AIF 2025 : face aux défis, l’Afrique redéfinit sa stratégie d’investissement
Panel de discussion entre plusieurs ministres africains organisé lors de la première journée de l'AIF 2025, 26 novembre 2025 à Rabat © LeBrief
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Dès l’ouverture, la ministre ivoirienne du Plan, Nialé Kaba, a rappelé le basculement en cours : la diminution des financements concessionnels pousse les États à se tourner avec détermination vers les investisseurs privés. La Côte d’Ivoire a, selon elle, engagé cette dynamique depuis 2012, en modernisant son code des investissements, en révisant plusieurs codes sectoriels (mines, tourisme, télécoms, forêts) et en simplifiant les procédures. Résultat : la part de l’investissement privé dans le PIB est passée d’environ 10% en 2012 à 20%.
Mais les ambitions vont plus loin. À l’horizon 2030, Abidjan vise un taux de 20% d’investissement privé dans le PIB, en renforçant encore la stabilité macroéconomique et la fluidité administrative, deux leviers jugés essentiels pour rassurer les investisseurs. Cette volonté de rendre les projets plus rapides et plus prévisibles est partagée sur l’ensemble du continent.
Maroc : une gestion maîtrisée du marché des changes pour rassurer les investisseurs
Hôte du forum, la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, a détaillé les choix stratégiques opérés par Rabat : modernisation progressive du régime de change, élargissement de la bande de fluctuation du dirham (2018, 2020), développement de produits dérivés pour le marché interbancaire et coordination étroite entre les politiques publiques et la Banque centrale.
Avec 5,5 mois de couverture des importations, une diversification de ses recettes en devises (exportations, tourisme, transferts) et un ciblage progressif de l’inflation prévu pour 2025, le Maroc entend offrir un environnement stable, prévisible et moderne aux investisseurs étrangers.
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Guinée : le pari transformateur des grands partenariats public-privé
Le ministre guinéen Ismaël Nabé a illustré la puissance des partenariats public-privé (PPP) en revenant sur l’immense projet minier et logistique de Simandou, un investissement de près de 20 milliards de dollars. Grâce à une coordination étroite, pilotée depuis une cellule dédiée au sein de la présidence, le pays a inauguré un chemin de fer de 650 kilomètres et un port polyvalent, marquant une avancée historique pour un projet envisagé depuis plus de quarante ans.
Riche en gisements miniers et en ressources hydriques, la Guinée veut transformer cet élan en moteur de développement national. Le ministre a rappelé que plus de 60% du financement nécessaire à la vision Guinée 2040 — estimée à 200 milliards de dollars — devra provenir du secteur privé. Une ambition soutenue par des indicateurs encourageants : un PIB réévalué à la hausse (+51,2%), une inflation ramenée à 3%, une dette équivalant à environ 30% du PIB et une croissance attendue de plus de 7%, pouvant atteindre 11% l’année suivante.
Éthiopie : les réformes comme moteur d’un nouveau cycle d’investissement
Ahmed Shide, ministre éthiopien des Finances, a défendu une stratégie fondée sur des réformes structurelles profondes : modernisation du système monétaire et douanier, ouverture de secteurs clés et création d’une bourse nationale (Ethiopian Securities Exchange). L’objectif est clair : faire du secteur privé le moteur du prochain cycle de croissance.
L’Éthiopie mise également sur des projets emblématiques. Parmi eux, le futur aéroport international de Bishoftu, présenté comme un hub logistique continental, s’appuie sur des montages financiers innovants, tels que la titrisation de recettes futures, le blended finance ou encore les garanties visant à réduire le risque pour les investisseurs privés.
Shide insiste : l’alignement des politiques nationales avec les cadres régionaux — tels que l’AFCFTA, l’IGAD ou le COMESA — est essentiel pour offrir aux investisseurs un accès plus large aux marchés régionaux et aux chaînes de valeur multi-pays.
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Mauritanie : sécuriser l’investissement par un cadre juridique solide
Le ministre mauritanien de l’Économie, Abdallah Souleyman Cheikh Sidia, a replacé les PPP au cœur de la stratégie nationale. Face à l’impossibilité de financer seul les infrastructures majeures — énergie, routes, ports — Nouakchott a adopté en 2024 une loi sur les PPP considérée comme l’une des plus protectrices au monde.
Cette législation garantit une forte stabilité juridique, interdit toute nationalisation des actifs et sécurise les paiements de l’État, même lorsque les besoins réels s’avèrent inférieurs aux prévisions initiales.
Pour la Mauritanie, cette approche vise à transformer le défi démographique africain en dividende, en développant les infrastructures indispensables à l’essor du secteur privé et à la création d’emplois.
Zambie : tirer les leçons d’une crise de la dette pour attirer le privé
La voix la plus directe fut sans doute celle du ministre zambien des Finances, Situmbeko Musokotwane. Rappelant que son pays fut le premier à faire défaut en 2020, il a décrit une nation en reconstruction grâce au secteur privé, après avoir tiré « la leçon amère » de l’endettement excessif.
La Zambie attire désormais des milliards via des partenariats public-privé : près de 2 milliards de dollars dans les infrastructures, notamment les autoroutes, et plus de 7 milliards dans les mines grâce à la valorisation de ressources comme le cuivre, le nickel ou le manganèse.
Mais les défis persistent : une crise énergétique aiguë limite l’accès à l’électricité à trois heures par jour dans certaines zones. Lusaka réagit en ouvrant totalement le secteur de l’énergie au privé, en accélérant la construction d’interconnexions régionales (vers la Tanzanie, l’Angola, la RDC) et en imposant des délais d’approbation des projets inférieurs à 45 jours. Le message du ministre est clair : « Le secteur privé doit nous aimer. Venez investir en Zambie ».
Au terme de ce panel, tous les ministres convergent sur un point : le Forum africain de l’investissement (AIF) est un catalyseur essentiel. Pour certains, il permet de structurer des projets bancables ; pour d’autres, de partager les réussites, de dupliquer les modèles efficaces ou encore de réduire les cycles de négociation.
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