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Un Sommet historique pour le climat : un langage commun pour le continent avant la COP 28

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Le Sommet africain pour le climat s’ouvre ce lundi à Nairobi, au Kenya. Ce sommet historique, tout premier rendez-vous de ce type sur le continent, marque le début des quatre mois les plus chargés de l’année pour les négociations climatiques internationales. En effet, un succès à Nairobi donnerait un élan à plusieurs réunions internationales-clés avant la COP28 : d’abord en septembre le sommet du G20 en Inde et l’Assemblée générale des Nations unies, puis en octobre la réunion annuelle de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI) à Marrakech.

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Ainsi, pendant trois jours, dirigeants et responsables d’Afrique et d’ailleurs discuteront des moyens à même de faire du continent une puissance émergente en matière d’énergies renouvelables et de permettre l’appel à une aide financière internationale pour révéler ses «opportunités sans équivalent». Le président kényan, William Ruto, lui, souhaite que ce sommet permette au continent de trouver un langage commun sur le développement et le climat afin de «proposer des solutions africaines» à la COP28.

«Offrir prospérité et bien-être aux populations croissantes d’Afrique sans précipiter le monde dans un désastre climatique plus profond n’est pas une proposition abstraite ou un vœu pieux. C’est une réelle possibilité, prouvée par la science», a déclaré le président Ruto lors de son discours inaugural.

Un impératif climatique

Le continent, où vivent 1,2 milliard d’habitants qui comptent parmi les populations les plus vulnérables au changement climatique, est particulièrement touché par les conséquences du changement climatique. Alors qu’il n’est responsable que de 6 % du total des émissions de CO2 ! Un positionnement africain sur le sujet permettrait de «sauver des vies et la planète du désastre», a déclaré le président kényan.

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Et pour cause, dans un communiqué publié ce lundi, l’organisation Oxfam indique à juste titre que les pays riches – largement responsables de l’aggravation de la crise climatique en Afrique de l’Est – n’ont versé à l’Éthiopie, au Kenya, à la Somalie et au Soudan du Sud que 2,4 milliards de dollars en financement du développement lié au climat en 2021. Un montant bien en dessous des 53,3 milliards de dollars dont l’Afrique de l’Est a besoin chaque année pour atteindre ses objectifs climatiques d’ici 2030.

«Les économies industrialisées ont largement contribué à la crise climatique, qui touche aujourd’hui de manière disproportionnée des régions comme l’Afrique de l’Est», souligne Oxfam. Les pays du G7 et la Russie sont, à eux seuls, responsables de 85% des émissions mondiales depuis 1850, écrit-elle.

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Selon le rapport « Unfair Share » d’Oxfam, une sécheresse prolongée et des précipitations irrégulières ont tué près de 13 millions d’animaux et détruit des centaines de milliers d’hectares de cultures dans ces quatre pays, laissant des millions de personnes sans revenus ni nourriture. Ces pays ont subi des pertes estimées à 30 milliards de dollars entre 2021 et la fin de 2023. Selon les calculs d’Oxfam, ils ont également perdu du bétail pour une valeur d’environ 7,4 milliards de dollars.

En conséquence, plus de 40 millions de personnes y souffrent d’une grave crise de la faim. «Depuis la dernière sécheresse en 2017, le nombre de personnes ayant besoin d’une aide d’urgence dans les quatre pays a plus que doublé, passant de 20,7 millions à 43,5 millions», a déclaré Fati N’Zi-Hassane, directrice d’Oxfam en Afrique.

… et une source d’opportunités

«Nous aspirons à définir un nouvel agenda de la croissance qui permette une prospérité partagée et un développement durable», a plaidé William Ruto sur X (ex-Twitter) en appelant la communauté internationale à dégager des fonds pour le continent et à alléger le poids de la dette pesant sur les pays africains.

Pour limiter le réchauffement climatique à +1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle prévu par l’accord de Paris, l’investissement doit atteindre 2.000 milliards de dollars par an dans ces pays en l’espace d’une décennie, a calculé le FMI.

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Selon Joseph Nganga, du mouvement Global Energy Alliance for People and Planet (GEAPP), qui promeut les énergies renouvelables dans les pays en développement, nommé par William Ruto pour présider le sommet, la conférence devrait démontrer que «l’Afrique n’est pas juste une victime mais un continent dynamique avec des solutions pour le monde». «Nous avons le pouvoir de répondre à cette crise (…). L’Afrique représente une opportunité pour le monde si nous travaillons ensemble à des bénéfices mutuels», a-t-il estimé.

Un projet de «Déclaration de Nairobi» consulté par l’Agence France-Presse, mais encore en négociation, évoque le «potentiel unique de l’Afrique pour être une partie essentielle de la solution». Le document cite le vaste potentiel de la région en énergies renouvelables, sa main-d’œuvre jeune et ses atouts naturels, notamment 40 % des réserves mondiales de cobalt, de manganèse et de platine, essentiels pour les batteries et l’hydrogène.

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Mais les défis sont écrasants pour un continent où quelque 500 millions de personnes n’ont pas accès à l’électricité. Et les dirigeants africains ne cessent de rappeler les obstacles financiers considérables.

L’Afrique, qui abrite 60% des meilleurs potentiels mondiaux en énergie solaire, n’a toutefois qu’une capacité installée similaire à la Belgique, ont souligné récemment le président kényan et le patron de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). En cause, notamment: seuls 3% des investissements mondiaux de la transition énergétique arrivent en Afrique, ont-ils déclaré.