Peines alternatives, bracelet électronique © DR
C’est à Harhoura, en marge de deux journées d’étude organisées les 7 et 8 mai par la présidence du Ministère public en partenariat avec le Conseil de l’Europe, que les contours de cette réforme judiciaire ont été posés. Dans une démarche concertée entre magistrats, autorités judiciaires, administration pénitentiaire et institutions internationales, le Maroc se prépare à franchir un cap dans sa politique pénale avec l’entrée en vigueur imminente de la loi 43.22 relative aux peines alternatives.
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Ce texte juridique, fruit d’un long processus de consultations et de concertations, ambitionne de désengorger les prisons tout en assurant une réinsertion efficace des condamnés. À cet effet, le Procureur général du Roi près la Cour de cassation, El Hassan Daki, a annoncé la préparation d’un guide pratique destiné à accompagner les acteurs de terrain dans l’application de cette loi inédite. Un outil pédagogique, mais aussi stratégique, pour garantir une exécution cohérente, équitable et efficiente.
La peine, outil de réhabilitation sociale
Longtemps perçue comme un instrument de dissuasion, la peine tend désormais à se redéfinir. La loi 43.22 introduit une vision plus réformiste, où la sanction ne se résume plus à l’enfermement. Désormais, pour les délits passibles de peines allant jusqu’à cinq ans de prison, des alternatives telles que le travail d’intérêt général, la surveillance électronique, les amendes journalières ou encore des obligations spécifiques à caractère thérapeutique ou éducatif sont prévues.
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Pour Daki, cette évolution reflète une compréhension plus humaine de la justice. Les peines alternatives permettent au condamné de rester inséré dans son milieu social et économique, évitant ainsi les conséquences néfastes d’une incarcération parfois contre-productive, notamment en matière de récidive. « Ces mesures permettent une réhabilitation réelle, en renforçant le rôle des condamnés dans la société », a-t-il souligné.
Un coût moindre et une efficacité accrue
Du côté du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, Mohamed Abdennabaoui ne tarit pas d’éloges à l’égard de cette approche. Il affirme que le Maroc s’inscrit désormais parmi les systèmes judiciaires modernes ayant su intégrer des alternatives à la détention dans leur législation. Et les bénéfices sont multiples, un taux de récidive plus faible, une meilleure adaptation des peines à certains profils (notamment les cas liés à l’addiction), et des coûts largement inférieurs pour l’État.
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Les études comparatives présentées lors des journées d’étude montrent en effet que le coût d’une peine alternative peut être jusqu’à dix fois inférieur à celui de l’incarcération, tout en produisant de meilleurs résultats en matière de réinsertion. Certaines peines, comme le travail d’intérêt général, génèrent même une plus-value sociale directe.
Vers une justice partagée et inclusive
Pour garantir le succès de ce chantier, l’implication de toutes les parties prenantes est jugée cruciale. Magistrats, greffiers, cadres pénitentiaires, mais aussi la société civile devront jouer un rôle actif dans ce tournant pénal. Car, comme le rappelle Abdennabaoui, « la société doit accepter que la prison ne soit plus l’unique voie de sanction ». La légitimité des peines alternatives repose aussi sur la confiance du public dans leur efficacité.
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C’est également ce qu’a défendu le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi. Il a insisté sur la nécessité pour les juges de faire preuve d’audace et de créativité dans l’application des alternatives, en explorant toutes les pistes légales disponibles. Il promet le soutien total du ministère pour la réussite de cette réforme, tout en saluant le saut qualitatif qu’elle représente pour le système judiciaire marocain.
Un défi logistique et organisationnel à relever
Mais l’ambition réformatrice s’accompagne de défis concrets. La Délégation générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR), à qui la loi confère un rôle clé dans le suivi des peines alternatives, travaille à mettre en place les mécanismes de contrôle et d’accompagnement nécessaires. Mohamed Saleh Tamek, son délégué général, a souligné que l’application réussie de la loi dépendra d’une coordination étroite entre institutions, d’un accompagnement constant des acteurs de terrain, et d’un processus progressif d’évaluation.
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Selon lui, il ne s’agit pas d’un allègement des peines, mais d’un changement de paradigme. « Ces nouvelles peines ne doivent pas être perçues comme de la clémence, mais comme une autre voie pour atteindre les objectifs de discipline et de rééducation », a-t-il martelé, ajoutant que le chantier devra être suivi avec rigueur, dans le respect des orientations royales en matière de réforme du système judiciaire.
Un chantier national aux enjeux majeurs
Ces journées d’étude, qui ont réuni des magistrats marocains, des représentants de ministères et des experts du Conseil de l’Europe, ont permis d’examiner les expériences étrangères en matière de peines alternatives. Le Maroc y trouve une source d’inspiration pour affiner sa propre stratégie, tout en tenant compte des spécificités sociales, juridiques et institutionnelles locales.
L’un des objectifs principaux de cet événement est de préparer le terrain à l’entrée en vigueur de la loi en août prochain. Le guide pratique en cours d’élaboration viendra donc compléter cet effort en fournissant des repères clairs pour une application harmonisée. Car au-delà de l’innovation législative, c’est la crédibilité de la justice marocaine et sa capacité à s’adapter aux enjeux du 21ᵉ siècle qui se jouent dans cette réforme.
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