Changer d’heure, à quel prix pour notre santé ?

Avatar de Mouna Aghlal
Temps de lecture :

Le changement d'heure et ses impacts sur la santé : analyse des choix pour le MarocPhoto illustration. © DR

A
A
A
A
A

Le changement d’heure est une pratique adoptée par de nombreux pays à des fins économiques et sociales, mais ses effets sur la santé humaine suscitent de plus en plus de préoccupations. Si cette mesure est justifiée par la volonté d’optimiser l’utilisation de la lumière du jour, elle perturbe en réalité le système circadien, cet ensemble de mécanismes biologiques qui régule nos rythmes quotidiens. Les conséquences sont multiples : troubles du sommeil, baisse de la vigilance et augmentation du risque d’accidents de travail ou de la route. Dans le contexte marocain, où le changement d’heure est pratiqué tout au long de l’année, il est crucial de s’interroger sur les répercussions de cette politique sur la santé publique.

Les experts en chronobiologie, ainsi que de nombreuses études scientifiques, s’accordent à dire que le maintien de l’heure d’hiver, plutôt que l’heure d’été, serait le choix le plus bénéfique pour la santé humaine. En effet, le corps humain est naturellement synchronisé avec le cycle de la lumière et de l’obscurité, et des perturbations régulières de ce cycle peuvent avoir des effets délétères. Dans cet article, lebrief.ma explore les différentes options de changement d’heure envisagées pour le Maroc, en examinant leurs impacts sur la santé publique.

Les quatre options pour le Maroc : une perspective santé

Le Dr. Tayeb Hamdi, médecin et chercheur en politiques de santé, propose une analyse des différentes options envisageables pour le Maroc en matière de changement d’heure. Selon lui, le choix de l’heure à adopter doit prendre en compte plusieurs facteurs, mais l’impact sur la santé semble primordial. En l’absence d’une décision définitive, le pays a actuellement recours à l’heure d’été toute l’année, avec un changement de l’heure lors du mois du Ramadan. Le Maroc a ainsi quelques scénarios potentiels.

D’abord, l’heure d’hiver toute l’année. Cette option est considérée comme la meilleure pour la santé, puisqu’elle respecte le rythme biologique humain. Elle favorise une meilleure synchronisation de l’horloge interne du corps humain, notamment grâce à l’exposition à la lumière naturelle le matin. Sinon, l’heure d’été toute l’année. Bien que ce choix soit adapté aux besoins économiques et sociaux, il perturbe le sommeil et le rythme biologique, entraînant des effets négatifs, comme des réveils précoces en hiver et des nuits plus courtes en été.

Lire aussi: Santé : accélération des réformes pour les professionnels du secteur

Toutefois, le pays peut aussi alterner le changement d’heure deux fois par an entre l’hiver et le printemps. Bien que ce scénario permette un certain compromis, il entraîne cependant une perturbation régulière du corps humain, avec des périodes d’adaptation qui peuvent durer plusieurs jours, voire semaines, ajoute l’expert. Ou encore, le changement d’heure biannuel avec un court intervalle de 6 semaines. Ce scénario est jugé le moins favorable pour la santé en raison des effets combinés du passage à l’heure d’été et de l’intervalle très court entre les changements d’heure, perturbant gravement l’adaptation de l’organisme. Selon le Dr Hamdi, l’heure d’hiver toute l’année semble être le choix le plus respectueux de la santé humaine, tandis que le scénario actuel, qui inclut des changements d’heure fréquents, semble le plus nuisible.

Les conséquences physiologiques du changement d’heure

Par ailleurs, les effets du changement d’heure sur la santé ont été largement documentés par la littérature scientifique, comme le souligne l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM). Le changement d’heure perturbe l’horloge biologique interne, ou système circadien, qui régule de nombreux processus physiologiques, y compris le sommeil, la vigilance, et même certaines fonctions cardiovasculaires.

L’adaptation à ce changement varie d’un individu à l’autre. Alors que certaines personnes peuvent s’adapter en quelques jours, d’autres, notamment les enfants, les personnes âgées et les individus souffrant de troubles du sommeil, peuvent mettre plusieurs semaines pour retrouver un équilibre, souligne l’INSERM. Ces perturbations peuvent entraîner des effets négatifs tels que des troubles du sommeil, une baisse de vigilance, une augmentation des risques d’accidents (travail, route), ainsi que des conséquences plus graves, comme des infarctus du myocarde ou des AVC.

Un aspect particulièrement problématique du changement d’heure est le passage à l’heure d’été qui est plus difficile à gérer pour l’organisme que le retour à l’heure d’hiver. En effet, en avançant l’heure d’une heure, le corps humain doit ajuster son rythme circadien, une tâche particulièrement ardue pour les personnes dont le rythme est naturellement retardé. Ces effets sont accentués par le manque de sommeil généralisé au sein de la population.

Heure d’été vs heure d’hiver : quel choix pour la santé ?

La question de l’heure d’été vs l’heure d’hiver a été au centre du débat. Étant donné que la majorité des experts soutient le maintien de l’heure d’hiver, estimant que cela permettrait de mieux aligner l’horloge biologique de la population avec les cycles naturels de la lumière. Le principal argument en faveur de l’heure d’hiver est la synchronisation de l’horloge biologique grâce à l’exposition à la lumière naturelle. En hiver, l’heure d’hiver permet un lever du soleil plus tôt, offrant ainsi une lumière naturelle au moment où le corps en a besoin pour commencer la journée.

Lire aussi: Le jeûne, un allié méconnu pour la santé

À l’inverse, si l’heure d’été était maintenue toute l’année, les jours d’hiver commenceraient beaucoup plus tard, ce qui priverait le corps de cette lumière vitale. Ce manque de lumière le matin pourrait avoir des effets néfastes sur la santé, notamment en perturbant le sommeil et en augmentant les risques de dépression et d’autres troubles liés à la lumière.

Dans le cas spécifique du Maroc, le choix d’adopter l’heure d’été toute l’année soulève des préoccupations sanitaires. Le pays, qui oscille entre l’heure d’hiver et l’heure d’été, semble actuellement privilégier une approche pragmatique, mais cette stratégie peut nuire à la santé publique à long terme. Le maintien de l’heure d’été, combiné aux ajustements fréquents liés au Ramadan, perturbe les rythmes biologiques de la population, surtout des plus vulnérables.

Les enfants, les personnes âgées et ceux souffrant de troubles du sommeil, qui sont déjà plus sensibles aux changements d’heure, pourraient connaître des conséquences graves sur leur santé. De plus, les effets des changements fréquents d’heure peuvent avoir des répercussions économiques et sociales, notamment une baisse de la productivité et un accroissement des risques d’accidents. Dans ce contexte, un passage définitif à l’heure d’hiver semble être la solution la plus bénéfique pour la santé publique marocaine.

 

Le changement d’heure est une pratique qui, bien qu’elle ait des justifications économiques et sociales, a des effets significatifs sur la santé humaine. Les recherches scientifiques pointent principalement les effets négatifs du passage à l’heure d’été, notamment sur le sommeil et la synchronisation des rythmes biologiques. Dans le cas du Maroc, il est crucial de considérer les impacts sanitaires à long terme et de reconsidérer la stratégie actuelle. L’adoption de l’heure d’hiver toute l’année semble être la meilleure option pour préserver la santé de la population, en minimisant les perturbations sur le système circadien et en favorisant une meilleure qualité de vie.

Dernier articles
Les articles les plus lu
Lancement de la plateforme nationale de surveillance des décès maternels

Société - Découvrez la nouvelle plateforme pour le suivi des décès maternels, lancée par le ministère de la Santé à Rabat.

Mouna Aghlal - 20 novembre 2025
Le Procureur général du Roi communique sur les nouvelles dispositions du Code de procédure pénale

Politique - Le Procureur général du Roi présente des changements clés pour les parquets du Royaume. Découvrez les implications essentielles.

Mouna Aghlal - 20 novembre 2025
CNSS : lancement du contrôle de scolarité 2025-2026 pour les enfants bénéficiaires

Société - Les parents ou tuteurs doivent impérativement déposer un certificat de scolarité dans un délai d’un mois via le service en ligne « Taawidaty ».

Rédaction LeBrief - 20 novembre 2025
Vidéo virale d’un enfant agressé : le démenti de la DGSN

Société - La DGSN dément une vidéo montrant un enfant agressé, faussement attribuée à une école marocaine, et confirme qu’elle provient d’un pays asiatique.

Hajar Toufik - 20 novembre 2025
Affaire chlorure de potassium : carte de la transparence… ou diversion ?

Société - La tutelle plaide la pénurie de chlorure de potassium, l'opposition veut les détails de chaque appel d'offre octroyé par l'AMMPS.

Rédaction LeBrief - 20 novembre 2025
La coordination syndicale de la santé conditionne son retour au dialogue

Société - La coordination syndicale du secteur de la santé refuse toute rencontre avec le ministère tant qu’un calendrier précis n’est pas fixé pour valider les décrets liés à l’accord du 23 juillet 2025.

Ilyasse Rhamir - 19 novembre 2025
Voir plus
Manifestations de la « GenZ 212 » : 60 personnalités marocaines exhortent le Roi à engager des réformes profondes

Société - Soixante figures marocaines appellent le roi Mohammed VI à lancer des réformes profondes en phase avec les revendications de la jeunesse.

Hajar Toufik - 8 octobre 2025
Travaux : les Casablancais n’en peuvent plus !

Dossier - Des piétons qui traversent d’un trottoir à l’autre, des voitures qui zigzaguent… À croire que les Casablancais vivent dans un jeu vidéo, sans bouton pause.

Sabrina El Faiz - 12 avril 2025
Manifestations de la « GenZ 212 » : appel à boycotter les entreprises liées à Akhannouch

Société - Les manifestations de la « GenZ 212 », poursuivent leur mobilisation à travers un appel au boycott des entreprises liées à Aziz Akhannouch.

Ilyasse Rhamir - 7 octobre 2025
Mariages marocains : l’amour au prix fort

Société - Au Maroc, on peut rater son permis de conduire, son bac… Mais rater son mariage ? Inenvisageable !

Sabrina El Faiz - 23 août 2025
La classe moyenne marocaine existe-t-elle encore ?

Dossier - Au Maroc, pour définir le terme classe moyenne, nous parlons de revenus. Cela ne veut pourtant plus rien dire.

Sabrina El Faiz - 5 juillet 2025
Faux et usage de faux, la dangereuse fabrique de l’illusion

Dossier - Un faux témoignage peut envoyer un innocent en prison ou blanchir un coupable. Un faux diplôme casse la méritocratie. Un faux certificat peut éviter une sentence.

Sabrina El Faiz - 24 mai 2025
pub

Un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire