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Au Niger, un «mouvement d’humeur» de la garde présidentielle

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Des soldats de la garde présidentielle retiennent le président du Niger, Mohamed Bazoum, dans son palais dans la capitale Niamey dont les accès ont été bloqués, ont rapporté mercredi plusieurs sources. Si les revendications de la garde présidentielle, dirigée depuis 2011 par le général Oumar Tchaini, sont pour l’heure encore peu claires, l’armée, elle, se dit prête à attaquer les éléments impliqués dans ce «mouvement d’humeur».

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Des militaires putschistes ont annoncé à la télévision nationale, mercredi 26 juillet au soir, avoir renversé le président Mohamed Bazoum, démocratiquement élu en 2021. Le président nigérien est actuellement retenu à Niamey par la garde présidentielle, commandée par le général Omar Tchiani, à l’issue de «pourparlers» qui ont échoué. Cependant, aucune information n’a dans un premier temps filtré sur le contenu de ces «pourparlers».

«Nous, forces de défense et de sécurité réunies au sein du CNSP, avons décidé de mettre fin au régime que vous connaissez», celui du président Bazoum, a déclaré le colonel major, Amadou Abdramane, entouré de neuf autres militaires en tenue à la télévision nationale à Niamey, au nom d’un Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP). «Toutes les institutions sont suspendues», a-t-il continué, annonçant la fermeture des frontières et l’instauration d’un couvre-feu de 22h à 5h «jusqu’à nouvel ordre».

Selon la BBC, des informations indiquent que l’ancien président, Mohammed Issoufou, dirige les discussions avec les gardes présidentiels afin d’éviter que la situation ne s’aggrave. L’armée, elle, a lancé «un ultimatum» à la garde, selon une source proche de la présidence. Mercredi matin, les accès à la résidence du président et aux bureaux de la présidence, qui se trouvent dans le même périmètre, étaient interdits.

«Cela fait suite à la dégradation continue de la situation sécuritaire, la mauvaise gouvernance économique et sociale», a justifié le colonel major Amadou Abdramane. Mais les raisons de cette tentative de coup d’État restent encore floues. En effet, les revendications de la garde présidentielle, dirigée depuis 2011 par le général Oumar Tchaini, sont pour l’heure encore peu claires.

Un mouvement d’humeur

Dans un message publié sur Twitter, la présidence du Niger indique que mercredi matin, «des éléments de la garde présidentielle (GP) ont engagé un mouvement d’humeur anti-républicain et tenté en vain d’obtenir le soutien des forces armées nationales et de la garde nationale». «L’armée et la garde nationale sont prêtes à attaquer les éléments de la GP impliqués dans ce mouvement d’humeur s’ils ne reviennent pas à de meilleurs sentiments», ajoute la présidence. Elle affirme que «le président de la République et sa famille se portent bien».

«Les acquis obtenus de haute lutte seront sauvegardés. Tous les Nigériens épris de démocratie et de liberté y veilleront», a par ailleurs réagi sur Twitter, jeudi matin, le président Mohamed Bazoum. Une source proche de la présidence interrogée par l’AFP a assuré que cette tentative était «vouée à l’échec».

Lors de leur intervention télévisée, les forces militaires ont annoncé des restrictions de libertés ainsi que l’interruption de la validité de la Constitution. «Toutes les institutions issues de la VIIe République sont suspendues, les secrétaires généraux des ministères se chargeront de l’expédition des affaires courantes, les Forces de défense et de sécurité gèrent la situation, il est demandé à tous les partenaires extérieurs de ne pas s’ingérer», a déclaré le colonel major, Amadou Abdramane.

Par ailleurs, «les frontières terrestres et aériennes sont fermées jusqu’à la stabilisation de la situation» et «un couvre-feu est instauré à compter de ce jour de 22 heures à 5 heures [de 21 heures à 4 heures à Paris] du matin sur toute l’étendue du territoire jusqu’à nouvel ordre».

Pluie de condamnations

La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a condamné, «avec la plus grande fermeté, cette tentative de prise du pouvoir par la force». Elle a ainsi appelé «les putschistes à libérer immédiatement et sans condition» le président Bazoum.

«La CEDEAO condamne avec la plus grande fermeté la tentative de prise du pouvoir par la force et appelle les putschistes à libérer immédiatement et sans condition le président démocratiquement élu de la République», selon les termes du communiqué de l’organisation régionale présidée par le Nigeria. «La CEDEAO et la communauté internationale tiendront toutes les personnes qui sont impliquées dans cet acte pour responsables de la sécurité et de la sûreté du président, de sa famille, des membres du gouvernement et du public en général».

De son côté, le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a condamné «fermement de tels agissements de la part de militaires agissant en totale trahison de leur devoir républicain». Il leur demande «de cesser immédiatement» cette «inacceptable entreprise», dans un communiqué publié mercredi après-midi. Moussa Faki a appelé «le peuple nigérien, tous ses frères en Afrique, en particulier la CEDEAO, et dans le monde, à joindre leurs voix pour une condamnation unanime d’une telle tentative et pour un retour immédiat et sans conditions des militaires félons à leurs casernes».

Quatre putschs depuis 1960

Depuis l’indépendance de cette ex-colonie française en 1960, il y a eu quatre coups d’État. Le premier s’est produit en avril 1974 contre le président Diori Hamani, le dernier en février 2010 qui a renversé le président Mamadou Tandja. Sans compter les tentatives de putsch, nombreuses.
Le 31 mars 2021, le gouvernement nigérien avait annoncé l’arrestation de plusieurs personnes après une tentative de coup d’État présumée, deux jours avant la prestation de serment du président Mohamed Bazoum.

En avril 2022, Ousmane Cissé, ancien ministre nigérien de l’Intérieur d’un régime de transition militaire (2010-2011) avait été écroué pour son implication présumée dans ce putsch raté.
Une arrestation «également en lien avec un dernier coup d’État déjoué en mars 2022, alors que le président Bazoum se trouvait en Turquie», selon un officiel nigérien, mais les autorités n’avaient pas communiqué publiquement sur ce deuxième putsch manqué.

Le pays est devenu, au fil des ans, un allié clé pour plusieurs nations occidentales qui tentent de freiner la propagation du militantisme islamiste dans la région.