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Traditions marocaines : le temps des moussems

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Après la fièvre estivale des moussems organisés dans les quatre coins du Royaume, l’automne signe le prolongement des célébrations traditionnelles puisque leur organisation est liée de près ou de loin au calendrier agricole (récolte, préparation de la nouvelle saison…). S’ajoutent à cela, les moussems spirituels des différentes zaouïas. Florilège.

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Avec la sécheresse que subit le Maroc et particulièrement le monde rural, le temps n’est pas vraiment à la fête. Mais tradition oblige, le calendrier des moussems n’a pas été chamboulé et les 800 manifestations programmées accueillent un public en mode rattrapage post-Covid-19. Tbourida, musique, expositions, spectacles de culture locale, mythes… Tout est prétexte pour organiser un rassemblement sous l’égide des autorités locales, des ministères et autres organismes publics qui soutiennent ces manifestations locales à côté des événements internationaux comme le Salon de l’agriculture de Meknès ou le Salon du cheval d’El Jadida.

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Moussems traditionnels, agricoles et artisanaux

Étymologiquement, le terme « moussem » est un dérivé du nom « maoussim » qui vient de l’arabe classique et qui signifie saison. C’était à l’origine un rassemblement collectif avec une connotation spirituelle. C’est aussi un lieu pour faire du commerce et un moment de distraction.

Les manifestations campagnardes dédiées aux produits locaux ne datent pas d’aujourd’hui. Historiquement, du temps du protectorat, Sefrou a créé son Festival des cerises en 1920. Dix ans plus tard, la Fête des roses de Kelaat Mgouna a vu le jour. Plus récemment, l’État a parrainé plusieurs autres manifestations agricoles comme le Festival du safran à Taliouine, le Moussem du raisin à Bouznika ou encore le Festival de la fraise à Moulay Bousselham et le Festival de l’amande d’Aknoul. Côté élevage, l’agenda du ministère de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et forêts, liste la Foire caprine de Chefchaouen et jben, la Foire caprine d’Essaouira et viande de chevreau de l’arganier, le Festival du chameau à Guelmim et celui du cheval à Tissa.

Les produits artisanaux ne sont pas en reste puisqu’ils sont exposés lors des différentes manifestations locales, quelles que soient leurs thématiques. En plus, ils jouissent d’événements dédiés comme le Festival du tapis de Tazenakhte, le Moussem de Oulmès et son exposition des produits du terroir (eau florale de lavande, tapis et vêtements traditionnels), le Salon d’artisanat de Bejaad, organisé en marge du Moussem religieux du Sidi Bouabid Charki, etc.

Quant aux manifestations liées à la culture locale ou à l’identité, elles sont relativement modernes avec une série de Festivals à thèmes (arts populaires à Marrakech, gnaouas à Essaouira musiques sacrées à Fès, culture oasienne à Figuig, art hassani à Dakhla, etc). Sans oublier le célèbre Moussem des fiançailles d’Imilchil, dont l’édition 2022 a été clôturée samedi dernier avec la traditionnelle cérémonie de mariage collectif à laquelle ont pris part cette année 35 couples issus de différentes tribus de cette région du Royaume. Hinde Taajri introduisait ainsi ce Moussem dans les colonnes de la revue « Kalima » en septembre 1986 : «Ce soir-là, seules les étoiles furent complices. Voilant leur éclat d’ombres généreuses, elles permirent aux deux silhouettes de se fondre rapidement dans l’obscurité. Pour les Aït Brahim et les Aït Azza dont la haine réciproque ignore les limites du temps, le jour se leva sur une même image : celle d’une couche vide, irrémédiablement vide. Aux deux extrémités du territoire Haddidou, la fureur gronda». La journaliste et essayiste continue à raconter l’histoire des Roméo et Juliette marocains et son dénouement : «Le scandale était sans nom. « Ils » avaient osé. Osé partir. Osé enfreindre l’interdit. Par sa faute à elle, lui, le fils avait trahi son père et tous les hommes du clan. Par sa faute à lui, elle, la fille, avait perdu son honneur et celui des siens. La nature forge les êtres à son image. Sur cette terre rude au dépouillement hautain, les vents de poussière ont poli l’âme des habitants au même titre que la pierre. Les sentiments, eux, se sont nourris de l’immensité du ciel. À la nudité de l’espace, ils se sont aguerris. Mais face à la haine, l’amour cependant l’emporta. Ainsi en fut-il aux temps anciens sur les hauteurs d’un Haut Atlas farouche».

Aujourd’hui encore, les actes de mariage des couples sont signés sous une tente à la place située près du Mausolée de Sidi Hmad Oulamghani, dans la commune de Bouzmou, en présence du gouverneur de la province de Midelt ainsi que de plusieurs responsables locaux.

Moussems spirituels et encadrement des autorités

Qui dit moussem spirituel, dit mausolée et présence des représentants de l’État. Après deux années de suspension à cause de la pandémie de la Covid-19, les moussems des différentes confréries ont repris de plus belle. Au mois de juillet dernier, les disciples de la zaouïa machichiya ont fait le déplacement à Jbel Alem pour assister au Moussem de Moulay Abdessalam Ben Mchich, le grand-père des chorfas alamiyines. À cette occasion, une délégation de la Chambellanie royale (ou chambellerie royale) a remis un don du roi Mohammed VI en présence d’un grand nombre de mourides et de visiteurs, d’élus locaux, de personnalités religieuses, d’intellectuels, d’invités du Maroc et de représentants d’autres confréries religieuses au Maroc.

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Lors du Moussem de Moulay Abdessalam © DR

Lire aussi : Chambellerie royale : la gardienne de la cour

Au mois d’août, la commune rurale de Moulay Abdellah a accueilli des centaines de milliers de personnes à l’occasion du Moussem de Moulay Abdellah Amghar. « Grâce aux sacrifices et aux grands efforts déployés par les agents de la Gendarmerie royale et des Forces auxiliaires, tout s’est déroulé sans anicroche », avaient noté les organisateurs. En plus des activités spirituelles, dont des soirées de madih, des concours de mémorisation et de déclamation du Saint Coran, des compétitions de Tbourida, des exhibitions de la chasse au faucon, mais aussi des rencontres culturelles, des soirées artistiques et des expositions commerciales et artisanales ont été organisées. Cette concentration des citoyens est propice pour les services de l’État afin de communiquer directement avec la population et de passer des messages. Il n’est pas anodin aussi de croiser des hauts fonctionnaires et des hommes politiques dans ce genre de rassemblement.

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Tbourida nocture au Moussem de Moulay Abdellah Amghar © DR

Enfin, il y a des célébrations liées au calendrier islamique comme celles qui se déroulent en ce moment à l’approche du Mawlid (naissance du prophète). À Fès, la fameuse cérémonie annuelle de procession du catafalque (Kessoua), destinée à couvrir le tombeau de Moulay Idriss Al Azhar, fondateur de la capitale spirituelle du Royaume, a eu lieu jeudi. Les festivités ont été entamées par la parade de nombreuses troupes folkloriques qui sont parties de la célèbre place de Bab Boujloud vers le mausolée, souligne une dépêche de l’agence MAP. « Accompagnée d’offrandes, la procession a été ponctuée de musiques et chants spirituels des confréries et de troupes folkloriques qui se sont organisées en file pour se diriger vers le sanctuaire, situé en plein cœur de la Médina », poursuit l’agence de presse officielle. D’autres moussems et processions sont prévus la semaine prochaine dont celle des cierges à Salé.

Les moussems constituent des événements intéressants pour promouvoir la culture locale et booster le segment animation pour le secteur touristique. Ceci étant, certaines pratiques archaïques liées à des rituels païens ou mystiques doivent absolument disparaître. Elles n’ont rien à voir avec les traditions religieuses ni avec la modernité dans laquelle s’est inscrit notre pays. À Meknès, les habitants souffrent depuis quelques jours des va-et-vient ininterrompus des adeptes de zaouïas avec un vacarme continu. Les Meknassis chuchotent qu’ils n’arrivent pas à fermer l’œil la nuit et qu’ils sont intimidés s’ils portent des vêtements colorés à la veille de la célébration de Aïd Al Mawlid Annabaoui. Certains regrettent même la période de la Covid-19.

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Taxinomie du patrimoine immatériel culturel des douze régions du Royaume

Région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima :
Le savoir-faire lié à la poterie féminine du Rif, la musique Jahjouka et le savoir-faire lié à la Djellaba de Ouezzane.
Région de Fès-Meknès :
Le brocart traditionnel de Fès, les savoirs et le savoir-faire de la céramique bleue de Fès et sur la chasse au Sloughi.
Région de Rabat-Salé-Kénitra :
Tarab Al Ala, le Moussem de procession des cierges de Salé et le festival international « Maroc des contes ».
Région de Casablanca-Settat :
Le savoir-faire lié à la construction des Tazota, à la Kharqa Saissiya et à la fête de la Mimouna.
Région de l’Oriental :
La Sparterie, les savoir-faire artisanaux associés aux traditions vestimentaires masculines (Selham/burnous de Figuig) et les chants et danses de la région (Reggada et Laalaoui).
Région de Marrakech-Safi :
Les connaissances liées à la construction des barques d’Essaouira, le savoir-faire lié à la poterie de Safi, outre le Talbbat, art de confection de tapis de prière et tarbouch de Marrakech.
Région de Souss-Massa :
Le Ihyadn (Oulad Sidi Hmad Ou Moussa), la musique et chants de Rwais, l’espace apicole collectif d’Inzerki et la revitalisation des chants féminins de Taroudant.
Région de Béni Mellal-Khénifra :
Le chant de Boughanim, le langage sifflé dans le Haut-Atlas et le savoir-faire lié à la Djellaba de Bzou.
Région de Laâyoune-Sakia El Hamra :
Le savoir-faire et les connaissances liés aux bijoux en argent du Sahara, ainsi que les rites et connaissances liés à la tente traditionnelle (kheima) du Sahara, sans oublier le travail du cuir.
Région de Draâ-Tafilalet:
Le genre musical Beldi de Tafilalet, le savoir-faire lié au tissage du tapis Aït Ouaouzguit, ainsi que les pratiques et le savoir-faire liés à la construction en terre.
Région de Guelmim-Oued Noun:
Les études anthropologiques s’intéressent aux chants et danses d’El Guedra, aux connaissances traditionnelles liées à la répartition des eaux en milieu rural, à la danse Ganga et aux Aawwad des Aït Baamran.
Région de Dakhla-Oued Eddahab:
Le jeu traditionnel du Ssig, la Mehdra, connaissances liées à la transmission du savoir traditionnel, et les traditions pastorales de l’élevage du dromadaire.

Source : étude anthropologique initiée par le ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, en marge du lancement du « Label Maroc »

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