Au Mali, Wagner installe ses prisons clandestines

Musique russe diffusée à plein volume, supplices physiques, détention sans procès : le groupe paramilitaire russe Wagner aurait installé au Mali une mécanique de terreur similaire à celle observée en Syrie ou en Ukraine. C’est ce que dévoile une enquête coordonnée par Forbidden Stories et ses partenaires, dont Le Monde et France 24.
Le consortium identifie six camps militaires dans lesquels des civils maliens sont détenus, interrogés, parfois torturés : Bapho et Nampala (Ségou), Sévaré et Sofara (Mopti), ainsi que Kidal et Niafunké (nord du pays). Ces bases, contrôlées conjointement par l’armée malienne et les mercenaires russes, servent de prisons officieuses où la loi ne s’applique plus.
Wagner a gagné plus de 2,5 milliards de dollars grâce à l’extraction illicite d’or (rapport)
Conditions inhumaines et impunité totale
Un humanitaire arrêté à Nampala témoigne des séances de torture ponctuées de musiques russes, des violences avec des bâtons et des câbles électriques, et des simulations de noyade. Il faisait partie d’un groupe d’hommes capturés après une opération de recherche de matériel de communication supposément lié à des groupes jihadistes affiliés à al-Qaïda.
Un aide-soignant touareg, arrêté sur un marché à Kita, raconte quant à lui les rafles, les pillages, et les transferts d’hommes vers des bases comme Sévaré. Lui-même n’a pas été battu, mais il se souvient d’un prisonnier l’ayant mis en garde : « Prie pour ne jamais vivre ce qu’on a vécu ici. »
À Kidal, des détenus sont entassés dans d’anciens conteneurs de la Minusma. Privés d’air, de nourriture et de soins, ils y survivent dans des conditions inhumaines. Les autorités maliennes et russes, sollicitées par les journalistes, n’ont pas donné suite.