Pourquoi l’Afrique du nord attire les touristes ?

Le secteur du tourisme en Afrique connaît un essor au cours de ce premier semestre 2025. Comme l’an dernier, le trio de tête est dominé par les pays du Maghreb, notamment le Maroc, l’Égypte et la Tunisie. À eux seuls, ils totalisent 22 millions de visiteurs, soit une hausse de 18,3% par rapport à 2024.
Dans ce classement, le Maroc et l’Égypte se livrent une bataille intense pour conserver la première place. Avec respectivement 8,9 millions et 8,7 millions de visiteurs au premier semestre, les deux pays sont au coude-à-coude. Si le Maroc maintient une légère avance, la dynamique égyptienne, portée par une croissance de 24% sur un an, annonce un second semestre très disputé, rapporte Le360.
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Les deux pays misent sur des atouts distincts. Le Maroc bénéficie d’une offre diversifiée (culture, nature, mer, désert) et d’une connectivité renforcée grâce aux compagnies low-cost, ce qui lui permet d’attirer un large public, notamment européen. De son côté, l’Égypte capitalise sur ses sites historiques de renom, tels que Le Caire, Louxor et Alexandrie, ainsi que sur l’ouverture imminente du Grand Musée égyptien, qui devrait renforcer sa visibilité mondiale.
Cependant, des freins subsistent. En Égypte, les tensions régionales, notamment la récente guerre entre Israël et l’Iran, ont entraîné jusqu’à 10% d’annulations de réservations hôtelières en juin. Au Maroc, l’écart croissant entre le nombre d’arrivées (+19%) et la hausse des recettes touristiques (+8,5%) interroge sur la rentabilité réelle de cette croissance.
Des recettes en décalage avec les flux touristiques
Ce décalage est d’ailleurs une constante dans toute la région. Même si les arrivées explosent, les revenus touristiques ne suivent pas toujours. Au Maroc, les recettes se sont élevées à 45 milliards de dirhams (4,5 milliards de dollars) à fin mai 2025, soit une dépense moyenne de 6.250 dirhams (625 dollars) par touriste. Ce montant, déjà supérieur à celui de ses voisins, reste toutefois en deçà des ambitions affichées.
Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène. Une part importante des touristes arrive via des compagnies low-cost, un segment réputé pour ses voyageurs plus économes. De plus, les Marocains résidant à l’étranger (MRE), qui représentent une large part des visiteurs, dépensent souvent en dehors des circuits officiels : hébergement familial, restaurants non déclarés, etc. Sans oublier que de nombreux touristes ne séjournent pas à l’hôtel, ce qui limite la traçabilité des dépenses.
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La situation est encore plus marquée en Tunisie, où la dépense moyenne par touriste plafonne à seulement 241 dollars, soit près de trois fois moins que celle du Maroc. Malgré une progression de 11% des arrivées, qui atteignent 4,3 millions de visiteurs, les recettes n’ont augmenté que de 8%, pour s’établir à 1,04 milliard de dollars.
Tunisie : un tourisme balnéaire de masse
Si la Tunisie reste la troisième destination touristique du continent, elle est clairement distancée par ses voisins. Elle souffre encore d’une image liée au tourisme balnéaire de masse, centré sur les plages, les clubs et les formules « all inclusive » à bas coût. Ce modèle attire certes un grand nombre de visiteurs, principalement des Algériens, Libyens, Français et Allemands, mais génère peu de valeur.
Face à ce constat, les autorités tunisiennes ont entrepris une restructuration de leur offre touristique. Leur objectif est de diversifier les produits proposés, en misant sur la qualité, la culture et le développement durable. Cette stratégie s’accompagne d’une modernisation des infrastructures d’accueil et d’un effort de formation du personnel pour mieux répondre aux attentes d’une clientèle plus exigeante.
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Les perspectives restent tout de même encourageantes : après avoir dépassé les 10,2 millions de visiteurs en 2024, la Tunisie vise 11 millions de touristes en 2025. Pour cela, elle a noué des partenariats avec des compagnies aériennes européennes afin de compenser les faiblesses structurelles de TunisAir.
Au-delà de leurs différences, les trois pays partagent un défi commun : faire face à la concurrence croissante des destinations méditerranéennes européennes telles que l’Espagne, l’Italie ou la Grèce. Pour rester attractifs, ils devront renforcer la qualité de leurs services, améliorer l’expérience touristique globale et accroître la valeur générée par visiteur.
Le Maroc, de son côté, mise sur l’organisation de la CAN en décembre 2025, événement majeur qui devrait attirer des milliers de visiteurs supplémentaires. « Nous entamons la seconde moitié de l’année avec deux chantiers prioritaires : le renforcement de l’aérien et le développement de l’offre d’hébergement et d’animation », résume Fatim-Zahra Ammor, ministre du Tourisme.
Dans cette compétition, la quantité ne suffira plus. L’avenir du tourisme en Afrique, et plus particulièrement dans cette région, se jouera désormais sur la qualité, la rentabilité et la durabilité.