Deux francs CFA en un
Le grand malade de cette fin d’année sur le continent est, sans aucun doute, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Cet ensemble de six pays – Cameroun, Gabon, Congo-Brazzaville, Tchad, Centrafrique et Guinée équatoriale – est la deuxième zone monétaire ayant en commun l’usage du franc CFA, en plus de l’Uemoa composée de la Côte d’Ivoire, du Bénin, du Sénégal, du Mali, du Burkina Faso, du Togo et du Niger.
Les nuages s’amoncèlent sur les économies de la Cemac. Le taux d’inflation devrait être largement au-dessus des 3% fixés par les critères de convergence tandis que plusieurs pays connaissent de grosses difficultés de trésorerie. A cela s’ajoute l’affaissement des avoirs extérieurs des pays pétroliers de la sous-région. Ceux-ci ont fondu de 500 milliards de FCFA en deux ans, ce qui fragilise encore un peu plus les économies. Même le FMI, pourtant si diplomate dans ses avis, estime que ces pays se rapprochent tout doucement du seuil d’alerte, situé à moins de 3 mois d’importations en équivalent de réserves de change. Les chefs d’Etats de la sous-région réunis en sommet d’urgence en début de semaine, sont restés impuissants.
Le bulletin de santé actuel de la Cemac est la résultante des années d’incurie de la conduite de la politique économique. Le marché, lui, a tranché. Sur le papier, la parité entre le franc CFA de la Cemac et celui utilisé en Afrique de l’Ouest devrait régir les échanges entre les deux sous-régions. Dans les faits, il n’en est rien. A cause d’un profond désalignement de taux d’inflation et de déficits extérieurs, le franc de la Cemac s’échange avec une décote de 10 à 20% en Afrique de l’Ouest. Ce dont s’étonnent les ressortissants et les commerçants de la sous-région lorsqu’ils séjournent à Abidjan ou à Bamako, ou contractent des affaires avec leurs homologues de l’Uemoa. En réalité, la Cemac et l’Uemoa partagent une monnaie commune et non une monnaie unique. La décote sur le marché de change ne fait que constater ce fait.