Le FMI prêt à accompagner le Sénégal

La délégation du FMI, dirigée par Edward Gemayel, s’est entretenue avec plusieurs membres du gouvernement sénégalais, dont Cheikh Diba, ministre des Finances et du Budget, et Ahmadou Al Aminou Lo, ministre d’État auprès du président. Ces discussions ont porté sur les mesures correctives à adopter à la suite des révélations de la Cour des comptes et de l’audit mené par Forvis-Mazars.
Cet audit a mis en lumière des irrégularités budgétaires majeures entre 2019 et 2023, avec une sous-évaluation de la dette publique. Initialement estimée à 74,4% du PIB fin 2023, la dette du gouvernement central a été révisée à 111%, puis à 118,8% fin 2024, en raison de passifs non déclarés. Ces découvertes ont accentué la pression sur les finances de l’État et renforcé la nécessité de réformes urgentes.
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Le chef de la délégation a salué « l’engagement des autorités en faveur de la transparence et de la responsabilité budgétaires » et a insisté sur la nécessité de renforcer le cadre institutionnel de gestion de la dette. Parmi les priorités évoquées figurent la centralisation de cette gestion, le renforcement du rôle du Comité national de la dette publique, l’achèvement de l’audit des arriérés de paiement, ainsi que la création d’une base de données budgétaires centralisée. L’institution encourage également la consolidation du Compte unique du Trésor, destiné à améliorer le suivi et la rationalisation des dépenses publiques.
Le Plan de redressement économique et social comme cadre d’action
Cette mission intervient quelques semaines après la présentation, par le Premier ministre Ousmane Sonko et en présence du président Bassirou Diomaye Faye, du Plan de redressement économique et social (PRES). Celui-ci constitue la première étape de la Vision Sénégal 2050 et vise à corriger un « héritage économique catastrophique », selon les mots du chef du gouvernement.
Le déficit budgétaire réel, réévalué à près de 14% du PIB, et la dette publique, proche de 119%, soulignent l’ampleur des déséquilibres accumulés au cours des dernières années. Pour y faire face, le PRES repose à 90% sur des ressources domestiques, estimées à 5.667 milliards de FCFA pour la période 2025-2028.
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Ces ressources proviendraient de recettes fiscales additionnelles (2.111 milliards de FCFA), du recyclage d’actifs publics (1.091 milliards de FCFA) et de financements alternatifs non adossés à la dette (1.352 milliards de FCFA). L’ambition est de limiter le recours à l’endettement extérieur tout en stimulant les recettes internes. Le plan prévoit également la mise en œuvre de réformes structurelles, parmi lesquelles la rationalisation des dépenses, l’amélioration de la gouvernance et l’élargissement de l’assiette fiscale grâce à de nouveaux leviers tels que la fiscalité numérique, verte et bleue, ainsi que la valorisation du foncier.
Pour sa part, le FMI a accueilli favorablement ces orientations et a exprimé sa disponibilité à soutenir Dakar dans l’élaboration d’un nouveau programme de réformes, articulé autour de quatre priorités : la transparence budgétaire, la relance des secteurs stratégiques, l’équité sociale et la résilience climatique.
Une économie sous tension, mais en croissance
Malgré la gravité de la situation budgétaire, l’économie sénégalaise continue de montrer des signes positifs. Au premier trimestre 2025, la croissance a atteint 12,1% en glissement annuel, portée par l’entrée en production des champs pétroliers et gaziers de Sangomar et de GTA. Cette performance place le Sénégal parmi les économies les plus dynamiques du continent.
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Cependant, cette croissance repose essentiellement sur les hydrocarbures. Hors pétrole et gaz, l’activité économique progresse à un rythme plus modeste de 3,1%, freinée par des difficultés persistantes dans le secteur de la construction et dans l’industrie chimique. L’inflation, en revanche, reste contenue à 0,7%, ce qui contribue à préserver le pouvoir d’achat des ménages et à limiter les tensions sociales.
Pour les autorités sénégalaises, l’appui du FMI constitue un levier essentiel pour restaurer la crédibilité financière du pays sur les marchés internationaux et attirer des investissements. Dakar a d’ailleurs exprimé son intention de solliciter un nouveau programme auprès de l’institution, dont l’examen par le conseil d’administration devrait intervenir dans les prochaines semaines.