Photo illustration © DR
A
A
A
A
Mais derrière ces chiffres flatteurs se cachent de profondes fragilités : dépendance excessive aux matières premières importées, compétitivité en baisse face à l’Asie, organisation productive obsolète, poids croissant du secteur informel. C’est dans ce contexte que l’Organisation internationale du Travail (OIT), avec le soutien de l’Union européenne, a lancé une étude approfondie dans le cadre du programme Travera. Celle-ci analyse en détail la chaîne de valeur du secteur de la maille, de la matière première importée jusqu’au produit fini exporté, afin d’identifier les leviers de modernisation, les zones de blocage et les opportunités de création d’emplois décents. Menée en 2023 et 2024, cette enquête s’appuie sur une méthodologie participative, associant acteurs publics, fédérations professionnelles, entreprises de toutes tailles et syndicats.
Un poids économique significatif, mais une structure fragile
Le secteur de la bonneterie contribue de manière significative à l’économie marocaine. En 2023, il affichait un chiffre d’affaires à l’export de 8,9 milliards de dirhams et employait près de 200.000 personnes, dont 70% de femmes. Mais cette vitalité apparente masque des fragilités structurelles.
Tout d’abord, le secteur dépend massivement des importations pour ses matières premières : 85% des intrants sont importés, essentiellement de Turquie et de Chine. Ce déséquilibre affaiblit la compétitivité de l’offre marocaine, notamment en période de perturbations des chaînes logistiques mondiales.
Lire aussi: Maroc-Chine : rencontre stratégique dans le secteur textile
Par ailleurs, la branche souffre d’un amont industriel sinistré. De nombreuses filatures marocaines, jadis prospères, ont disparu, victimes d’une libéralisation excessive, d’un manque d’investissements et de la concurrence étrangère. Aujourd’hui, l’essentiel de l’activité se concentre sur la confection, avec une valeur ajoutée limitée.
L’export, locomotive à double tranchant
Toutefois, le secteur de la maille est orienté à 95% vers l’export, avec une forte dépendance à l’égard de l’Espagne, qui absorbe 61% des exportations, principalement grâce au géant Inditex, propriétaire des enseignes Zara, Bershka, Massimo Dutti, entre autres. Ce partenariat privilégié permet au Maroc de répondre aux exigences du marché européen en termes de délais et de qualité.
Cependant, cette position de sous-traitant, souvent rémunérée à la tâche dans un cadre précaire, freine la montée en gamme des entreprises marocaines. Le modèle dominant de la fast fashion, déjà remis en question sur les plans environnemental et éthique, rend les acteurs nationaux vulnérables face aux fluctuations de la demande et à la baisse des marges.
Lire aussi: Shanghai : Akhannouch rencontre le président de Sunrise, leader mondial du textile
Défis environnementaux et sociaux majeurs
Le rapport pointe également du doigt les faibles performances environnementales du secteur. Peu d’entreprises respectent les normes européennes en matière de gestion des déchets, d’usage des énergies renouvelables ou de traçabilité. Or, ces critères deviennent incontournables pour accéder aux marchés internationaux.
Sur le plan social, si la bonneterie joue un rôle central dans l’intégration des femmes et des jeunes en milieu urbain et périurbain, les conditions de travail restent souvent précaires, avec des salaires faibles, de longues heures de travail et un poids important du secteur informel. La formalisation de l’emploi et l’amélioration des conditions de travail constituent des axes prioritaires pour renforcer l’impact positif de la filière.
Lire aussi: Textile : très fort recul des exportations vers l’UE
Des opportunités à saisir : formation, innovation et revalorisation locale
Malgré les obstacles, le rapport met en lumière plusieurs leviers de transformation. L’un des principaux est la polyvalence de la main-d’œuvre. La majorité des lignes de production fonctionnent avec des ouvrières peu formées à plusieurs postes, ce qui limite la productivité. Des investissements dans la formation professionnelle permettraient d’accroître l’efficacité, de réduire les coûts et d’améliorer les délais de livraison.
De plus, l’étude recommande de valoriser les marques locales et de renforcer le branding Made in Morocco. Actuellement, le marché intérieur est dominé à 90 % par des produits importés, en raison du manque de marques nationales compétitives. Une montée en puissance du design, de l’innovation et du marketing numérique pourrait changer la donne.
Enfin, la création de zones industrielles intégrées, combinée à une meilleure gouvernance sectorielle et à des incitations à l’investissement vert, permettrait de repositionner le Maroc sur une trajectoire de développement durable.
L’étude TRAVERA dresse un portrait nuancé du secteur de la bonneterie au Maroc, une filière à fort potentiel, mais prisonnière d’un modèle productif obsolète, trop dépendant de l’étranger et peu intégrée localement. Pour que la maille marocaine devienne un vecteur durable de croissance et d’emploi décent, une transformation en profondeur s’impose : relocalisation d’une partie de l’amont, montée en compétences de la main-d’œuvre, digitalisation, innovation et respect accru des normes sociales et environnementales.
HCP : la confiance des ménages s’améliore au T2-2025
Économie - Au deuxième trimestre 2025, l’indice de confiance des ménages s’est amélioré à 54,6 points, selon le HCP.
Mbaye Gueye - 19 juillet 2025BTP : le Maroc bétonne ses règles
Dossier - Pas d’attestation, pas de chantier. C’est simple, non ? Pas de couverture décennale, pas de livraison. N'y réfléchissons pas trop !
Sabrina El Faiz - 19 juillet 2025Saham Bank décroche 55 M€ pour booster la transition énergétique au Maroc
Économie - Saham Bank obtient 55 millions d’euros de la BERD pour financer des projets privés liés à la transition énergétique au Maroc, avec le soutien de l’UE, du GCF et du Canada.
Rédaction LeBrief - 18 juillet 2025Port d’Essaouira en recul : les débarquements en forte baisse
Économie - Le port d’Essaouira enregistre une forte baisse de ses débarquements halieutiques au premier semestre 2025.
Ilyasse Rhamir - 18 juillet 2025Marrakech : progression des nuitées touristiques à fin avril
Économie - Les établissements touristiques de Marrakech enregistrent une croissance notable de leur fréquentation, avec une hausse de 8% des nuitées à fin avril.
Ilyasse Rhamir - 18 juillet 2025Le Morocco Today Forum 2025 s’ouvre à Rabat sous le signe du Mondial
Économie - Le Morocco Today Forum réunit à Rabat décideurs et experts autour du Mondial 2030. Un moment important pour penser un nouveau Maroc.
Ilyasse Rhamir - 18 juillet 2025Coût, impact… tout savoir sur la nouvelle LGV Kénitra-Marrakech
Économie - Le Maroc lance l’extension de sa LGV vers Marrakech, un projet structurant qui transformera durablement la mobilité, l’économie et la connectivité entre les grandes villes.
Hajar Toufik - 25 avril 2025Où en est l’avancement du gazoduc Nigeria-Maroc ?
Afrique, Économie - Le projet de gazoduc Nigeria-Maroc progresse : 13 pays engagés, signature intergouvernementale à venir et lancement d’un premier tronçon entre Nador et Dakhla.
Hajar Toufik - 14 juillet 2025Télécoms : en route vers un duopole ?
Dossier - Un accord entre Télécoms c’est toujours bon à prendre, mais qu’est-ce que cela engendre pour le consommateur final ?
Sabrina El Faiz - 28 juin 2025Hard-discount toujours plus bas, mais à quel prix ?
Dossier - Le hard-discount a-t-il trouvé LA recette miracle pour proposer LA bonne affaire ? Pas sûr… la lame peut être à double tranchant.
Sabrina El Faiz - 7 décembre 2024Gestion de l’eau : quand une goutte vaut de l’or
Dossier - Frappé de plein fouet par le stress hydrique, le Maroc réinvente sa stratégie de gestion de l’eau, entre dessalement, interconnexion des bassins et réformes agricoles.
Mbaye Gueye - 26 avril 2025Nouaceur : la gare LGV reliée au nouveau terminal de l’aéroport Mohammed V
Économie - La future gare LGV de Nouaceur prendra place entre l’aéroport Mohammed V et le parc Zaouia Casa Diaa.
Ilyasse Rhamir - 5 juin 2025