Coup d’État en Guinée-Bissau : le président Embaló arrêté
Trois jours après une élection présidentielle revendiquée victorieuse par le camp du président sortant, la Guinée-Bissau a basculé dans une nouvelle crise politique. Des tirs entendus près du palais présidentiel puis l’arrestation d’Umaro Sissoco Embaló ont plongé Bissau dans la stupeur, alors que les résultats officiels étaient encore attendus.
Une journée de tensions et de chaos autour du palais présidentiel
La capitale bissau-guinéenne a vécu, mercredi 26 novembre, une montée brutale des tensions. En fin de matinée, des tirs ont retenti aux abords immédiats du palais présidentiel, semant la panique parmi les habitants. Dans une atmosphère déjà lourde, marquée par l’attente des résultats de la présidentielle et des législatives organisées trois jours plus tôt, des passants ont couru se mettre à l’abri alors que des rafales éclataient près du siège du pouvoir exécutif.
Selon plusieurs témoins, des hommes en treillis ont pris position sur le principal axe menant à la présidence, tandis que des coups de feu étaient également signalés près des locaux de la commission électorale. Ces détonations seraient intervenues peu après la publication de premiers résultats partiels d’un scrutin particulièrement scruté dans ce pays habitué aux crises institutionnelles.
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Arrestation du président Embaló et de hauts responsables sécuritaires
Quelques heures plus tard, c’est le président sortant lui-même qui a confirmé son arrestation. Dans une déclaration accordée à Jeune Afrique, Umaro Sissoco Embaló a indiqué avoir été interpellé vers midi dans son bureau au palais présidentiel. Il assure n’avoir subi aucune violence physique et parle ouvertement d’un « coup d’État », qu’il attribue au chef d’état-major de l’armée de terre.
L’arrestation a également touché trois hauts responsables sécuritaires :
- le chef d’état-major général, le général Biague Na Ntan,
- le vice-chef d’état-major, le général Mamadou Touré,
- le ministre de l’Intérieur, Botché Candé.
Ces interpellations simultanées au sommet de l’appareil sécuritaire témoignent de la gravité de la crise et de la dimension interne du coup de force.
Un scrutin explosif et une double revendication de victoire
L’élection présidentielle, organisée dimanche 23 novembre, devait livrer ses résultats officiels ce jeudi. Mais dès dimanche soir, Umaro Sissoco Embaló affirmait l’avoir emporté dès le premier tour avec 65% des voix, selon un décompte effectué par son propre camp.
Face à lui, son principal rival, Fernando Dias da Costa, outsider porté par une partie de l’opposition, revendiquait lui aussi la victoire. Les deux camps se proclamaient en tête, nourrissant un climat d’extrême tension dans un pays où les scrutins se transforment régulièrement en crises politiques.
Le vote s’était pourtant déroulé dans le calme, malgré l’absence notable d’un poids lourd de la vie politique : Domingos Simões Pereira, ancien Premier ministre et figure majeure du PAIGC, empêché de se présenter. Son parti, l’un des plus influents du pays, avait apporté son soutien à Fernando Dias da Costa, renforçant les incertitudes autour de l’issue du scrutin.
La Guinée-Bissau à nouveau plongée dans l’incertitude
À l’heure où la population attend encore la proclamation officielle des résultats, la situation reste extrêmement floue. Les événements de la journée de mercredi (tirs, mouvements militaires, arrestations) ont sidéré Bissau, laissant planer une grande incertitude sur les heures à venir.
Ce nouvel épisode de volatilité politique confirme la fragilité chronique de la Guinée-Bissau, où tensions électorales, rivalités militaires et crises institutionnelles s’enchevêtrent régulièrement. Alors que les Bissau-Guinéens attendent encore de connaître leur futur président, le pays semble renouer avec ses vieux démons, dans un climat de vive inquiétude.