Nouvel épisode de tension entre Alger et Paris autour des visas

Les tensions diplomatiques entre l’Algérie et la France connaissent un nouveau rebondissement. Lundi, Alger a exprimé son «grand étonnement» après la décision des autorités françaises d’imposer des visas aux détenteurs algériens de passeports diplomatiques et de service. Une mesure considérée comme une «violation» des engagements bilatéraux, à laquelle l’Algérie promet de répondre par une «stricte réciprocité».
Dans un communiqué virulent, le ministère algérien des Affaires étrangères a dénoncé une démarche unilatérale et un mépris des usages diplomatiques. «Jusqu’à ce jour, l’Algérie n’a reçu aucune notification officielle par le canal diplomatique», affirme le texte, soulignant une infraction manifeste à l’Accord algéro-français de 2013, qui exempte les détenteurs de passeports diplomatiques et de service de visa.
Alger pointe du doigt une communication «douteuse» de la part de Paris, reprochant aux autorités françaises d’orchestrer des «fuites» vers des médias choisis, au lieu d’adresser des notifications officielles. Selon la diplomatie algérienne, cette décision française constitue une «suspension de fait» de l’accord sans respecter les formes prévues, notamment l’article 8 de l’accord de 2013.
Un climat de défiance persistant
Cette décision intervient dans un contexte déjà tendu entre les deux pays. Depuis l’été 2024, les relations se sont sensiblement détériorées, notamment après la reconnaissance par Paris de la souveraineté du Maroc sur le Sahara. Un geste qui a suscité la colère d’Alger, entraînant le rappel de son ambassadeur et l’annulation d’une visite d’État du président Abdelmadjid Tebboune en France.
L’incarcération de l’écrivain Boualem Sansal en Algérie, en novembre dernier, et le refoulement de plusieurs ressortissants algériens en situation irrégulière, dont l’influenceur Doualemn, ont également contribué à envenimer les rapports. Ces affaires ont conduit plusieurs membres du gouvernement français à évoquer une «riposte graduée», dont la restriction de visas pour certains responsables algériens.
Un fragile espoir d’apaisement compromis
Un bref réchauffement avait pourtant été amorcé fin mars, lors d’un échange téléphonique entre Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune, à l’occasion de Aïd Al-Fitr. La visite à Alger, le 6 avril, du ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères avait laissé entrevoir une «nouvelle phase dans une relation d’égal à égal». Mais l’arrestation à Paris d’un cadre consulaire algérien dans une affaire liée à l’opposant algérien Amir DZ est venue raviver la défiance algérienne, qui a aussitôt convoqué l’ambassadeur de France pour protester.
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Une réponse ferme d’Alger
Dans son communiqué, l’Algérie rejette catégoriquement les allégations selon lesquelles elle aurait elle-même enfreint l’accord de 2013, rappelant que «c’est la partie française qui a sollicité» cet accord dès 1990. Alger affirme ne nourrir «aucun attachement particulier» à cet arrangement, mais en attend un strict respect ou une dénonciation formelle. Dans le cas contraire, elle appliquera la réciprocité «à la juste mesure du manquement» de Paris à ses engagements.