Arnaud Blasquez Publié le 12/11/25 à 10:25
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Cop ou pas cop ?

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La COP30 s’est ouverte à Belém, aux portes de l’Amazonie brésilienne, où modernité et forêt se côtoient et où 60% de la population vit dans la pauvreté. Dans cette ville, symbole de nos contradictions, se joue une part du futur de l’humanité : choisir les orientations à donner à nos investissements, nos industries et notre commerce pour tenter de contenir le réchauffement climatique sous la barre fatidique des 2 °C d’ici 2100.

Les enjeux sont immenses. D’ici cinquante ans, plus de 200 millions de réfugiés climatiques pourraient être contraints de quitter leurs terres. Pendant ce temps, les sociétés occidentales, crispées sur leurs frontières, s’enferment dans un discours simpliste sur l’immigration, et les grands pollueurs tergiversent. Les États-Unis, deuxième émetteur mondial de CO₂ (très largement premier par habitant), n’ont pas envoyé de représentant de haut niveau à Belém.

Dix ans après l’Accord de Paris, le bilan est mitigé. Les promesses de neutralité carbone d’ici 2050 s’effilochent. Les émissions mondiales de CO₂ continuent d’augmenter, tirées par la croissance asiatique et la dépendance persistante aux énergies fossiles. Entre 2015 et 2025, la part des énergies fossiles dans le mix mondial a tout de même baissé de 81% à 58%. En parallèle, la demande électrique globale a explosé : 31 153 TWh consommés en 2024 contre 21 776 TWh dix ans plus tôt, alors que l’intelligence artificielle pourrait bouleverser la donne. Les datacenters consomment déjà 420 TWh par an, chiffre appelé à tripler d’ici 2030, risquant de relancer la dépendance aux hydrocarbures faute d’infrastructures vertes suffisantes.

Face à cette urgence, les COP se succèdent mais butent sur un obstacle majeur : la finance, qui oriente le monde vers la rentabilité court-termiste des projets carbonés au détriment des investissements durables. Une piste concrète consisterait à revoir les règles du jeu financier. À l’image de Bâle III pour la stabilité bancaire, on pourrait imposer plus de fonds propres aux banques finançant les activités fossiles et alléger ces exigences pour celles qui soutiennent les projets bas carbone. Ce levier réglementaire permettrait de modifier artificiellement la rentabilité des investissements et d’orienter les capitaux vers les solutions durables.

Fort de ce constat, les priorités de cette COP30 sont claires : accélérer les ambitions de décarbonation collectives, mobiliser une finance climatique et débloquer 1.300 milliards de dollars par an d’ici 2035 pour soutenir les pays en développement, stopper la déforestation, penser déjà l’adaptation au changement climatique irréversible.

Le tableau n’est pas aussi sombre qu’il peut paraître. Même si les retards s’accumulent et les alertes se multiplient, l’engagement demeure. Trente ans de COP et une mobilisation toujours importante, avec aujourd’hui une Chine désormais candidate au leadership de la transition énergétique. Les progrès sont fragiles, mais réels. Il faudra s’y accrocher, miser sur l’audace, et croire encore que la coopération peut l’emporter sur le cynisme de la finance.
Car c’est sans doute là que se joue tout, dans la capacité des dirigeants à transformer la logique du profit en instrument de transition. En seront-ils capables ?

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