Banque participative : de timide à intimidante ?

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Banque participative : de timide à intimidante ?Présentation du rapport annuel sur la supervision bancaire 2024 de Bank Al‑Maghrib, par Nabil Badr, directeur adjoint de la supervision bancaire, à Casablanca, le 24 juillet 2025 © BAM

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Ça a mis du temps, mais finalement, on y est. Le pari participatif a fini par porter ses fruits. En 2024, les banques participatives ont fini par briser le plafond de verre tant attendu. Pour la première fois, elles ont réussi à équilibrer leurs comptes. Depuis le temps que tout le secteur l’attendait… 2017 !

Les chiffres sont tombés. Annoncés à Casablanca par Nabil Badr, adjoint du responsable de la direction Supervision bancaire, les chiffres publiés dans le Rapport annuel sur la supervision bancaire 2024 de Bank Al‑Maghrib donnent la mesure d’un secteur qui, à priori, se porte bien. Un bilan total de 38,9 milliards de dirhams en progression de 19% sur un an, des financements atteignant 25,8 milliards, des dépôts à hauteur de 12,1 milliards, un produit net bancaire de 1 milliard et un résultat net positif d’environ 100 millions de dirhams, le tout avec un taux de créances en souffrance limité à 1,2%, bien inférieur à celui observé dans les banques conventionnelles !

Au niveau du système bancaire marocain, cette branche est encore un peu marginale puisque ses actifs ne représentent que 2% du total. Mais ne parlons plus de viabilité du modèle, il a clairement démontré ses options et ses limites. Parlons désormais de changement d’échelle en touchant de nouveaux segments comme les TPE, les PME ou encore les corporate mid-cap, en diversifiant l’offre de produits et en renforçant les canaux digitaux pour sortir d’un modèle encore trop concentré sur quelques produits phares.

Cette progression est d’autant plus intéressante lorsqu’on sait qu’elle intervient dans un contexte où le secteur bancaire, bien que solide, demeure confronté à un ralentissement global de la demande de crédit des ménages, ainsi qu’aux indicateurs inflationnistes.

Après quelques années de croissance plutôt timide, le PNB est passé de 0,7 milliard de dirhams en 2022 à 0,8 milliard en 2023, à 1 milliard en 2024. Léger, mais résultat net tout de même positif et annonciateur d’une belle lancée.

Lire aussi : Monnaie digitale : Bank Al-Maghrib teste les paiements entre particuliers

Il faut dire que la banque participative a pris la route doucement, mais sûrement. Cette bascule haussière tient à l’effet volume avec une hausse de plus de 20% des financements et une progression de 32,9% des dépôts, mais aussi à un coût du risque maîtrisé grâce à un taux de défaut exceptionnellement bas et à une rigueur d’octroi des crédits, ainsi qu’à des investissements initiaux désormais amortis qui permettent d’absorber les charges fixes.

Autre fait intéressant, la banque profite d’une forte fidélité de ses clients. En effet, la collecte de dépôts s’est établie à 12,1 milliards de dirhams. Mais le mix de ressources reste encore à optimiser, notamment pour mobiliser une épargne plus longue et ainsi financer des crédits à longue maturité.

L’atout de cette banque se retrouve aussi dans la qualité de ses actifs avec un taux de créances en souffrance de 1,2%, bien en deçà des 8,4% enregistrés par les banques conventionnelles. Mais rappelons que ce ratio, bien que flatteur, doit être pris avec des pincettes, vu que les portefeuilles sont jeunes et essentiellement concentrés sur des produits immobiliers ou de consommation à faible risque.

Une concurrence qui pourrait passer au second plan

La banque participative en est donc à cette étape où elle doit élargir l’appétit au risque tout en sauvegardant la qualité actuelle qui plaît tant à ses clients.

Quant au réseau, avec 206 agences dont 64% concentrées dans les régions Casablanca‑Settat, Rabat‑Salé‑Kénitra et Fès‑Meknès, il demeure fortement urbain. La question de l’inclusion participative se pose donc. La digitalisation pourrait être une réponse probable et rapide à cette problématique.

La concurrence avec les banques conventionnelles est évidemment toujours présente, étant donné que celles-ci renforcent leurs fondamentaux, affichant des ratios de solvabilité solides et une rentabilité en forte hausse. Les banques conventionnelles investissent en masse dans la digitalisation des services, avec des offres spéciales PME et des services de bancassurance intégrés. La banque participative doit donc se différencier autrement, qu’il s’agisse de leasing participatif, de solutions de trade finance islamique ou de bancassurance Takaful.

Depuis peu, l’accent est mis sur la finance durable et la cybersécurité, autant d’opportunités pour les banques participatives de se positionner sur des niches émergentes comme les green sukuk ou les produits de financement alignés sur les objectifs climatiques. Cela lui permettra de combiner les principes éthiques de la finance islamique avec les impératifs environnementaux mondiaux.

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