Irresponsabilité

Le spectacle donné par certains chefs d’Etat africains au sommet sur le financement du développement conclu jeudi 3 juillet à Séville est effarant. Les héritiers de « l’esprit de Bandung », le sommet historique des « non-alignés » tenu dans la cité indonésienne en 1955, vont se retourner dans leur tombe. Ces pères de l’indépendance africaine se battaient pour s’affranchir de puissances étrangères en comptant d’abord sur les ressources de leurs pays. C’est tout le contraire de leurs lointains successeurs. Au lieu de chercher des solutions endogènes pour financer les infrastructures et répondre aux immenses attentes sociales de la population, ils se complaisent à chercher des boucs émissaires. Le procès des agences de notation financière, fait à nouveau à Séville par des dirigeants africains, relève de l’irresponsabilité. Si beaucoup de pays africains se financent à des coûts très élevés sur le marché international, c’est de la faute aux agences de notation, accusent-ils. Moody’s, Fitch Ratings et S&P Global Ratings (l’ex Standard & Poor’s qui à l’origine était un journal financier), sont diabolisées. Ces agences sont accusées d’alourdir le poids de la charge de la dette des pays africains parce qu’« elles ne prendraient pas en compte les spécificités économiques du continent » dans leur méthodologie.
Ce bobard n’est pas sans rappeler les années quatre-vingt lorsque le Fonds monétaire international (FMI) était le méchant qui empêchait les gouvernements à investir dans les secteurs sociaux. En réalité, cette victimisation permanente sert à masquer l’incurie et la mauvaise gouvernance. Pourquoi les pays asiatiques ne se plaignent jamais de « l’injustice » des agences de notation ?
Voilà un thème que nos dirigeants devraient débattre au prochain sommet sur la dette.