prévoir les documents exigés (passeport valable, billets retour, preuve d’hébergement ou de fonds) reste obligatoire. Les règles peuvent évoluer rapidement, il est toujours conseillé de vérifier juste avant un voyage.

3 conseils express pour éviter les mauvaises surprises

  1. Toujours vérifier la durée exacte de séjour autorisée (30, 60, 90 jours… cela change d’un pays à l’autre).
  2. Ayez vos preuves de solvabilité, d’hébergement et de billet retour : « sans visa » ≠ « sans contrôle à l’arrivée ».
  3. Restez attentif aux mises à jour : accords bilatéraux, tensions diplomatiques, nouvelles plateformes e-visa… Les règles évoluent vite.

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