Kaïs Saïed limoge son premier ministre Kamel Madouri

Le président tunisien, Kaïs Saïed, a décidé de limoger son premier ministre, Kamel Madouri, dans la nuit de jeudi à vendredi. Ce technocrate, nommé en août 2024 lors d’un remaniement important, a été remplacé par Sarra Zaafrani Zenzri, la ministre de l’Équipement. Zenzri, ingénieure en génie civil et dirigeante du ministère depuis 2021, devient ainsi la deuxième femme à occuper le poste de premier ministre en Tunisie, après Najla Bouden, qui a servi jusqu’en août 2023.
Le limogeage de Madouri intervient alors que la Tunisie traverse une grave crise économique. Avec une croissance de seulement 0,4% en 2024, un taux de chômage élevé de 16% et une dette nationale s’élevant à environ 80% du PIB, le président Saïed s’était récemment montré insatisfait de la gestion du gouvernement face à ces défis. Bien que le reste du gouvernement ait été maintenu, ce changement semble marquer une volonté de réorganiser l’exécutif pour mieux répondre aux crises actuelles.
Zenzri, 62 ans, est une figure expérimentée, parlant plusieurs langues et ayant une carrière notable dans le secteur public. Avant de devenir ministre de l’Équipement, elle avait dirigé la division chargée de la construction des autoroutes au sein du même ministère. Cette nomination s’inscrit dans un contexte politique tendu, où la gestion des ressources et des finances publiques est devenue un point crucial pour la stabilité du pays.
Ce limogeage fait partie d’une série de changements de dirigeants opérés par le président depuis 2021. En février dernier, Saïed avait déjà révoqué la ministre des Finances, Sihem Boughdiri Nemsia, et l’avait remplacée par la magistrate Michket Slama Khaldi. Ces décisions s’inscrivent dans un climat où le président, jouissant de pouvoirs étendus, a multiplié les réformes et remaniements dans un contexte de tensions politiques, notamment avec l’opposition et les organisations de la société civile.
Depuis sa prise de pouvoir en 2021, Saïed a renforcé ses prérogatives en modifiant la Constitution pour instaurer un régime ultra-présidentiel. Cette concentration de pouvoir et la répression de l’opposition ont suscité des critiques, spécialement des ONG qui dénoncent une régression des libertés et des droits humains en Tunisie, un pays qui a été le berceau du Printemps arabe. Dans le même temps, Saïed a opté pour une politique étrangère axée sur des relations renforcées avec l’Algérie, tout en rompant les négociations avec le FMI sur un prêt de 2 milliards de dollars, ce qui complique encore davantage la situation économique du pays.