26 juin 1677 : prise de Marrakech
À la fin du XVIIe siècle, le Maroc est un Royaume en lambeaux. L’Empire saadien, jadis glorieux sous Ahmed al-Mansour dit « Dahbi » (le doré), est affaibli. Les descendants du Sultan se disputent l’héritage dans un chaos moyenâgeux. Les tribus du Sud, auparavant loyales, se soulèvent. Les villes impériales se ferment, chacune défendant son Prince et son pan de pouvoir. Marrakech, capitale emblématique des Saadiens, n’échappe pas à cette rixe.
Pendant ce temps, une nouvelle étoile s’élève au nord, dans les montagnes du Tafilalet. Une famille chérifienne, les Alaouites, y établit son autorité sur fond de légitimité religieuse et d’une habile alliance tribale. Moulay Rachid, puis son frère et successeur Moulay Ismaïl, portent en eux l’ambition d’unifier le Royaume par la foi.
Moulay Ismaïl, bâtisseur d’un empire
Lorsque feu Moulay Ismaïl monte sur le trône en 1672, il a une idée claire de ses objectifs, à savoir réunifier le Maroc sous une seule autorité et mettre fin à l’anarchie politique qui fragilise le pays face aux appétits étrangers (notamment ceux des puissances européennes en quête de ports et de comptoirs, avons-nous besoin de le rappeler).
Mais il est clair que l’unité passe par la soumission des grandes villes. Et Marrakech est la clef de voûte de ce projet. Ville ocre, ville rebelle, cœur du sud, elle est aux mains des Saadiens depuis plus d’un siècle. En 1677, elle est tenue par Ahmad Al Abbas, dernier prince saadien à prétendre au trône. Marrakech devient alors l’objectif militaire et politique principal de Moulay Ismaïl.
L’armée de Moulay Ismaïl se met en marche au printemps 1677. Composée de tribus alliées et de contingents de la toute jeune garde noire (une milice d’esclaves affranchis formés pour le combat et fidèles au Sultan), elle avance avec une détermination implacable. Le siège de Marrakech débute. Les combats sont rudes, les murailles résistent, mais l’issue est prévisible.
La prise de Marrakech
Le 26 juin 1677 Marrakech tombe. Le pouvoir saadien s’effondre comme un château de cartes. Ahmad Al Abbas est capturé. Il est exécuté peu après, mettant un terme définitif à la dynastie saadienne. La ville ocre, enfin, devient alaouite. Elle est le sceau d’une ère nouvelle. Le Maroc vient de changer de visage. Moulay Ismaïl peut désormais entreprendre son œuvre, construire un Etat fort et centralisé.
Le Sultan ne réside pas à Marrakech, préférant Meknès, qu’il transformera en « Versailles marocaine ». Mais Marrakech reste un pôle stratégique entre le Haut Atlas, le Souss et le désert.
La chute de Marrakech est le dernier clou dans le cercueil saadien et l’acte fondateur de l’unification du Maroc sous les Alaouites. Moulay Ismaïl poursuivra son œuvre pendant plus d’un demi-siècle, jusqu’à sa mort en 1727. Il consolidera les frontières, construira une armée redoutable et négociera d’égal à égal avec Louis XIV.