CAN 2025 : un levier géopolitique pour le Maroc, bien plus que sportif
Cérémonie d'ouverture de la CAN 2025 © DR
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Lorsqu’il s’agit de la CAN 2025, le football apparaît comme un spectacle et un outil de cohésion symbolique, mais aussi un vecteur structurant de souveraineté, de crédibilité internationale et de projection géopolitique.
En effet, dans un contexte international marqué par l’érosion des normes, la fragmentation sécuritaire et la politisation croissante des grands rassemblements, la CAN 2025 est présentée comme une opération de légitimation stratégique.
Ainsi, l’événement met en évidence la capacité du Maroc à gérer des flux humains, symboliques et médiatiques complexes, tout en transformant une compétition sportive en mécanisme de stabilisation et de lisibilité internationale, écrit Cherkaoui Roudani dans son analyse.
Le sport comme instrument de crédibilité étatique
Selon Cherkaoui Roudani, spécialiste en géopolitique, le sport, et en particulier le football, constitue désormais un levier majeur de soft power au 21ᵉ siècle. Il ne s’agit plus seulement de susciter l’adhésion ou l’émotion collective, mais de structurer des relations de confiance, de légitimer des trajectoires étatiques et de révéler la qualité des institutions qui soutiennent l’organisation de tels événements.
Dans cette perspective, l’expert estime que « le sport cesse d’être un espace neutre pour devenir un instrument indirect de gouvernance ». Il précise que « la capacité d’un État à organiser un événement sportif majeur constitue aujourd’hui un indicateur de fiabilité institutionnelle et de crédibilité stratégique ». Selon lui, « la CAN 2025 agit comme un révélateur, mettant à l’épreuve la cohérence stratégique, la maîtrise organisationnelle et la stabilité politique du pays hôte ».
Au-delà de la dimension étatique, l’organisation de la CAN repose également sur une mobilisation de la société marocaine. Cherkaoui Roudani insiste sur le rôle de l’hospitalité, de la participation citoyenne et de l’adhésion collective dans la réussite de l’événement. La souveraineté ne s’exerce pas uniquement par des dispositifs institutionnels, mais s’ancre dans un pacte de confiance entre l’État et les citoyens.
Cette dimension sociétale se traduit notamment par l’implication populaire et par une culture d’accueil présentée comme constitutive de l’image projetée par le Royaume. L’événement devient alors un moment de co-appropriation nationale, où la fierté marocaine s’articule avec une identité africaine assumée.
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Fan zones et inscription africaine
Au Maroc, la mise en place de fan zones dans l’ensemble des villes constitue un autre pilier de la stratégie liée à la CAN. Ces espaces permettent de décentraliser l’expérience du tournoi et de la rendre plus accessible au grand public. Selon les spécialistes, ils dépassent la simple retransmission des matchs pour devenir de véritables lieux d’échanges culturels africains, favorisant les rencontres entre langues, musiques et imaginaires du continent.
Cette approche contribue à renforcer l’inscription du Maroc dans une africanité vécue et partagée. Loin d’une dilution de l’identité nationale, l’analyse évoque un enrichissement mutuel, ancrant le pays dans un espace africain perçu comme intégré et coopératif.
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La désignation du Maroc comme pays hôte de la CAN 2025 est présentée comme le fruit d’une reconnaissance implicite de ses capacités organisationnelles. Cherkaoui Roudani souligne que « ce choix ne relève pas d’une opportunité conjoncturelle, mais d’une évaluation structurelle des capacités étatiques, notamment en matière de sécurité, de logistique et de continuité institutionnelle ». Il ajoute que cette décision met en lumière la combinaison entre sécurité opérationnelle, maîtrise logistique, hospitalité politique et stabilité institutionnelle dans un environnement régional complexe.
Dans ce cadre, la CAN est présentée comme un espace pacifié de recomposition symbolique du leadership africain, où la compétition sportive se substitue aux rivalités politiques traditionnelles. Cherkaoui Roudani souligne que cette posture traduit « une ambition de leadership d’équilibre, fondée sur l’inclusion, le partenariat et la co-production plutôt que sur la domination ». Il ajoute que le sport devient ici un levier symbolique, offrant un cadre apaisé de reconfiguration des rapports de leadership sur le continent.
Infrastructures et puissance durable
Sur le plan matériel, l’événement agit comme un accélérateur d’investissements. Selon Cherkaoui Roudani, « la CAN 2025 s’inscrit dans une logique de puissance durable, où l’investissement infrastructurel prime sur la rentabilité immédiate ». Il estime que « l’effort financier engagé traduit une vision de long terme, articulée avec les échéances internationales à venir, notamment la Coupe du monde 2030 ».
Cet effort est évalué à plus de cinq milliards de dollars, principalement consacrés aux infrastructures sportives, aux transports, à l’hôtellerie et aux services urbains. Une dynamique qui dépasse la seule logique événementielle pour s’inscrire dans une stratégie de développement durable et structurant.
La CAN 2025 est également présentée comme une étape déterminante en vue de la Coupe du monde 2030, consolidant la position du Maroc comme plateforme régionale capable d’accueillir des événements internationaux majeurs.
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Le choix de Rabat pour l’ouverture du tournoi est analysé comme un acte à forte portée symbolique. Cherkaoui Roudani souligne que « l’ancrage de la cérémonie inaugurale dans la capitale politique traduit la volonté d’inscrire le sport au cœur même de l’architecture de l’État ».
Il note par ailleurs que « la sobriété scénographique et la discrétion sécuritaire participent à une grammaire du pouvoir fondée sur la lisibilité et la maîtrise plutôt que sur l’ostentation ». Capitale politique et institutionnelle, la ville incarne la continuité de l’État, tandis que la scénographie, sobre et lisible, privilégie une démonstration maîtrisée de l’ordre et de la stabilité.
Cherkaoui Roudani souligne que la sécurité, volontairement discrète, contribue à cette mise en scène, faisant de l’absence d’ostentation un véritable message politique. La légitimité ne se proclame pas dans le discours, elle se manifeste à travers l’organisation elle-même.
De la CAN 2025 à la Coupe du monde 2030
La présence de la FIFA au plus haut niveau est interprétée comme une validation silencieuse, consacrant le Maroc comme un espace de confiance systémique. Pour Cherkaoui Roudani, « cette reconnaissance internationale ne relève pas uniquement du registre sportif, mais traduit un haut niveau de confiance dans la capacité de l’État à sécuriser, organiser et gérer un événement global ». Il estime qu’« elle révèle les asymétries de stabilité et de capacité étatique à l’échelle du continent africain », mettant en lumière les différences entre les pays dans leur aptitude à accueillir des événements de cette ampleur.
Enfin, la participation du prince héritier Moulay El Hassan inscrit la CAN 2025 dans une perspective de long terme. Selon l’analyse, elle confirme que le sport est désormais intégré à une stratégie transgénérationnelle, au même titre que la diplomatie et la sécurité.
L’organisation de la CAN 2025 apparaît ainsi comme un jalon dans un cycle stratégique plus large, en vue de la Coupe du monde 2030. L’événement sert d’exercice grandeur nature, démontrant la capacité du Royaume à conjuguer sport, diplomatie, sécurité et développement économique.
Dans un environnement international fragmenté, le document conclut que la maîtrise des espaces symboliques constitue désormais un pilier central de la puissance. À travers la CAN 2025, le Maroc ne se limite pas à organiser une compétition sportive, mais illustre une vision du sport comme outil politique de stabilité, de continuité et de crédibilité à l’échelle internationale.
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