Croissance : le Maroc maintient le cap

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Croissance : le Maroc maintient le capCroissance (Image d'illustration) © DR

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L’économie nationale continue d’afficher des signes encourageants au premier semestre 2025, soutenue par une demande intérieure dynamique et des secteurs clés en bonne santé. Malgré un contexte international incertain et un commerce extérieur moins favorable, la croissance reste vigoureuse, tandis que l’inflation montre des signes nets d’apaisement.

L’économie nationale poursuit sa dynamique de redressement en 2025. D’après la dernière note de conjoncture du Haut-Commissariat au Plan (HCP), le Produit Intérieur Brut (PIB) a progressé de 4,6% au deuxième trimestre, après une croissance de 4,8% au premier trimestre. Une performance portée par la robustesse de la demande intérieure et le dynamisme des secteurs non agricoles, en particulier les services, la construction, les industries extractives et l’agriculture.

Dès le début de l’année, les signaux de reprise se sont multipliés. Le redressement des activités agricoles, conjugué à l’expansion des branches secondaires et tertiaires, a permis d’accélérer la croissance, qui s’établissait à +4,2% au quatrième trimestre 2024. Parmi les branches les plus dynamiques au premier trimestre figurent le tourisme (+9,7%), les industries chimiques (+6,8%), les industries extractives (+6,7%) et le bâtiment (+6,3%).

Le secteur agricole a également contribué à cette dynamique, avec une croissance de +4,7% au deuxième trimestre, malgré des conditions climatiques inégales. Si certaines cultures, comme les rosacées ou les oléagineuses, ont souffert de la chaleur et du déficit pluviométrique, les productions céréalières, maraîchères et sucrières se sont améliorées, notamment dans les zones irriguées.

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Consommation et investissement en forte progression

Le moteur de cette croissance est clairement domestique. La demande intérieure a contribué pour +8,5 points à la croissance du PIB au premier trimestre, son plus haut niveau depuis le rattrapage post-Covid. Cette vigueur repose sur la consommation des ménages, en hausse de +4,4% (contre +3,7% un trimestre auparavant), soutenue par la hausse des revenus salariaux et par la création d’emplois (+3,4% d’emplois rémunérés).

La consommation publique est restée soutenue avec une progression de +5,2%, tirée par l’augmentation des dépenses en biens et services. L’investissement, quant à lui, a bondi de +17,5% au premier trimestre, après +12,3% au T4 2024, grâce à la relance des projets d’infrastructure sportive, routière et hydraulique. Ce regain est toutefois contrasté par une progression plus modeste des investissements dans le secteur manufacturier.

Au deuxième trimestre, cette dynamique d’investissement s’est poursuivie, notamment à travers des importations accrues d’équipements de génie civil et une hausse des dépenses des entreprises privées. La demande intérieure a ainsi contribué pour +7,7 points à la croissance du PIB, malgré un affaiblissement de la demande extérieure.

Un commerce extérieur en retrait, des risques persistants

La principale ombre au tableau reste la contribution négative du commerce extérieur, qui a amputé la croissance de 3,8 points au premier trimestre et de 3,1 points au deuxième. Les exportations n’ont progressé que de +2,2% au T1, contre +9,8% au T4 2024, en raison du ralentissement de la demande en provenance des principaux partenaires européens. Dans le même temps, les importations ont bondi de +9,8%, dopées par la vigueur de la demande en biens de consommation et d’équipement.

Cette tendance pourrait se prolonger, selon le HCP. Au troisième trimestre 2025, la croissance devrait légèrement ralentir à +4,4%, toujours soutenue par la demande intérieure (+6,6 points de contribution attendue), mais pénalisée par des exportations peu dynamiques. L’environnement mondial, marqué par les tensions commerciales entre les États-Unis et l’Europe et un ralentissement prononcé de la croissance européenne, constitue un facteur de risque pour plusieurs filières marocaines tournées vers l’export, telles que l’automobile, la chimie, le textile ou la métallurgie.

Lire aussi : Croissance, inflation, emploi : ce que dit l’OCDE sur l’économie nationale

Inflation sous contrôle, confiance sur les marchés

Malgré la forte dynamique de la demande, les tensions inflationnistes restent contenues. L’inflation sous-jacente est tombée à 1,1% au deuxième trimestre, son plus bas niveau depuis 2021. L’inflation globale a été limitée à +0,8%, après +2% au trimestre précédent, grâce à une baisse des prix de l’énergie (-2,2%) et à une stabilisation des prix alimentaires (+1,4%). La décélération des prix a été favorisée par une amélioration de l’offre (œufs, poissons, légumineuses) et par le repli des cours mondiaux du pétrole et du gaz.

Ce climat a permis à Bank Al-Maghrib de maintenir son taux directeur à 2,25%, après l’avoir abaissé de 25 points de base au premier trimestre. Les taux d’intérêt sur les bons du Trésor ont reculé jusqu’à -92 points de base pour les titres à 5 ans, et le marché interbancaire s’est aligné sur le taux directeur.

Sur le marché financier, la dynamique est remarquable. L’indice MASI a grimpé de 37,6% en glissement annuel au deuxième trimestre, avec une hausse de 38,6% de la capitalisation boursière. Cette progression est portée par les secteurs industriels, la santé, l’énergie, les mines et la promotion immobilière. La liquidité boursière s’est améliorée (+25% de volume échangé), signal d’un regain de confiance des investisseurs.

Perspectives contrastées au second semestre

Pour le troisième trimestre 2025, les projections du HCP anticipent une croissance du PIB de +4,4%, marquant une légère décélération par rapport aux deux premiers trimestres. Cette progression resterait principalement alimentée par la demande intérieure, dont la contribution serait de +6,6 points, portée par la consommation des ménages et la poursuite de l’effort d’investissement public et privé.

Toutefois, plusieurs risques conjoncturels pèsent sur le scénario de croissance. La faiblesse persistante de la demande extérieure, accentuée par le ralentissement de l’économie européenne et les tensions commerciales, notamment les droits de douane imposés par les États-Unis sur les produits européens, pourrait impacter négativement les secteurs marocains orientés vers l’export, en particulier l’automobile, la chimie, le textile et la métallurgie. À cela s’ajoute le risque climatique : des vagues de chaleur durant l’été pourraient affecter plus sévèrement la production animale, déjà en repli conjoncturel.

Malgré ce contexte incertain, les tensions inflationnistes devraient rester contenues. En l’absence de perturbations majeures sur l’offre des produits alimentaires, l’inflation globale est attendue à 1,1% au troisième trimestre 2025, tandis que l’inflation sous-jacente, qui exclut les produits pétroliers, les produits volatils et les tarifs régulés, avoisinerait les 0,8%. Ce recul confirmé de l’inflation témoigne de la détente des coûts de production et du bon fonctionnement des circuits d’approvisionnement, soutenu notamment par le repli des prix mondiaux du pétrole.

À l’inverse, certains facteurs positifs pourraient soutenir davantage l’activité : une reprise du secteur agroalimentaire, grâce à la relance des industries de transformation (céréales, conserves de poissons), renforcerait les performances industrielles. Une poursuite de la baisse des prix internationaux du pétrole, en dessous du seuil de 70 dollars le baril, contribuerait également à limiter les coûts d’importation et à maintenir le pouvoir d’achat des ménages, sous réserve d’un contexte géopolitique stable.

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