Il y a quelque chose de troublant, ces derniers temps, dans la vie publique marocaine. Une sorte de bruit de fond permanent. On s’habitue presque à ce que, chaque semaine ou presque, une nouvelle affaire éclate : fuite interne, rapport oublié dans un tiroir, décision prise dans la précipitation, soupçon de conflit d’intérêts… Ce n’est même plus une suite de scandales, c’est devenu une météo. « Aujourd’hui : légère tempête institutionnelle, éclaircies en fin de journée ».
Le plus inquiétant, c’est d’observer la réaction des citoyens. On ne s’emporte plus, on ne tombe plus des nues : on hausse les épaules. L’indignation a laissé place à une sorte de résignation ironique. Quand un nouveau dossier surgit, on entend des « tiens, encore ? » lancés comme on commenterait un embouteillage sur l’autoroute urbaine de Casablanca. Ce n’est pas seulement de la lassitude : c’est un signe de déconnexion profonde entre le public et ceux qui sont censés rendre des comptes.
À l’étranger, les médias panarabes et occidentaux s’empressent de traiter en profondeur ces affaires louches qui ternissent l’image du Royaume. Conflits d’intérêt des membres du gouvernement, détournements de fonds au sein des collectivités territoriales, malversations en tout genre dans les universités, fraudes fiscales organisées par les entreprises privées, irrégularités procédurales commises par les instances de régulation… Notre pays est devenu « la risée » du monde.
Le vrai problème n’est pas chaque scandale en soi, mais l’accumulation. À force de révélations successives, les institutions semblent subir les événements au lieu de les encadrer. On dirait que la transparence arrive par effraction, jamais par initiative. Et évidemment, cela nourrit une impression tenace : celle que tout se règle dans l’ombre, et que la lumière ne vient que lorsqu’un document fuit ou lorsqu’une affaire commence à trop faire de bruit.
L’impunité réelle ou supposée aggrave encore le sentiment général. Même quand des enquêtes sont annoncées, elles arrivent souvent tard, ou semblent limitées, et beaucoup ont l’impression qu’on cherche plus à éteindre un feu qu’à comprendre pourquoi des étincelles jaillissent partout dans la maison. Pendant ce temps, la confiance publique s’effrite, grain par grain.
Sur le terrain politique, ces secousses en série compliquent tout. Ils parasitent l’action gouvernementale, donnent aux oppositions des munitions qu’elles utilisent… plus ou moins habilement, il faut le reconnaître. Et surtout, ils détournent l’attention des dossiers essentiels. Le débat public se transforme en gestion de crises successives, comme si l’on tentait de réparer une toiture sous une pluie incessante.
Pourtant, paradoxalement, ces affaires pourraient être une opportunité. Le Maroc ne manque ni de lois, ni de structures de contrôle, ni de discours sur la gouvernance. Ce qui manque, c’est le passage de la théorie à la pratique : une volonté ferme, une constance, et peut-être surtout une culture de la responsabilité qui ne s’active pas seulement quand un scandale éclate.
Reste une question, la vraie : combien de temps un pays peut-il avancer avec une confiance affaiblie ? Les scandales ne sont pas qu’un symptôme, ils deviennent un environnement. Et un environnement qui s’installe trop longtemps finit toujours par façonner le paysage politique. Pour le meilleur… ou, plus souvent, pour le pire.
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