Le chantier du Sud avance. Il est vaste et multidimensionnel. Il combine routes, ports, énergie, dessalement, tourisme, transformation industrielle, santé et éducation. L’ambition est nationale et elle est aussi continentale.

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Laâyoune‐Sakia El Hamra, Guelmim‑Oued Noun et Dakhla‑Oued Eddahab. Trois régions, un même souffle. Les Provinces du Sud sont en chantier et ce n’est plus seulement de la parole. C’est du concret.

Tout est parti d’une vision royale. En 2015, le roi Mohammed VI lançait le Nouveau modèle de développement des provinces du Sud (NMDPS). L’ambition était claire : faire du Sahara un modèle de développement intégré et durable. Un territoire d’avenir, pas seulement un symbole.

L’application du modèle de développement de nos provinces du Sud traduit Notre fidélité à notre engagement auprès des citoyens dans nos provinces du Sud pour ériger celles-ci en un véritable modèle de développement intégré. Nous l’entendons comme un pilier d’appui pour l’insertion définitive de ces provinces dans la patrie unifiée, et pour le renforcement du rayonnement du Sahara, comme centre économique et comme trait d’union entre le Maroc et son prolongement africain.

Discours du Roi à l’occasion du 40e anniversaire de la Marche Verte.

Dix ans plus tard, le cap est maintenu. L’État a mobilisé 87,5 milliards de DH (MMDH) pour concrétiser cette vision. Les projets couvrent les routes, les ports, l’énergie, l’eau, le tourisme, l’agriculture et le social. Une planification globale, pensée avec précision pour transformer le Sahara en carrefour économique entre le Maroc et l’Afrique.

Routes, autoroutes, axes logistiques : le Sud se relie

Dans le désert, une route change tout. Elle relie, structure, donne vie. Le chantier le plus emblématique reste celui du corridor Tiznit–Laâyoune–Dakhla, long de plus de 1.055 km. Cette route express à deux voies est presque achevée. Elle réduit considérablement le temps de trajet entre le centre du pays et les confins du Sud. Les camions transportant les produits de pêche, les matériaux ou marchandises circulent désormais plus vite et plus sûrement.

Autour de cet axe, de nouveaux centres logistiques émergent. À Laâyoune, une plateforme régionale de transport et de distribution est en cours de finalisation. Elle permettra de fluidifier le trafic entre les ports et les zones industrielles. À Dakhla, la route dessert déjà les chantiers portuaires et les zones agricoles en devenir.

Le rail, lui, reste encore à l’étape d’étude. Mais le projet avance : l’Office national des chemins de fer (ONCF) planche sur un raccordement ferroviaire reliant Agadir à Laâyoune, puis à Dakhla. Le but est de connecter le Sahara au corridor atlantique africain et ouvrir la voie à un futur axe ferroviaire transsaharien.

Ports et zones industrielles : Dakhla Atlantique et Boujdour en première ligne

Sur la côte atlantique, un projet domine tous les autres : le port de Dakhla Atlantique. Évalué à 13 MMDH, ce port en construction au nord de la ville est conçu pour accueillir les plus grands navires de commerce et de pêche. Il comprendra un port de commerce, un port de pêche, des zones logistiques et industrielles, et un chantier naval. Sa vocation est triple : soutenir la filière halieutique, ouvrir un nouveau couloir pour le commerce vers l’Afrique de l’Ouest, et attirer les investisseurs étrangers dans la transformation des produits de la mer. Le port de Dakhla Atlantique est aussi pensé comme une base stratégique d’exportation des futures productions énergétiques (hydrogène, électricité verte) vers l’Europe.

Plus au nord, Boujdour a pris une longueur d’avance avec sa zone industrielle halieutique. Cette zone propose des unités de transformation du poisson, des entrepôts frigorifiques et des espaces logistiques. L’idée est simple : créer de la valeur sur place plutôt que d’exporter les matières premières brutes.

À Laâyoune, le port continue d’être modernisé, notamment par l’ajout de nouvelles installations pour la pêche hauturière et les services maritimes. Ces infrastructures ancrent les provinces du Sud dans les grandes routes commerciales atlantiques.

Énergie et hydrogène vert : la nouvelle ruée vers le Sahara

Au Sud, le potentiel énergétique est énorme. Les vents puissants du Sahara et son ensoleillement exceptionnel en font un terrain idéal pour les énergies renouvelables. Le parc éolien de Tarfaya, mis en service en 2014, reste la référence : 301 MW de capacité, gérés par Tarfaya Energy Company (filiale d’Engie et Nareva). Ce parc alimente des milliers de foyers et d’entreprises.

À Laâyoune, d’autres projets éoliens et solaires ont suivi, comme ceux de Foum El Oued et Akhfennir, totalisant plus de 400 MW supplémentaires.

Mais la véritable révolution se joue désormais autour de l’hydrogène vert. Le gouvernement a identifié Laâyoune et Dakhla comme pôles majeurs de cette filière d’avenir. Plusieurs consortiums internationaux, dont CWP Global, TotalEnergies et Masen, ont été sélectionnés pour développer des projets géants. Ces projets consistent à produire de l’électricité verte (éolien et solaire), à la transformer en hydrogène, puis en dérivés exportables (ammoniac vert, méthanol).

L’enjeu : faire du Sahara un centre d’exportation énergétique vers l’Europe et l’Afrique.

Eau, dessalement et agriculture irriguée : un pari technique

Il faut l’avouer, le manque d’eau reste le défi central du Sud. Mais la technologie offre désormais des solutions. À Dakhla, un projet de dessalement d’eau de mer d’envergure a été lancé, financé par un partenariat public-privé. La station, alimentée par de l’énergie renouvelable, doit produire plus de 35 millions de m³ d’eau par an. Une partie de cette eau alimentera la ville et les zones industrielles. L’autre sera utilisée pour irriguer un périmètre agricole de 5.000 hectares, dédié à la production maraîchère et horticole. Le but est de créer une agriculture durable dans un climat aride, renforcer la sécurité alimentaire locale et offrir de l’emploi rural stable.

Des projets similaires de dessalement sont à l’étude à Laâyoune et Boujdour, avec un même principe : combiner énergies propres et irrigation moderne.

Tourisme et économie bleue : Dakhla, la vitrine sportive et balnéaire

Dakhla est aujourd’hui l’un des noms les plus connus du Maroc à l’international. Le tourisme y a explosé grâce à son lagon, spot mondial de kitesurf. Des compétitions internationales y sont organisées chaque année, attirant des visiteurs venus d’Europe, d’Amérique et d’Afrique.

Mais le modèle s’élargit. De nouveaux complexes touristiques sont en construction, combinant sport, écotourisme et bien-être. Les autorités locales misent sur un tourisme durable, à forte valeur ajoutée, qui profite aux habitants. Des zones d’hébergement éco-responsables, des routes panoramiques et des centres de formation aux métiers du tourisme voient également  le jour.

L’économie bleue ne se limite pas au tourisme. La pêche reste un pilier historique du développement du Sud. Les ports de Dakhla, Laâyoune et Boujdour accueillent une flotte moderne. Les usines de transformation se multiplient : surgélation, conserverie, farines de poisson. Ce secteur génère des milliers d’emplois directs et contribue fortement aux exportations nationales de produits de la mer.

Industrie, phosphates et valeur ajoutée : une diversification tangible

Le tissu industriel du Sud s’élargit au-delà de la pêche. L’Office chérifien des phosphates (OCP) prépare une nouvelle génération d’investissements dans la région de Boucraâ. Objectif : transformer sur place une partie du phosphate extrait, au lieu de l’acheminer directement vers le Nord. À terme, des unités de production d’engrais pourraient y voir le jour, accompagnées d’un port phosphatier modernisé.

D’autres projets émergent : unités de fabrication de matériaux de construction, industries alimentaires liées à la pêche, et zones d’innovation technologique autour de Laâyoune et Dakhla. Le tissu économique devient donc plus diversifié, moins dépendant des matières premières.

Infrastructures sociales : santé, enseignement, logements

Ce développement économique n’a de sens que s’il s’accompagne d’un progrès social. Dans les provinces du Sud, les investissements publics dans le social sont massifs. À Laâyoune, le chantier du Centre hospitalier universitaire (CHU) avance rapidement. Ce futur pôle médical régional offrira des soins spécialisés, réduisant le recours aux hôpitaux du Nord. Des centres de santé ruraux, maternités et cliniques de proximité complètent ce dispositif.

L’éducation n’est pas en reste. De nouvelles écoles, des lycées techniques et des filières universitaires sont ouverts dans chaque région. L’Université Ibn Zohr a étendu son réseau à Laâyoune et Guelmim, avec des filières en ingénierie, gestion et énergies renouvelables.

Le logement suit cette cadence. Des programmes de logements sociaux et moyens standing sont lancés pour accompagner l’urbanisation rapide de Laâyoune et Dakhla. Tous ces projets soutiennent la cohésion sociale, fixent les populations et favorisent l’émergence d’une classe moyenne saharienne.

L’ensemble de ces chantiers forme ainsi un écosystème cohérent. La route relie les ports. Le port alimente l’industrie. L’énergie verte soutient la production et l’irrigation. L’eau rend possible l’agriculture. Et le tout alimente une dynamique sociale et territoriale.

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