Cameroun : cinq recours déposés après la présidentielle

Le Conseil constitutionnel camerounais a annoncé, mercredi soir, avoir reçu cinq recours concernant l’élection présidentielle du 12 octobre, à laquelle Paul Biya, 92 ans, brigue un huitième mandat. Aucun de ces recours ne provient toutefois d’Issa Tchiroma Bakary, son ancien ministre devenu opposant, qui revendique pourtant la victoire. Les résultats officiels sont attendus dans une dizaine de jours.
Des recours pour « fraude électorale »
Selon la télévision publique CRTV, cinq requêtes ont été déposées auprès du Conseil constitutionnel dans les délais prévus par le code électoral, soit dans les trois jours suivant la clôture du scrutin. Les plaignants demandent notamment « l’annulation du vote pour fraude électorale ».
Malgré sa forte mobilisation à la tête du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC), Issa Tchiroma Bakary n’a pas choisi cette voie. Son directeur de campagne, Chris Maneng’s, a expliqué que le candidat « ne voulait pas s’engager dans une démarche tronquée », estimant que le Conseil constitutionnel s’appuyait sur des procès-verbaux « entachés d’irrégularités ». Il a toutefois affirmé que des documents prouvant « la vérité des urnes » seront publiés en ligne dans les prochains jours.
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Tensions et incidents dans plusieurs villes
Des vidéos relayées sur les réseaux sociaux montrent des affrontements entre partisans d’Issa Tchiroma Bakary et forces de l’ordre à proximité des antennes de la commission électorale (Elecam), notamment à Bafoussam (ouest) et Douala, la capitale économique. À Douala, quatorze personnes ont été arrêtées, a indiqué jeudi le préfet Sylac Marie Mvogo à la CRTV.
Des incendies ont également été signalés autour de l’antenne d’Elecam à Dschang, toujours dans l’ouest du pays. Les autorités appellent au calme, tandis que le Conseil constitutionnel pourrait convoquer les requérants afin qu’ils présentent leurs preuves.
Des institutions sous contrôle du pouvoir
Les analystes estiment qu’il est peu probable que ces recours aboutissent. « Il est clair que les institutions vont reconnaître Paul Biya comme vainqueur », commente Brice Molo, historien et sociologue, maître de conférences à l’Institut catholique de Paris (ICT).
Lors du scrutin de 2018, l’ensemble des recours avait déjà été rejeté par un Conseil constitutionnel dont les membres sont considérés comme proches du président sortant. En août dernier, cette même institution avait d’ailleurs invalidé la candidature de Maurice Kamto, arrivé deuxième en 2018, mais qui s’était proclamé vainqueur au lendemain du vote.
Après 43 ans au pouvoir, Paul Biya semble donc se diriger vers un huitième mandat, dans un climat politique tendu et sur fond d’accusations de verrouillage du système électoral.