Gabon : début du procès de la famille Bongo un an après le putsch
Ce lundi 10 novembre, la Cour criminelle spéciale de Libreville ouvre un procès historique pour détournement de fonds publics et blanchiment de capitaux impliquant la famille de l’ancien président gabonais Ali Bongo. Si Ali Bongo lui-même n’est pas poursuivi, son épouse Sylvia Bongo Ondimba, leur fils aîné Noureddin Bongo Valentin, ainsi que onze proches occupant des fonctions de premier plan à la fin de la présidence, sont accusés de douze chefs d’inculpation.
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Un procès sous haute tension
Ni Sylvia ni Noureddin Bongo ne seront présents à l’audience. Résidant actuellement à Londres, Noureddin, 33 ans, a confirmé son refus de comparaître, dénonçant une « mascarade judiciaire » orchestrée, selon lui, par le régime du général Brice Oligui Nguema, auteur du putsch du 30 août 2023. « Les conditions d’un procès juste et équitable ne sont toujours pas réunies », a-t-il déclaré à l’AFP, estimant que « le sort est déjà décidé au préalable ».
L’avocate de la défense, Me Gisèle Eyue-Bekale, a également annoncé son absence, affirmant qu’elle refusait de « justifier une manipulation judiciaire ». Elle a par ailleurs déposé un pourvoi en cassation contre le renvoi devant le tribunal, procédure qui pourrait, selon elle, suspendre le procès.
Le général Oligui Nguema, élu président en avril dernier après avoir dirigé le coup d’État, avait promis un procès transparent et équitable. La présidence gabonaise dénonce désormais une tentative de déstabilisation par la famille Bongo, après la diffusion de vidéos non authentifiées montrant de supposées pressions sur les magistrats. « Quelle que soit la propagande, justice sera rendue », a réaffirmé Théophane Nzame-Nze Biyoghe, porte-parole de la présidence.
Tortures, exil et contre-attaques judiciaires
Sylvia et Noureddin Bongo avaient été arrêtés après le putsch et détenus pendant plus de vingt mois. Libérés en mai dernier pour raisons médicales, ils ont quitté le Gabon avec Ali Bongo et affirment avoir été torturés, physiquement et psychologiquement, durant leur incarcération. « Ma mère est brisée, je pense qu’elle ne s’en remettra jamais », confie Noureddin Bongo, accusant certains proches du président Oligui Nguema d’avoir participé à ces sévices.
La famille Bongo, qui possède également la nationalité française, a saisi la justice française pour ces tortures. « L’enquête avance beaucoup plus vite qu’on ne pouvait l’espérer. Justice sera rendue, même si cela prend du temps », assure Noureddin Bongo.
Un procès historique s’ouvre donc dans un climat de forte tension politique et de contestation judiciaire, alors que le Gabon tente de tourner la page d’un demi-siècle de règne Bongo.