CAN 2025 : le Maroc est-il en train de redéfinir son modèle touristique ?

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CAN 2025 : le Maroc est-il en train de redéfinir son modèle touristique ?Le Maroc hôte de la CAN 2025 © DR

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À moins d’un mois du lancement de la CAN, le Royaume enregistre un engouement sans précédent. Une occasion unique de tester une double haute saison touristique. Les détails. 

À 24 jours du coup d’envoi de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN 2025), prévue du 21 décembre 2025 au 18 janvier 2026, le Maroc se prépare à vivre une dynamique sans précédent. Avec déjà 800.000 billets écoulés, selon Fouzi Lekjaâ, président de la Fédération royale marocaine de football (FRMF), et la possibilité d’atteindre un million d’ici la fin du mois, le pays voit se dessiner un afflux exceptionnel de visiteurs.

Une conjoncture qui incite les acteurs du secteur à envisager une véritable double saison touristique : une première durant la CAN et la seconde à l’été, comme chaque année. Pour l’expert touristique Saïd Tahiri, cette configuration pourrait bien inaugurer un tournant majeur pour la stratégie nationale.

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Une dynamique exceptionnelle dès décembre

Traditionnellement, le mois de décembre constitue déjà une période forte pour le tourisme national, tandis que la basse saison démarre habituellement dès la première semaine de janvier. Mais l’organisation de la CAN change totalement la donne.Saïd Tahiri observe un phénomène inédit : « Décembre est à la base une haute saison, mais l’arrivée des supporters va être très positive. Nous assistons à une dynamique extraordinaire, une impulsion réelle », souligne-t-il.

Selon lui, les réservations affluent « de différents pays de la diaspora africaine et d’Afrique », avec la constitution de nombreux groupes désireux de séjourner au Maroc pendant toute la compétition. Les villes hôtes connaissent un engouement supérieur « à celui des dernières années ». En conséquence, Tahiri estime que cette énergie ne s’éteindra pas après les fêtes de fin d’année : « Cet engouement va rester jusqu’à mi-janvier, alors qu’à la base, la basse saison démarre la première semaine de janvier. Là, elle va être prolongée et augmentée ».

Lire aussi : Le Maroc ambitionne de renforcer la dynamique touristique à l’horizon 2030 

Billets écoulés, stades pleins et pression touristique

L’annonce de Fouzi Lekjaâ renforce cette perspective. Lors d’une conférence au Complexe Mohammed VI de football, il a confirmé que plus de 800.000 billets avaient déjà trouvé preneur, et que tous les matchs de la sélection nationale se joueront à guichets fermés.

Les rencontres de l’Algérie, de la Côte d’Ivoire, du Cameroun et du Sénégal affichent, elles aussi, complet. La CAF avait déjà signalé, à la mi-novembre, l’épuisement des billets lors de la Phase 3 de vente concernant le Maroc et l’Algérie.

Dans ce contexte, les experts s’attendent à un afflux massif de visiteurs africains, mais aussi internationaux. L’impact touristique sera particulièrement visible dans les métropoles accueillant les matchs, où les taux d’occupation pourraient frôler la saturation lors des pics de la compétition.

Faire de la CAN un levier durable, le vrai défi

Mais pour Saïd Tahiri, l’enjeu dépasse largement l’événement sportif. La véritable question est de savoir si cette effervescence pourra servir de fondation pour installer durablement une saison touristique hivernale.

« C’est là tout le défi : ne pas faire de cet événement un moment passager qui va avoir lieu et disparaître par la suite. L’exemple de l’Espagne de 1992 est instructif », rappelle-t-il. Les retombées structurantes des Jeux olympiques de Barcelone montrent, selon lui, qu’un grand événement peut reconfigurer l’image d’une destination si les acteurs savent en tirer parti.

Il insiste sur la nécessité de consolider cette opportunité. « Le défi pour la destination Maroc est de faire de cet événement un stimulateur. Il faut instaurer le Maroc comme une véritable destination culturelle et créer une dynamique durable. L’ingéniosité de nos opérateurs touristiques sera déterminante ».

Pour cela, il est essentiel de renforcer l’attractivité globale du pays, afin que les visiteurs ne se limitent pas aux villes hôtes ou aux stades. D’ailleurs, l’une des grandes questions est de savoir si toutes les régions du Royaume pourront bénéficier de cet afflux. Tahiri reste lucide : « Les villes hôtes profiteront davantage. Mais notre ingéniosité doit consister à préparer des circuits pour que les visiteurs puissent aller dans les régions ».

Cela implique une coordination plus fine entre opérateurs, agences de voyages, hébergeurs et institutions, afin de proposer des offres complémentaires : circuits culturels, découverte des montagnes en hiver, tourismes sportifs ou écologiques et gastronomie régionale, entre autres.

Des projections ambitieuses pour 2025 et 2026

Cette dynamique n’est pas sans impact sur les prévisions. Le Royaume a accueilli près de 17,4 millions de touristes à fin décembre 2024. Pour Saïd Tahiri, les ambitions doivent désormais être revues à la hausse. « Cette année, nous pouvons atteindre 18 millions. Peut-être même 20 millions d’ici la fin d’année. L’important est de ne pas retomber sous ces chiffres l’année suivante », prévoit-il.

Si la tendance se confirme, le Maroc pourrait entrer dans une nouvelle ère touristique, marquée par deux pics majeurs : un premier en hiver grâce à la CAN et, potentiellement, un second l’été suivant. Cette configuration renforcerait la visibilité du Royaume et atténuerait l’effet de saisonnalité qui fragilise encore certains territoires.

Mais la réussite dépendra de la capacité des acteurs à capitaliser sur cette effervescence et à la transformer en acquis durables. Comme le résume Tahiri : « Il faut nous habituer à être une véritable destination touristique ».

La CAN 2025 sera, à cet égard, un test grandeur nature.

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